Dans ce milieu, autrefois considéré comme un sanctuaire protégé, les professionnels de la santé ne sont plus à l’abri du danger. Et certains continuent à être dans le collimateur des patients.
Dans la rue, à l’école ou en milieu hospitalier, la violence n’est plus un fait divers. Elle est devenue un phénomène de société allant crescendo et banalisé. Car l’impunité l’a rendu encore plus grave, dont les auteurs courent toujours. L’agression d’un enseignant du secondaire, poignardé par son élève, en pleine classe, au lycée Ibn Rachiq à Ezzahra à Ben Arous, fut, il y a quelques semaines, l’affaire qui avait le plus choqué l’opinion et suscité un éphémère débat public sur la moralisation de l’espace scolaire et la réforme de l’école. Mais elle est restée sans suite…
La femme est-elle toujours victime ?
Mais cette violence, dont on fait toujours face dans nos écoles ou à bord des différents moyens de transport, est souvent passée inaperçue. Elle l’est aussi dans nos hôpitaux, avec la même nonchalance qui fait grincer des dents. En sont aussi victimes des infirmiers et des médecins agissant en armée blanche et qui ont dû livrer bataille contre une épidémie si ravageuse qu’elle a épuisé toute son énergie.
Sans pour autant perdre de vue l’atmosphère assez tendue dans laquelle travaillent cadres médicaux et paramédicaux. Dans ce milieu, autrefois considéré comme sanctuaire protégé, les professionnels de la santé ne sont plus à l’abri du danger. Et certains sont censés être dans le collimateur des patients. Contrairement au secteur privé, l’hôpital public demeure un espace violé, sans sécurité.
Pas plus tard qu’une semaine, la violence hospitalière refait encore surface. Le cas de Mme Faouzia Ben Khalifa, médecin de santé publique à l’hôpital local de Djerba Midoun, en est un exemple vivant. L’incident fait froid dans le dos et doit interpeller les autorités à l’échelle de la région. En plein devoir professionnel, Dr Ben Khalifa a reçu un coup violent. Un citoyen tunisien l’agressa verbalement, dès qu’elle lui avait demandé de quitter l’hôpital après avoir été vacciné, et ce, pour des raisons purement préventives. Protocole sanitaire oblige. Bien que convaincant, l’argumentaire ne fut guère dissuasif. Le coupable semble avoir perdu raison, alors que la victime avait vainement tenté de le convaincre. A ce moment-là, son amie de nationalité étrangère lui a brutalement infligé une gifle sur la joue gauche. Sous le choc, l’agressée n’a pas pu réagir. Sauf que ses collègues, ainsi que des patients présents intervinrent, lui épargnant certainement d’autres coups. « Aussitôt informée, la police les avait tous conduits à la brigade de lutte contre la violence faite à la femme, à la poste de Houmt Souk, alors que j’avais eu l’intention de porter plainte auprès de la poste de sécurité de Midoun, en ma qualité de fonctionnaire violenté au cours de l’exercice de ses fonctions », nous raconte-t-elle, traumatisée.
La vérité, si je mens !
Au poste de police, la plaignante avait tout révélé. La véracité des faits fut ainsi appuyée par des témoins oculaires qui avaient plaidé en sa faveur. Toutefois, ces témoignages n’ont pas été pris pour preuve par la police d’investigations préliminaires. « Mais, caméra de surveillance à l’appui, la vérité fut clairement dévoilée.
Et la police a fini par l’approuver », souligne-t-elle. Autres arguments d’appoint, des analyses et plusieurs examens médicaux ont prouvé que la victime avait subi, outre une atteinte psychologique, une perforation tympanique touchant son oreille gauche, nécessitant un repos de 21 jours. En effet, son état de santé méritera encore un suivi médical.
Mais que dire lorsqu’une telle victime d’agression physique et verbale prouvée serait alors convoquée, le 16 du mois prochain, par le tribunal de première instance de Médenine, en tant qu’accusée !? La manière avec laquelle on traite pareilles affaires nous laisse, parfois, pantois. Peu importe le crime et le criminel, la justice doit agir dans le cadre du droit. Et elle doit y trancher justement, en faisant régner la loi. Loin de la politique de deux poids deux mesures. Personne n’est au-dessus de la loi, dit-on. L’impunité ne fait que nourrir la violence et en multiplier les victimes. A l’école, à l’hôpital ou ailleurs dans l’espace public, l’Etat devrait revoir sa stratégie de sécurité.