Que reste-t-il des JCC ?

Le rideau vient de tomber sur la 32e session des Journées cinématographiques de Carthage. Les artistes ont commencé à rentrer chez eux avec plein de Tanits. Les salles de cinéma plongeront de nouveau dans un sommeil léthargique. Le public retournera aux plateformes de films en ligne. Finis les discours sur le cinéma, les réalisateurs iront chercher des fonds pour financer leurs œuvres ailleurs, au Nord. Motus et bouche cousue.

On ne parlera de nouveau cinéma qu’à l’approche de la prochaine session. Les critiques se focaliseront sur les longs métrages des films occidentaux.

C’est pour dire que ce festival qui aspire à servir de lieu de rencontre entre les cinéastes pour élaborer les conditions de développement économique des cinémas, dans des marchés presque totalement colonisés par les fournisseurs de films étrangers, n’est qu’un simple miroir aux alouettes.  La moisson de films venus du monde entier, offerts au plaisir du plus grand nombre de cinéphiles, n’aura été in fine qu’une occasion de vivre et d’expérimenter les cinématographies arabe et africaine, sans plus.

Le caractère militant de ce festival prestigieux qui a accueilli des personnalités marquantes du cinéma aussi illustres que le Sénégalais Sembène Ousmane ou l’Egyptien Youssef Chahine, le Syrien Mohamed Malass, le Malien Souleymane Cissé, le Palestinien Michel Khleifi, l’Algérien Merzak Allouache et les Tunisiens Nouri Bouzid, Ferid Boughedir, Moufida Tlatli, a cédé la place à d’autres festivals beaucoup plus tournés vers les strass et les paillettes, le glamour et la mondanité. Les valeurs, les principes, les films d’auteur, ne sont plus au goût du temps.

Aux JCC mêmes, on essaye d’imiter  les grands rendez-vous cinématographiques sans pour autant pouvoir les égaler côté cérémonial. A part un tapis rouge sur lequel se pavanent quelques illustres inconnus, aucune vedette internationale du cinéma mondial ne marche dessus. Finis les temps où l’on croisait dans les restaurants du centre-ville Ezzat El Aleyli, Nour Chérif et autres grands noms du cinéma arabe ou africain. Les JCC sont prises depuis quelques décennies dans la bulle royale, alors que d’autres festivals plus jeunes, qui sont nés sur le même continent, jouent désormais dans la cour des grands. Les JCC périclitent, elles perdent leur éclat, et pourtant on continue de glorifier un événement qui meurt à petit feu.

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