Le forum se tient au moment où le continent africain souffre d’un assèchement des ressources financières. Ce rendez-vous panafricain sera un cadre de rencontre et d’échange entre les opérateurs économiques et financiers  en vue d’identifier les mécanismes  de financement et de soutien aux opérateurs économiques tunisiens et africains.

Les travaux de la 4e édition de la conférence internationale “Financing Investment and Trade In Africa” (Fita) ont démarré, hier à Tunis, devant un parterre d’hommes d’affaires venus des quatre coins du continent. Organisé par le conseil d’affaires tuniso-africain (TABC), cet événement panafricain qui se veut un lieu de rencontre et d’échange entre les opérateurs économiques et financiers d’Afrique a été rehaussé par la présence de Marouen Abassi,  gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), et de neuf ministres africains dont des ministres d’Etat de la Côte d’Ivoire, de la Guinée, du Burkina Faso, du Niger, de la République démocratique du Congo et de Libye. La conférence portera principalement sur les mécanismes de financement et d’accompagnement des opérateurs africains dans la période  post-Covid. Selon Anis Jaziri, président du TABC,  l’objectif de cette édition du forum est de  trouver des moyens et des solutions pour financer les exportations tunisiennes vers l’Afrique subsaharienne. “Ce forum se tient au moment où la Tunisie traverse une crise financière aiguë et souffre d’un  assèchement des ressources financières. Les entreprises ont besoin de financement pour impulser leurs exportations vers le continent africain ”, a-t-il précisé dans une déclaration aux médias. 

Cette année, la Fita est, aussi, marquée par la participation de plusieurs  banques internationales et africaines, notamment la filiale de la Banque islamique de développement ITFC, la banque africaine Africa Finance Corporation, Afreximbank et le fonds d’investissement de la BAD Africa 50. Jaziri a affirmé que ces institutions financières joueront  un rôle important lors de cette édition en mettant  en avant des mécanismes  de financement et de soutien aux opérateurs économiques tunisiens et africains. 

Des financements supplémentaires de l’ordre de 285 milliards de dollars sur la période 2021-2025

Prononçant une allocution au nom du président de la République Kaïs Saïed, le gouverneur de la BCT, Marouen Abassi, a mis l’accent sur la contribution apportée par le système financier pour faire face aux conséquences économiques de la pandémie en Tunisie. “Ce rôle doit être consolidé davantage sur l’ensemble du continent, en vue d’accompagner efficacement la reprise de l’activité économique, par le renforcement des capacités du système, l’amélioration des services financiers basés sur le digital au profit des entreprises aussi bien celles agissant dans les domaines conventionnels que les start-up et les finetech”, a-t-il souligné. Il a ajouté, à cet égard, que  la coopération et les synergies entre les institutions financières régionales doivent être raffermies et mettre à profit le recours à l’innovation et aux nouvelles technologies  qui constitue désormais une exigence de premier ordre.  

Evoquant les défis qui s’imposent au continent dans la période post-Covid, Abassi a souligné que les autorités publiques sont appelées à réagir avec célérité et efficacité  pour mettre en œuvre les réformes urgentes en vue d’assainir le climat des affaires et d’asseoir un environnement plus propice et incitatif à l’investissement, conforme aux exigences de la création de l’entreprise innovante. Il a fait savoir que les pays africains vont devoir faire face à des défis majeurs  pour impulser au plus vite le rythme de l’activité économique, maîtriser la dette et surmonter les difficultés croissantes à accéder aux marchés financiers internationaux et garantir un financement stable et à des conditions abordables. Selon les estimations du FMI, des financements supplémentaires de l’ordre de 285 milliards de dollars sont nécessaires aux économies africaines  sur la période 2021-2025, dont près de la moitié aux pays à faible revenu.

Quelles sont les politiques prioritaires à mettre en place après la crise Covid ?

“L’intérêt est de changer les difficultés en de véritables opportunités et c’est le moment de le faire”, a souligné Abassi.  Il a ajouté que les autorités de régulation, notamment les Banques centrales, ont également un rôle crucial à jouer en cette période de crise. “Ces autorités ont un rôle déterminant à jouer  non seulement en tant qu’institutions de stabilisation macroéconomique et de préservation des équilibres financiers, prérequis de la relance de l’investissement local et étranger, mais aussi en tant que pourvoyeur des agents économiques d’un outil fiable d’ancrage des anticipations et de la visibilité nécessaire dans un environnement entaché d’incertitude”, a-t-il argué.  A cet égard, il a affirmé que la Banque centrale de Tunisie (BCT) travaille avec ses pairs et partenaires du continent pour renforcer la coopération dans les domaines du financement, de l’intégration et la modernisation des systèmes de paiement africains, mais aussi sur l’élaboration des statuts de l’Institut monétaire africain devant conduire à terme à la création d’une Banque centrale africaine. Mettant en exergue l’importance de la conjonction des efforts aux niveaux bilatéral et régional pour la mise en place d’une politique globale de relance post-Covid, Abassi a précisé que des politiques structurelles communes doivent être mises en place en vue de promouvoir l’économie numérique et le développement durable (économie verte). 

Il a indiqué que ces efforts conjugués doivent prioriser, en premier lieu, la lutte contre l’épidémie à travers une vaccination massive  des populations africaines. “Il serait impératif d’unir nos efforts afin d’agir ensemble pour un accès équitable aux vaccins, aux traitements et aux moyens de diagnostic sûrs et abordables”, a-t-il précisé. La mobilisation d’un soutien international flexible en termes de plafonds d’endettement et de déficit  pour appuyer les plans de relance des pays africains  figure également parmi les priorités identifiées par le gouverneur de la BCT. Le financement des investissements publics dans les secteurs du numérique, des énergies renouvelables et conventionnelles et de  l’inclusion financière, notamment les fintechs et le commerce électronique, doivent être également dans la ligne de mire des décideurs africains. “La Banque mondiale estime que le coût de ces investissements pourrait atteindre 80 à 100 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années”, a-t-il indiqué. En outre, Abassi a appelé à favoriser  la création de zones de libre-échange au niveau régional et continental et  la mise en œuvre de mesures communes de facilitation du commerce visant à lever les freins bureaucratiques et à simplifier les procédures douanières.

Les inégalités qui ont surgi 

Dans son allocution d’ouverture, Hakim Ben Hammouda, commissaire général de la 4e édition Fita 2021, a mis l’accent sur les inégalités entre les pays pauvres et riches que la pandémie a mis à nu.  Il s’agit principalement des inégalités dans l’accès aux vaccins mais aussi dans l’accès au financement pour mettre en place les programmes de sauvetage et de relance économique. Il a affirmé que malgré les initiatives lancées par la communauté internationale dans l’objectif de  soutenir les pays pauvres à faire face à la pandémie, dont notamment l’initiative Covax, et le report de paiement du service de  la dette accordé par les pays du G20, les pays africains éprouvent de grandes difficultés à surmonter les conséquences économique de la crise Covid. 

“Nous appelons solennellement à une plus grande solidarité pour aider l’Afrique à faire face à la pandémie, arrêter ses ravages et à relancer nos économies. Cette pandémie est un moment de grandes opportunités. La crise a accéléré des mutations et des transformations que le monde était en train de traverser”, a-t-il lancé. 

Il est à souligner que les travaux de la conférence internationale Fita 2021 se poursuivront les 25 et 26 juin. La Libye est l’invitée d’honneur de cette édition. Des thèmes relatifs à l’impact du Covid-19 sur le financement du commerce interafricain, à la transformation digitale, au futur de  la coopération financière mais aussi au jumelage Tunisie-Libye seront traités lors des panels qui auront lieu tout au long de l’événement. Le forum offre également un cadre de rencontre B2B pour plus de 1.000 hommes d’affaires.

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