De nombreux spécialistes réfléchissent à développer la politique RSE pour rénover le fonctionnement de leur entreprise. En effet, la RSE favorise la création de nouveaux métiers, modèles d’entreprise (comme les sociétés à mission en France), produits et services, de nouvelles façons de consommer… Ces nouvelles opportunités permettent de produire une valeur mieux partagée et plus durable… Karim Keita, créateur de la société Masoda, spécialisée en management qualité, digitalisation et RSE qui travaille pour les marchés suisse, français et d’Afrique francophone, sur des problématiques diverses, liées au développement durable, à la facilitation du commerce international, la gouvernance territoriale… nous fait profiter de ses connaissances. Interview.

Comment peut-on définir la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) ?

La RSE — responsabilité sociétale et environnementale des entreprises — est un phénomène de transformation des entreprises, comme la digitalisation, qui consiste à intégrer les impacts économiques, sociaux et environnementaux des activités des organisations sur leurs parties prenantes (actionnaires, salariés, fournisseurs, société civile, administration, environnement…) dans le système de management des organisations.

Pour ma part, je suis spécialisé dans la RSE intégrée, qui consiste en l’intégration des enjeux de la RSE (diversité, écologie, bonne gouvernance, développement durable) dans les processus opérationnels des organisations.

Quelles sont les exigences de la RSE pour les managers d’entreprises ?

Pour un manager d’entreprise, la RSE vient certainement compliquer la donne, parce qu’elle exige la prise en compte d’une multitude de nouvelles variables (impact environnemental, attentes des parties prenantes, éthique comportementale, transparence des décisions…) dans sa démarche de management. Elle va également les imposer à associer de plus en plus leurs équipes et partenaires dans leurs prises de décision.

L’année 2022 sera-t-elle l’année du redémarrage de vos activités ?

Les entreprises ont été contraintes à dématérialiser leurs processus durant les deux dernières années de la pandémie de la Covid  (2020-2021), pour plusieurs raisons : continuer à interagir avec leurs clients et fournisseurs, préserver la santé de leurs employés (télétravail), assurer la continuité de leurs activités opérationnelles (automatisation)… Comme souvent dans l’histoire de nos économies, il faut des crises pour forcer les transformations…La digitalisation à travers  une interface client permet aux  entreprises d’acheminer leurs commerces ou fournir des prestations sans que les clients aient besoin de se déplacer. De plus, il a fallu digitaliser les processus internes, pour permettre aux employés de travailler à domicile.  Maintenant, on cherche à capitaliser sur cette expérience de digitalisation forcée pour explorer d’autres domaines, plus prospectifs, comme le machine learning, l’IoT, l’IA…

Comment digitaliser les processus ?

Digitaliser les processus permet de les rendre plus efficients et plus résilients parce qu’on réduit ainsi la probabilité de l’erreur humaine, à l’origine de la plupart des problèmes de non-conformité, de gaspillage, de dysfonctionnement.

La digitalisation permet aussi une meilleure transparence des opérations, puisque les tâches deviennent traçables. La sécurité aussi est concernée : en digitalisant, on génère de la data, qui peut être monitorée via des indicateurs de risque ou de performance. En modélisant dans un premier temps les processus, c’est-à-dire en décrivant dans le détail les activités qui les composent, en identifiant les ressources utilisées, en définissant les besoins (inputs) et les exigences (outputs) de chaque processus. On peut ainsi au préalable optimiser le processus, selon une démarche qualité, avant de faire le choix de le digitaliser.

La transformation digitale elle-même est un macro-processus. Elle doit donc être modélisée, planifiée, programmée. Elle doit également impliquer l’ensemble des collaborateurs, pas seulement les plus technophiles. C’est là qu’interviennent la formation, le coaching, l’accompagnement au changement. Le choix des outils est presque secondaire. Bien sûr, puissance de calcul, vitesse de traitement de l’information, inter-opérabilité des systèmes sont des facteurs importants de la réussite du projet de digitalisation. Mais c’est plutôt l’affaire des services informatiques. Chez Masoda, nos interlocuteurs sont plutôt les métiers, car ce sont eux qui doivent être prioritairement transformés.

Quelles sont vos attentes pour les années à venir, et quels sont vos plans pour le digital en Tunisie ?

Dans les années à venir, je pense que les enjeux majeurs concernent surtout la production et la gestion de données. Je ne suis pas certain que les organisations iront rechercher une digitalisation totale de leurs processus. Au contraire, du fait de la relocalisation industrielle, du retour aux circuits courts, les relations humaines pourraient bien se retrouver revalorisées. Mais la data restera incontournable parce que nos sociétés auront un besoin croissant de contrôle afin de mieux anticiper les crises sanitaires, sociales, environnementales…

Concernant la Tunisie, notre idée est de coupler le digital avec la RSE, une autre tendance forte du marché. C’est toute l’ambition de notre programme Doing Good in Africa, qui consiste à mettre en place un baromètre RSE national et un label panafricain, sur la base d’une plateforme digitale. Une démarche 2 en 1, qui permettra aux entreprises d’aborder en parallèle et en synergie les enjeux digitaux et de développement durable.

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