L’entreprise autrement | Arrêtons cette descente aux enfers ! (V)

Il vaudrait mieux ne plus parler, chez nous, de développement ni de progrès, encore moins de relance de l’économie et de croissance. Pourquoi s’acharner à vouloir parler de choses qui, paraît-il et à notre humble avis, ne sont pas fait pour nous, que dire alors d’y espérer un jour les voir prendre forme?

Loin d’être excessif ou de vouloir jouer les Cassandre et autre défaitistes, nos propos ne font  qu’exprimer le constat d’un observateur doublé d’un modeste acteur de la vie publique, qui, depuis plus de 40 ans, n’arrête pas de se triturer les méninges autour d’une question qui reste  toujours d’actualité depuis près de deux siècles : «Pourquoi les autres avancent et nous non ?»

Autres questions : «Pourquoi certains, parmi ces autres qui étaient à la traîne, ont-ils, en l’espace de quelques années, fait d’énormes progrès avec de faibles moyens, alors que nous non ?».  Et aussi «Pourquoi nous régressons à tous les niveaux ?»

Et encore : «Pourquoi avons-nous des success stories individuelles et rarement collectives ? Et pourquoi nos génies ne peuvent pas briller généralement chez nous et ne peuvent s’épanouir que sous d’autres cieux ? Est-ce un caractère génétique de notre peuple ou un hasard objectif ?».

Partons de quelques constats élémentaires mais très éloquents. Premier constat, une écrasante majorité de la population qui évolue dans l’espace public (piétons, sur roues,…) ne connaît rien du code de la route, ou presque, alors qu’il y va de leur propre sécurité et une écrasante majorité de l’infime partie qui le connaissent ne l’appliquent pas et sont à l’origine de bon nombre de tragédies.

Lorsque il y a un petit couac dans la circulation, non seulement c’est le fautif qui, en général, s’emporte, croyant qu’il est la victime, mais vous assistez aussi au déversement d’un torrent d’insultes puisées dans un vocabulaire plus souillé que celui du plus vulgaire des charretiers. Ignorance, arrogance et maltraitance en toute impunité.   

Deuxième constat, après 65 ans d’indépendance, une bonne majorité des Tunisiens ne se lavent pas convenablement ou pas du tout les mains en sortant des toilettes et aussi avant de manger ou servir à manger. Que pouvons-nous appeler ce comportement  quasi-général ?

Il est par ailleurs révoltant d’être obligé de rester impuissant devant les agissements des préparateurs de sandwiches, souvent dans des fast-food assez chics, qui ne se gênent pas outre mesure d’utiliser leurs mains non protégées ou portant des gants crasseux.

Les ravages causés par le covid-19 sont la conséquence directe de ce manque d’hygiène et de respect des règles sanitaires qui sont pourtant très simples. Le phénomène est réellement ahurissant auquel il faudrait ajouter le laxisme des autorités, qui auraient pu imposer, du moins dans les lieux publics ou fréquentés par le public, le strict respect desdites règles.

Troisième constat, la baisse inquiétante du niveau des compétences de base,  sociales et intellectuelles. Nous sommes devenus un peuple incapable de s’exprimer convenablement, aussi bien à l’oral qu’à l’écrit, faisant preuve d’une indigence lexicale inouïe doublée d’une pauvreté criarde en concepts. Cela en plus de la baisse considérable du niveau culturel, surtout pour tout ce qui touche à notre patrimoine et notre histoire commune, et du niveau de la maîtrise de la plupart des métiers.

Quatrième constat, qu’il évolue dans l’espace public réel ou virtuel, le Tunisien est en général agressif et  violent. Dans les réseaux sociaux règne, chez nous, une agressivité belliqueuse hors pair. Un «facebooker», pas d’accord avec le contenu d’un statut, intervient généralement avec une forte dose de violence et d’insultes faisant preuve d’une inquiétante intolérance  et d’un manque patent  de savoir-vivre ensemble.

Ces comportements asociaux se sont répandus à telle enseigne qu’ils ont envahi des milieux considérés comme pour l’élite, tels que les milieux politiques. Comment ne pas avoir peur lorsque nos politiciens sont si agressifs et violents et qu’ils peuvent facilement accéder un jour au pouvoir ?     

Cinquième constat : une formidable anarchie du côté de notre alimentation quotidienne. Une anarchie qui nous coûte cher en termes de maladies, de soins, de gaspillage, de baisse de la productivité et d’explosion de la demande au détriment de la balance alimentaire. La liste est longue et elle n’est pas de tout honneur. Notre pays est gravement malade et sa population est généralement abandonnée à son sort. Indiscipline galopante, anarchie, indifférence, nonchalance, violence, laxisme, individualisme, inculture, culte des apparences, hypocrisie, corruption, etc. Autant de vices et de tares qui sont incompatibles avec le développement et le progrès.

Laisser un commentaire