La culture de l’inflation !

Editorial La Presse

Le coût de la vie est très élevé en ce moment en Tunisie. Tout devient cher, très cher au point que le pouvoir d’achat est altéré, voire écrasé par cette folle montée en flèche des prix de tous les biens de consommation. De quel pouvoir d’achat parle-t-on quand on doit décider non seulement de sacrifier des biens, mais aussi de ne plus trouver des produits et des services refuges qui permettraient de substituer la consommation d’un bien par un autre ? Ce principe même de produit de substitution n’a plus de valeur au vu de l’inflation démesurée des prix de tous les biens en un laps de temps très réduit. Cela revient au même d’acheter tel ou tel produit ; aujourd’hui on se trouve souvent confronté à une inflation simultanée où rien ne sert de chercher un produit de substitution pour exercer un effet de pression sur l’offreur. Le plus dangereux dans cette inflation, c’est qu’elle n’obéit pas, en premier lieu,  aux mécanismes classiques de la fluctuations de la demande et de l’offre, ou  aux fluctuations du taux de change (inflation importée), mais  surtout à deux variables qui font partie des aléas et des imperfections des modèles classiques et théoriques : d’abord les pratiques illégales de tarification où les commerçants se mettent d’accord ( ententes monopolistiques) pour augmenter les prix et les marges pour compenser soi-disant une augmentation des prix des matières premières. Ils n’en font qu’à leur tête avec des hausses de 100, 200 millimes unitaires, voire plus (ce qui est énorme pour de grandes quantités produites et vendues), sans qu’il y ait de contrôle et de suivi de leur tarification de la part des services concernés! Cette règle d’augmentation arbitraire et abusive (illégale à la base) se voit «parrainée» par une demande subjective, frileuse qui n’exerce aucune pression pour réajuster les prix (boycott, diminution des quantités demandées). On se lamente de cette flambée des prix qui ne cesse pas depuis aussi ce 25 Juillet, mais réellement, le consommateur tunisien reste énervant avec son comportement irrationnel, et sa tendance à vouloir tout acheter. Pas de culture du sacrifice, de la rationalisation pour dénoncer ces pratiques hors-la-loi de chaînes mafieuses qui accaparent les circuits de distribution de tous les biens  presque. Résultat, rien ne les arrête quand ils voient les citoyens demander encore et encore,  même avec des prix qui montent sans cesse. Apprenons des autres sociétés développées où les augmentations des prix obéissent aux règles du marché ouvert et concurrentiel où l’on y va par centièmes d’euro dans un cadre de transparence.

Quand l’Etat ferme les yeux sur ces lobbies qui manipulent les prix à leur guise, quand on ne fait rien pour maîtriser les coûts de production de certaines activités agroalimentaires (compensation des prix des fourrages par exemple ) et pour protéger les agriculteurs qui n’y trouvent plus leur compte, et quand on cède naïvement à la culture du consumérisme exagéré, on finit par embrasser et enraciner la culture de l’inflation. Finalement, on n’a pas qu’une inflation des prix, mais aussi d’idées, d’experts, de politiques et de textes !

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