La division s’installe au sein d’Ennahdha :Et si Ghannouchi quittait le parti avant le congrès ?

Rached Ghannouchi a beau dissoudre le bureau exécutif du parti, comme le lui permet le règlement intérieur qui lui accorde également le droit d’en choisir les membres «dans l’objectif de remplacer les membres sortants, comme le précise Mohamed Goumani, président de la commission de gestion de la crise politique au sein d’Ennahdha, par d’autres visages qui ont saisi les messages du 25 juillet», les responsables écartés persévèrent dans leurs positions antérieures et appellent le président du parti à démissionner et bien avant le congrès dont la tenue, fin 2021, n’est plus garantie

Il semble que les nahdhaouis mécontents n’attendront pas le prochain congrès  du parti prévu pour la fin de l’année en cours pour déloger Rached Ghannouchi de la présidence du parti qu’il devrait quitter à la fin du congrès conformément aux dispositions du règlement intérieur du mouvement qui lui interdisent de briguer un troisième mandat consécutif.

Rached Ghannouchi aura consommé d’ici la tenue du congrès (s’il n’est pas ajourné une nouvelle fois ou même annulé au cas où le parti aurait implosé ou fermerait boutique bien avant fin 2021) deux mandats successifs en tant que président d’Ennahdha, le premier s’étalant de 2012 à 2016 et le second couvrant la période allant de 2016 à 2020, cette dernière année devrait être l’année du congrès attendu pour décembre 2021.

Et conformément à l’article 31 du règlement intérieur du parti, Rached Ghannouchi n’a pas le droit de postuler à un troisième mandat en tant que président du parti dans la mesure où l’article en question dispose que seuls deux mandats successifs (chacun de quatre ans) peuvent être assurés par le président élu lors du congrès. Et Rached Ghannouchi, faut-il le rappeler, a fini par se rendre à l’évidence à la suite d’une grande polémique qui a ébranlé le parti et annoncé qu’il respectera le règlement intérieur et qu’il ne se portera pas candidat à un troisième mandat comme le soutenaient ses lieutenants les plus farouches et les membres les plus rapprochés de sa garde qui voulaient imposer la révision de l’article 31 en question dans l’objectif de permettre à leur chef de se porter candidat pour une troisième période à la présidence du parti.

Il semble aussi que beaucoup d’événements, de décisions prises par Rached Ghannouchi lui-même depuis le déclenchement de la dynamique du 25 juillet 2021 concordent pour conférer une certaine crédibilité à l’analyse faite par plusieurs observateurs qui n’hésitent pas à soutenir que le président du parti nahdhaoui est en train de baliser lui-même la voie à sa sortie, qu’il fait tout son possible pour rendre crédibles, entendues et soutenus auprès de la base nahdhaouie les voix mécontentes parmi les responsables de Montplaisir qui s’élèvent quotidiennement lui demandant de quitter la présidence du parti de s’armer de courage, d’honnêteté et d’intégrité distinguant les grands hommes politiques pour reconnaître publiquement ses erreurs et avouer que ses errements, ses mauvais choix et aussi «ses déclarations inacceptables, voire déplacées» sont à l’origine de la crise où s’est enlisé aujourd’hui le parti.

Et aujourd’hui, ce ne sont plus uniquement les leaders qu’il a écartés des postes ministériels ou de la candidature au Parlement, bien que choisis par la base nahdhaouie dans leurs régions, qui prennent la parole au sein des structures du parti ou dans les médias pour stigmatiser les comportements irresponsables du «Cheikh» et le pousser à céder la présidence du parti et à s’excuser aussi pour tous les torts qu’il a causés à la maison nahdhaouie.

Aujourd’hui, la grogne atteint même les jeunes qui étaient jusqu’ici privés de parole et qui ne participaient pas au débat national qui embrassait le pays, bien avant la dynamique du 25 juillet dernier, et ils étaient contraints au silence, faut-il le souligner, sur ordre de la direction du parti.

Quand plus d’une cinquantaine parmi les «leaders de l’organisation estudiantine nahdhaouie» osent rédiger une pétition exigeant la démission de Rached Ghannouchi, quand Yamina Zoghlami, Jamila Ksiksi et Monia Brahim, les dames de fer de la cour de Rached Ghannouchi, quittent la dernière réunion du Conseil de la choura en signe de contestation des décisions que ce même conseil allait prendre en tant que réponse aux mesures exceptionnelles décidées le 25 juillet par le Président Kaïs Saïed et quand la commission de gestion de la crise par Ennahdha reste toujours inactive depuis sa création il y a près de deux semaines et que les Tunisiens et principalement les nahdhaouis ne disposent d’aucune information sur les membres qui la composent sauf le nom de Mohamed Ghoumani, comme étant son président (lui aussi membre du bureau exécutif qui vient d’être dissous dans son intégralité par le président du parti Rached Ghannouchi comme le lui permet — faut-il l’indiquer — le règlement intérieur du même parti) qui court les journaux pour expliquer pourquoi et comment le Président Kaïs Saïed a pris des mesures qu’il doit réviser dans les plus brefs délais et qui consomme toute son énergie pour faire remarquer à qui veut l’entendre que le président d’Ennahdha a licencié les membres du bureau exécutif qui n’ont pas saisi les messages du tremblement de terre intervenu le 25 juillet pour les remplacer par une autre équipe qui saura répondre aux exigences de la nouvelle étape (voir l’interview accordée par Goumani au journal Assabah daté du 25 août).

Et au moment où Goumani fait ce qu’il peut, Imed Hammami, Abdellatif Mekki et Mohamed Ben Salem poursuivent leur cabale contre le président du parti et l’accusent ouvertement d’être le premier, voire le responsable exclusif de la débâcle d’Ennahdha, d’assumer ses erreurs et de présenter sa démission et de ne plus attendre le déroulement du congrès (si congrès il y a) pour céder le témoin à une nouvelle direction.

Nous avons déjà démissionné

Et les contestataires déjà signataires de la pétition des 100 mécontents de réagir aux déclarations de Ghannouchi sur la dissolution du bureau exécutif.

Abdellatif El Mekki précise : «Nous avons déjà démissionné collectivement et non congédiés. Quant à la commission présidée par Goumani, elle ne dispose pas des compétences requises et du pouvoir décisionnel pour restaurer l’harmonie et la solidarité au sein du parti».

De son côté, Imed Hammami souligne : «Rached Ghannouchi s’est emparé du parti et n’a pas saisi les messages du 25 juillet». Il ajoute : «Ceux qui sont à la tête d’Ennahdha sont les responsables de la détérioration de la situation. Déjà, un tiers du bureau exécutif a démissionné».

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