SOUVENIRS, SOUVENIRS… : Khaled Touati (buteur du CA et de l’équipe nationale des années 80-90) : «En football moderne : plus de consignes, moins d’initiatives »

Lui, c’est Khaled Touati, le serial buteur clubiste des années 80-90.
Pour ce canonnier émérite, buteur-né, marquer est avant tout une question de flair, de placement, d’anticipation, de roublardise même, et enfin, de métier. Renard des surfaces, Khaled Touati s’exprimait pleinement sur le terrain grâce à son flegme et sa vista.
Nous sommes allés rencontrer ce compétiteur hors normes qui a bien voulu nous retracer son parcours, revenant sur ces moments forts, mais aussi sur un destin capricieux : «Le sport-roi est une affaire de famille et de passion pour moi.
Assez tôt, j’ai grandi et évolué au rythme des derbys et des grands formats de la saison. L’ironie du sort a voulu que je fasses mes classes au sein des juniors de l’Espérance Sportive de Tunis avant de rejoindre le Club Africain et d’évoluer au poste d’avant-centre. Au CA, j’ai connu la gloire et j’ai intégré une grande famille.
J’ai ainsi été sacré meilleur buteur à maintes reprises, en 1984-1985, 1987-1988 et 1988-1989. Cette dernière saison restera mémorable pour moi car j’avais inscrit la bagatelle de quatorze buts. J’étais au sommet de mon art comme on dit, à mon apogée. Vous savez, le football est cruel tantôt. Il faut tout le temps relativiser, se remettre en question et ,surtout, se projeter sans s’enflammer. Mon cas est révélateur à ce sujet ,car je ne pouvais être devin, et savoir que ma carrière allait prendre fin, de façon prématurée à l’âge de 26 ans. Une fâcheuse fracture de la colonne vertébrale en a décidé ainsi. J’étais en pleine préparation d’avant-saison 1989-1990 quand ce drame s’est produit.
J’étais inconsolable ,car j’en voulais encore. Le football est une question de passion. J’étais encore loin d’être rassasié et blasé. Comme un gosse, j’étais encore féru jusqu’à la moelle.
Mais bon, si on considère le verre à moitié plein, j’ai tout de même relevé pas mal de défis, inscrit mon nom dans le Livre d’Or clubiste et fait partie de l’équipe nationale ».
« Un récital sous la pluie »
« Ce faisant, pour revenir aux grands formats de la saison, le match qui vous motive et vous transcende au plus haut point reste toujours le derby. J’en sais quelque chose pour avoir vibré lors de ces rencontres un peu spéciales ,où il faut toujours sortir le match de la saison, se surpasser et offrir avant tout un spectacle aux inconditionnels des deux clubs. Parler des derbys sans évoquer la fameuse date du 5-5-85 est, bien entendu, un non-sens.
C’est inscrit dans nos gènes maintenant. C’est une date anniversaire. Elle symbolise le rayonnement d’un CA qui a sûrement laissé filer le titre à l’EST, sans pour autant baisser les bras et affiche grise mine. Nous leur avons tout simplement gâché leur tour d’honneur annoncé, en les battant 5-1. Sous une pluie battante et une pelouse d’El Menzah trempée, j’ai signé les deux premiers buts.
Le premier à froid d’une tête rageuse que Chouchane n’a pu anticiper suite à un service de Lassaâd Abdelli. Et le second en prenant de vitesse Khaled Ben Yahia et en enchaînant avec une pichenette face à Chouchane déjà battu. Mounir Metoui, Abdelli et Mohamed Hédi Bayari ont, par la suite ,enfoncé le clou et ont fini par accélérer le Waterloo de l’EST.
Ce fût un récital sous la pluie. L’Espérance est toutefois un grand club. Elle a été désarçonnée, mais s’est vite relevée et remise en selle. Une semaine plus tard, elle s’est vite remobilisée pour reconquérir le grâal local.
Voilà pour le volet  ”memories” . Pour conclure, je voudrais aborder l’aspect tendance d’un football actuel qui tranche avec le football d’antan. La culture footballistique et l’enseignement de base ne sont plus les mêmes. L’application stricte des consignes, la prise de risques et d’initiatives, la liberté de manœuvre, l’anticipation, le don de soi, la solidarité sur le terrain, tant de côtés du sport-roi qui ont évolué, pas toujours dans le bon sens. A titre d’exemple, en ce qui me concerne, je savais pertinemment où Mhaïssi allait déposer le ballon. Je m’élevais en conséquence, tout comme les ” Jo ” Limam, Sellimi, Rouissi et autre Rakbaoui. Les avants racés de cet acabit n’existent quasiment plus ! »
K.K.

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