Tribune | Une approche originale du sociétal tunisien

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Par Khadraoui Abderrazak*

Le livre «Pour l’humain» écrit par le Docteur d’Etat en sciences de gestion de l’Université de Tours et ancien directeur de l’Institut supérieur de gestion de Tunis, Ahmed Ben Hamouda, est un essai sur la gouvernance du sociétal et une analyse subtile et avertie des différents aspects de la vie sociale, politique et économique de la Tunisie d’hier et celle d’aujourd’hui. C’est une incursion et un appel à l’humain à travers une lecture passionnée et passionnante qui ajoute au parcours personnel de l’auteur, sa profonde maîtrise des secrets du management de l’entreprise et une connaissance très précise du Savoir et du Savoir -faire des hommes qui la dirigent dans notre pays. Ecrit à la première personne, cet essai se veut être à effet miroir. Il dépeint, à partir du vécu personnel d’un anonyme, un itinéraire d’un pays qui aspire à la vie et qui, par inclination de ses nouveaux politiques à des croyances éculées; s’est laissé aller à ses démons de division.

C’est à ce travail de restauration archéologique à travers une approche originale de la dimension sociétale ; concept longuement analysé comme opérateur explicatif et compréhensif des subtilités identitaires, comportementales et anthropologiques, longuement passé sous silence ou ignoré des chercheurs, que l’auteur s’est attelé, mettant à contribution une vaste connaissance du terrain et une maîtrise confirmée de la gestion des ressources humaines et de l’entreprise; une expertise qui s’étend à la saisie de la personnalité de base du Tunisien, à travers toutes les stratifications culturelles et «civilisationnelles» qui étaient à la source de sa mise en forme et de sa construction.

Le sociétal est pour l’auteur «ce “communiel“ qui différencie des peuples, qui oblige à les envisager de façon singulière et qui impose des comparaisons à quiconque fait l’expérience de la rencontre». Ce ressenti fusionnel et intime que quiconque peut vivre, dès lors qu’il se trouve exposé à un relationnel ou à une interaction, est pour l’auteur une réalité saisissable à travers la culture du pays. Outre que ce sociétal est reconnaissable à certains traits et référents, il a la vertu d’expliquer et de prescrire.  Il constitue, à bien d’égards, un matériau utile pour la gouvernance économique et sociale, pour le management humain des organisations et pour le développement d’une communion citoyenne affranchie des dérives et des excès et ouverte sur l’univers monde et l’interculturalité…

Il s’agit, donc, pour lui d’une véritable reprise en considération et d’une revalorisation de l’humain à un moment de l’histoire où l’humanité croule sous le poids de la révolution du numérique et s’abandonne à l’immatérialité d’un lien social de plus en plus réduit à une simple virtualité qui laisse s’évanouir ,tel un visage de sable devant les vagues, ce qu’il y a de plus précieux en l’homme: son humanité. Tout cela servi dans un élan de confidence sincère et un style envoûtant de fin portraitiste qui n’est pas loin de rappeler que l’auteur était un fervent admirateur des «Caractères» de La Bruyère, ce qui ajoute à la saveur du texte, le plaisir et la satisfaction, pour le lecteur, de découvrir dans ce livre, derrière le spécialiste de la gestion, le talent d’un écrivain et, au-delà de l’image de l’essayiste chevronné, un authentique homme de cœur et de vision.

Ergonome et communicateur*
Conservatoire national des arts et métiers de Paris

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