Violences à l’encontre des femmes et des enfants – Exercices de simulation: Sensibiliser, lutter, réformer…

Cette idée innovante consiste à mettre en scène un jeu d’acteurs et actrices dans des scénarios de situations de femmes victimes de violences afin de dégager les principales recommandations et de conclure les bonnes pratiques de prise en charge des femmes victimes.


Dans le cadre du projet d’appui à la réforme du secteur de la sécurité, mis en œuvre en Tunisie depuis 2013, le ministère de l’Intérieur, avec l’appui du Pnud, a organisé les 13 et 14 décembre 2021 à Hammamet-Sud un atelier de simulation du processus de prise en charge des femmes et enfants victimes de violences auquel cinq ministères intervenant dans ce processus multisectoriel de prise en charge, tel que prévu par la loi organique 58-2017, relative à l’élimination de la violence à l’égard de la femme et de l’enfant, ont pris part, à savoir les ministères de l’Intérieur, de la Justice, des Affaires sociales, de la Santé et de la Femmes, de la Famille et des personnes âgées.

Une première en Tunisie…

Intervenant à l’ouverture des travaux de cet atelier, Miled Achour, conseiller technique principal par intérim, du projet d’appui à la réforme du secteur de la sécurité en Tunisie (Pnud Tunisie), a indiqué que cette action, qui est une idée innovante et une première au sein des agences onusiennes en Tunisie, permet de tracer le processus de prise en charge des femmes et enfants victimes de violences dès la déposition de la plainte au commissariat et auprès des unités spécialisées dans les enquêtes sur les crimes contre la femme et l’enfant, en passant par la prise en charge aux hôpitaux, l’accompagnement des institutions des ministères de la Femme et des Affaires sociales, et la comparution des victimes devant le juge aux affaires familiales… L’exercice de simulation consiste à mettre en scène un jeu d’acteurs et actrices dans des scénarios de situations de femmes victimes de violences. Préparés par des groupes de travail dédiés, ces scénarios reproduisent le circuit de prise en charge des femmes victimes de violences auprès de l’ensemble des intervenants publics et sociaux de première ligne, impliqués dans ce processus.

«Cet effort contribue largement à l’élimination de tous types de violences à l’encontre des femmes et des enfants… Les forces sécuritaires du ministère de l’Intérieur sont impliquées dans le processus de prévention et de lutte contre la violences à l’encontre des femmes et des enfants et l’élaboration des pistes et de plusieurs autres aspects de réhabilitions et d’équipements des unités spécialisées de la sûreté nationale et de la garde nationale au sein du ministère de l’Intérieur qui sont chargées par les enquêtes des crypto-violences envers les enfants. A côté de cet appui, il y a tout un volet de coordination entre les différentes structures qui entrent dans le processus de prise en charge des femmes et enfants victimes de violences. Et c’est l’un des objectifs de cet atelier qui vise à optimiser ce processus et donc à optimiser les conditions de prise en charge à travers la simulation de tout le processus et la visualisation des bonnes pratiques et des choses à améliorer dans la prise en charge par les différentes structures concernées», a-t-il expliqué.

130 unités de prise en charge

Pour sa part, Nessrine Rebaï, expert Genre du projet RSS, Pnud, a indiqué, dans une déclaration accordée à La Presse, «qu’on travaille au niveau du Pnud avec le projet de réforme du secteur de la sécurité depuis 2014, mais on a commencé à travailler activement sur la question relative à la prise en charge des femmes et enfants victimes de violences à partir de 2018 à la suite de l’adoption de la loi N°58.  A nos jours, on travaille avec l’appui du ministère de l’Intérieur qui s’est doté de 130 unités de prise en charge des femmes et enfants victimes de violences sur tout le territoire, au niveau de la garde nationale et de la police nationale. Ces unités sont spécialisées dans la prise en charge pénale dès le dépôt de la plainte au niveau des unités spécialisées…On a aussi entamé un cycle de formation, en collaboration avec le ministère de l’Intérieur, au profit du personnel travaillant dans ces unités car au niveau du projet, on a plusieurs axes sur lesquels on travaille, à l’instar de la formation, la sensibilisation… On a constaté que les exercices de simulation sont très importants ; c’est un exercice didactique qui est excellent puisqu’on va filmer ce processus, puis on va l’utiliser dans les prochaines formations».

Par ailleurs, les experts du Pnud au niveau du ministère de l’Intérieur vont avoir des fiches d’évaluation pour pouvoir évaluer les bonnes et les mauvaises pratiques et y remédier. Cet exercice de simulation a été décidé suite à une série d’échanges entre le groupe du travail qui s’occupe de la violence faite envers les femmes et les enfants au niveau du ministère de l’Intérieur et ce groupe qui comprend la garde nationale, la police nationale, des représentants de la direction générale des droits humains, la protection civile et les experts du Pnud. Et en consensus avec toutes les demandes, on a trouvé que c’était un exercice idéal pour pouvoir mener à bien le travail et améliorer tout le processus.

Avant et après le covid-19

Mme Rebaï a ajouté que la pandémie liée au covid-19 était un moment clé pour faire une autre réflexion par rapport à l’augmentation du nombre des femmes victimes de violence, et ce, à partir des statistiques fournies par le ministère de la Femme sur la ligne 1899 qui a travaillé pendant le confinement 24/24 et 7/7. On a donc constaté que le nombre d’appels pendant le confinement a été multiplié par 5 durant les deux premières semaines du mois de mars 2020, puis par 7 et par 9 par rapport à la même période de l’année précédente, ce qui a montré qu’au cours du confinement, la violence a augmenté à un rythme alarmant.

«Cela nous a montré une autre face ; l’augmentation de la cyber-violence sur internet. Du coup, dans ce même groupe de travail, on a décidé de travailler sur ce volet. Le ministère de l’Intérieur, et dans le cadre de la campagne internationale des «16 jours d’activisme», a travaillé et publié une maquette avec des aspects préventifs relatifs à la prise en charge des femmes et enfants victimes de cyber-violences. Il y aussi un guide qui a été élaboré au profit des officiers qui travaillent au sein de ces unités. Et à la lumière de ce guide, il y a tout un cycle de formation qui sera élaboré sur la cyber-violence au profit des unités et il est prévu pour l’année prochaine.

Mais il est important de souligner que la cyber-violence n’est pas encore répertoriée dans la loi, puisqu’elle n’existe pas dans les textes de la loi 58-2017. Mais malgré ce vide juridique, toute personne peut porter plainte, elle sera prise en charge et il y aura tout un plaidoyer car l’ensemble des ministères sont conscients de cette nouvelle ‘’tendance’’ et il va y avoir une ratification ou un rajout par rapport à la loi N°58. Donc, il y a un avant et un après covid-19. Cette pandémie représente un tournant dans les comportements des gens, pas seulement en Tunisie, mais partout dans le monde», a-t-elle encore souligné.

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