«EL Harba» (La fuite) de Ghazi Zaghbani : L’improbable face-à-face

L’interprétation magistrale d’un trio d’acteurs : Ghazi Zaghbani, Nadia Boussetta et Mohamed Ali Grayâa, les protagonistes du huis clos haletant «El harba» (La fuite), ne cesse de drainer un public venu nombreux les applaudir chaque fin de semaine : Prochain rendez-vous le 22 juin 2019 à partir de 19h30 toujours à l’Artisto.

Mise en scène et jouée par Ghazi Zaghbani, son œuvre «La fuite» se joue toujours à guichets fermés dans ce théâtre de poche. La thématique de la pièce, à la fois audacieuse et subtilement traitée, la rend toujours aussi attrayante.
Le public se retrouve témoin d’un face-à-face improbable entre une prostituée et un fanatique religieux. Ce dernier tentait d’échapper à la vigilance des autorités et se retrouve coincé dans l’antre d’une fille de joie. Commence alors un dialogue tumultueux entre les deux personnages que tout oppose.

L’échange se déroule dans l’enceinte d’un espace fermé : la chambre d’une prostituée, au décor minimaliste reconstituée et parfaitement adaptée à l’espace, maîtrisé aussi minutieusement. Le spectateur fait brutalement la connaissance d’une travailleuse de sexe, «Narjess», vêtue légèrement et d’un extrémiste à la barbe et au quamis long. Ce dernier fait irruption chez elle, fuyant la police à ses trousses. «Narjess» l’aidera malgré l’idéologie extrémiste qu’il prône.

Éclate alors un dialogue salace, mais subtil pendant une heure. Les deux personnages, censés se repousser, fusionneront au fur et à mesure de cette rencontre.

L’objectif de l’œuvre est de mettre en relief les contradictions d’une Tunisie, tiraillée entre modernisme et conservatisme, et accentuées depuis l’éclatement de la révolution. Ce petit pays, qui demeure le plus ouvert du Maghreb et du Moyen-Orient, continue de subir les aléas d’un soulèvement populaire doublé par une crise identitaire. Rongé par le conservatisme, il continue tant bien que mal de résister. «El Harba» de Ghazi Zaghbani est un hymne à la tolérance et une invitation au dialogue et au vivre-ensemble malgré les différences.

L’œuvre, conçue à l’espace L’Artisto à Tunis, devait toujours se jouer dans un espace clos en cas de décentralisation car elle repose sur la proximité qui unit les personnages à leur public. Le texte de «La fuite» est une adaptation du roman en français de Hassan Mili «La P… savante» et sera adapté bientôt sur grand écran.

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