Dialogue national : Les contours commencent à prendre forme

Conscient de la délicatesse de la situation, Kaïs Saïed semble plus que jamais ouvert au dialogue. Mais, jusqu’à présent, de nombreuses questions restent sans réponse. Qui va organiser ce dialogue ? Avec qui ? Dans quel objectif ? Et comment inclure les résultats de la consultation nationale ?

Les contours de la prochaine phase politique en Tunisie commencent à prendre forme. Si pour certains, la situation politique ne cesse de se dégrader, une lueur d’espoir commence à se manifester dans l’horizon de la scène politique.

Les prémices d’un dialogue national prennent forme, c’est ce que laissent savoir les dernières activités et déclarations du Président de la République qui ne cesse de répéter que ce dialogue, une fois officialisé, sera fait autour des résultats de la consultation nationale. Mais jusqu’à présent de nombreuses questions restent sans réponse. Qui va organiser ce dialogue ? Avec qui ? Dans quel objectif ? Et comment faire impliquer les résultats de la consultation nationale ?

Au fait, le calendrier électoral annoncé en décembre dernier par le Chef de l’Etat n’évoque pas la question du dialogue national, mais les récentes déclarations du Président de la République vont dans le sens d’un dialogue, nouveau sur le fond comme sur la forme. Autant dire qu’actuellement, le Président de la République se concentre sur sa guerre contre la spéculation, mais aussi sur l’interprétation des ressorts de la consultation nationale. N’empêche que lundi dernier, il a multiplié les entrevues avec des composantes de la société civile, principalement le dialogue national était au menu.

Reçu par le Président de la République Kaïs Saïed, lundi, au Palais de Carthage, le président de la Ligue tunisienne de défense des droits de l’homme (Ltdh), Jamel M’Sallem, a affirmé avoir évoqué avec le Chef de l’Etat les préparatifs en prévision du dialogue national. La rencontre s’inscrit dans le cadre des préparatifs du dialogue national qui associera des forces civiles et des partis «qui ne sont pas responsables de la crise actuelle que vit le pays», a déclaré le président de la Ltdh à l’issue de l’entrevue. « Le dialogue national en vue a pour objectif d’élaborer une vision pour l’avenir de la Tunisie, notamment la nature du système politique et l’impératif d’appliquer la Constitution », a révélé le président de la Ligue. Idem pour la présidente de l’Union nationale de la femme tunisienne (Unft), Radhia Jeribi, qui a été également reçue au Palais présidentiel au sujet du dialogue national mais aussi des droits et acquis de la femme tunisienne. A cet effet, le Président de la République, Kaïs Saïed, a souligné son engagement à assurer une participation et une représentativité de la femme lors des prochaines échéances nationales. Il a affirmé, lors de sa réunion avec Radhia Jerbi, l’importance de garantir une représentativité de la femme dans le dialogue qui répond aux attentes du peuple tunisien, rappelant l’importance de préserver les acquis de la femme et de les consolider.

Qui sont les parties concernées ?

Si pour le principe, le Président de la République est ouvert à l’organisation d’un dialogue national, on ne connaît pas, jusqu’à présent, les parties et partis concernés. D’ailleurs, le Chef de l’Etat a annoncé que ce dialogue ne concerne pas ceux qui ont « opéré un coup d’Etat », ni ceux qui ont « volé les Tunisiens et nui à leurs intérêts ». Les partis politiques ayant participé au pouvoir durant cette dernière décennie seront-ils, donc, exclus de cette initiative ? Pour la Centrale syndicale, il n’existe aucun sens dans la tenue d’un tel rendez-vous sans la participation des partis politiques. C’est le secrétaire-général adjoint de l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt), Sami Tahri, qui a exprimé cette position laissant croire que la dernière réunion avec le Président la « République portait sur la situation générale du pays et n’a pas pris la forme d’un dialogue ».  

Il faut rappeler que l’Ugtt s’est toujours opposée à la consultation nationale électronique qui ne peut, selon elle, remplacer en aucun cas la tenue d’un dialogue national. On estime également que ce dialogue doit impliquer, impérativement, toutes les composantes et les forces nationales, dont notamment les partis politiques. Un principe auquel s’oppose le président de la République qui estime que ces partis sont à l’origine de l’actuelle crise et de la détérioration de la situation en Tunisie et ne peuvent pas, par conséquent, prendre part à cette initiative.

Apportant quelques éléments de réponse à cette question, le bâtonnier des avocats, Brahim Bouderbala, qui a rencontré la semaine dernière le Président de la République, Kaïs Saïed, affirme dans ce sens que Kaïs Saïed ne fera que superviser la tenue du dialogue national. Interpellé sur l’exclusion de certaines parties de ce dialogue par le chef de l’Etat, le bâtonnier des avocats a laissé entendre que face à «cette nouvelle réalité que vit la Tunisie», on ne pourrait se permettre de dialoguer avec ceux qui rejettent totalement « toutes les réalisations de l’après 25-Juillet ». « Le 25-Juillet a sauvé le pays et même ceux dont le Parlement a été dissous. Les parties qui ont une vision positive et prônent la construction auront une place dans ce dialogue, mais pas celles qui appellent à une ingérence étrangère », a-t-il souligné.

L’Isie organisera les élections

Dans ce contexte de préparatifs au dialogue national et des grandes échéances électorales, le Chef de l’Etat a également appelé l’Instance électorale à se tenir prête à l’approche des prochaines élections.  En effet, le Président de la République Kaïs Saïed a appelé l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) à « se préparer au mieux pour les prochaines échéances nationales ».

Le Président Saïed, qui a reçu, lundi dernier, au Palais de Carthage, le vice-président de l’Isie, Farouk Bouasker, a insisté sur le rôle majeur de l’Instance pour les élections. Pour rappel, un référendum aura lieu le 25 juillet. Il sera suivi par l’organisation d’élections législatives le 17 décembre de la même année, selon le calendrier annoncé par le président de la République. Reste à savoir comment le Président de la République compte-t-il insérer l’étape de dialogue national dans ce prochain processus électoral.

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