LIGUE 1— VIVEMENT LE PASS-SANITAIRE: Le football est un spectacle vivant

A quoi bon perdre son temps à regarder une rencontre qui se déroule dans une ambiance glacée où les joueurs semblent évoluer au milieu d’un décor de procession funéraire.


Considéré comme une place forte du football continental, la Tunisie a toujours pu compter sur l’un des championnats les plus relevés d’Afrique, selon le classement édité régulièrement par la CAF. Et même si notre Ligue 1 a quelque peu perdu de sa superbe, notamment avec la crise sanitaire, financière et la récession qui a touché plusieurs clubs, notre football n’est pas pour autant sur le déclin, et ne se limite pas seulement à faire de la résistance et de la figuration, comme il pourrait paraître tantôt. Aujourd’hui, plutôt que de juger notre football sur les performances de nos clubs à l’échelle continentale et l’évolution de notre sélection sur le continent, et à travers son parcours au Mondial, il serait plutôt profitable de tirer certains enseignements en rapport avec les différents dysfonctionnements qui ont grippé le bon fonctionnement de cette désormais industrie de marché, surtout dans un contexte post-covid où la relance et la reprise doivent être la priorité.

La morosité crée la régression, puis l’implosion

Aujourd’hui, à présent et dès maintenant même, il faut prendre des mesures audacieuses et non plus radicales pour raviver l’enthousiasme autour du football, à commencer par autoriser à nouveau le public à prendre d’assaut les travées du stade. Le football est un spectacle vivant et regarder un match sans public a autant d’attrait que de suivre les retransmissions d’une chaîne parlementaire. Et bien entendu, toute cette morosité ambiante déteint sur les passionnés, mais aussi sur les acteurs du jeu qui ne se transcendent plus, ne se dépassent plus ou si peu. Après coup, leur progression en prend un sacré coup d’arrêt, et au final, c’est tout notre football qui implose en raison d’une régression presque imposée pour ne pas dire organisée. Nous sommes aujourd’hui dans un cercle vicieux et miné qui annonce  des lendemains consternants. Pourquoi tant de pessimisme ? Parce que le week-end passé, marqué par le retour à la compétition (matches barrages et matches couperets), l’on a encore joué dans des stades qui sonnent creux. Pourquoi ? Parce qu’au lieu de se pencher sur la question durant la trêve estivale, l’on a privilégié les querelles intestines, les luttes de clans et les comptes à régler qui vont avec. Certes, les tentants du sport-roi avanceront leur joker pour se dédouaner, rappelant la menace du covid et le devoir de se plier aux recommandations de la haute autorité de santé. Mais si ce n’est pas faux en somme, ce n’est pas une raison pour  placardiser le dossier et attendre, croiser les doigts ou même s’en laver les mains ! En l’état, l’anticipation, cela vous parle ? Les actions coordonnées et tout ce qui favorise une sorte de synergie productive, vous connaissez ? Le jour où le pass  santaire sera graduellement imposé à toutes les couches de la société, établissements, institutions et autres différents organes de notre communauté, quelle sera la contribution de la FTF à cette évolution naturelle de la situation ? Il faut donc tester et expérimenter dès maintenant. Et il aurait fallu garnir les travées des stades le week-end passé (dans le cadre des matches barrages),  en prenant toutes les précautions qui s’imposent.

Décor de procession funéraire

Aujourd’hui, le football est plus qu’une distraction. C’est même plus qu’une passion «déraisonnable»,  tant elle est sans limite. Consommée à haute dose, elle  procure les plus belles émotions. Bref, c’est une passion qui ne s’émousse jamais car elle est inscrite dans l’ADN de millions de gens dont la plupart sont des fans qui vont au stade et portent leurs joueurs préférés. Ces mêmes joueurs qui ont perdu de leur superbe tant le stade sonne creux. La «Ola», les chorégraphies, les Tifos, les vibrations, c’est tout cela qui permet au compétiteur d’affirmer son caractère et d’accéder à une toute autre dimension. Regardez maintenant. Nos joueurs se limitent à exercer leur profession en abandonnant le métier, ce qui est supposé les rendre exceptionnels et éminemment prodigieux pour certains. Maintenant, non seulement, ils se limitent juste à se vendre au plus offrant comme de vulgaires mercenaires, mais de plus, rares sont ceux qui parviennent à garder sur le terrain l’élégance des artistes d’antan, quand l’argent, à l’inverse de la passion des fans, ne représentait pas la principale de leur préoccupation. Aujourd’hui, nous continuons donc à regarder le football par le biais de la petite lucarne, obstinément, semaine après semaine. Mois après mois. La ferveur retrouvée des supporters, un public déchaîne, c’est à la fois un rituel et une habitude dont nous avons été privés par l’apparition de la pandémie du covid-19. Soudain plus de Curva Nord bondée, plus de Supra Sud animée. Et les citoyens-supporters s’en sont accommodés, à leur corps défendant. Il est vrai cependant que leurs esprits sont accaparés par d’autres soucis : vais-je tomber dans les griffes de la pandémie dans l’année? Quel supermarché offre le plus de garanties au niveau sanitaire? Nous ne ressentirions donc plus de manque. Le football serait devenu tout à fait secondaire. On s’en accommode, car le football tel qu’il se dispute actuellement, c’est-à-dire à huis clos et sans âme qui vive dans les tribunes, n’a pas le moindre début de commencement d’intérêt. A quoi bon perdre son temps à regarder une rencontre qui se déroule dans un silence d’enterrement, parmi cette ambiance glacée où les joueurs semblent évoluer au milieu d’un décor de procession funéraire?  Assurément, ce n’est plus du football, c’est une représentation de mauvais goût. Tout y est faux, tronqué, dépassionné. Vivement donc l’introduction du pass sanitaire, une donne qui va forcément raffermir notre relation avec le ballon rond et notre rapport au supporterisme. Espérons donc que se dessinera bientôt un retour à la vie normale et que personne ne viendra doucher nombre de nos « illusions », même si en l’état, on ne le sait que trop bien, la pandémie est loin d’être terminée.

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