La démarche RSE : Réconcilier l’entreprise avec son environnement

Si la RSE connaît, depuis plusieurs années, un véritable essor dans le monde, peu nombreuses sont les entreprises tunisiennes qui s’intéressent à ce concept, pourtant crucial pour leur pérennité. L’expert comptable peut jouer, dans ce cadre, le rôle de conseiller et d’accompagnateur auprès des entreprises qui souhaiteraient mettre en place des politiques RSE, incitant ainsi les plus réticentes à adhérer en faveur de cette démarche.

Pour braquer les projecteurs sur l’état des lieux de la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises en Tunisie, ainsi que sur le rôle que peut jouer l’expert comptable dans la promotion de cette culture au sein des entreprises, le Conseil régional de Tunis et Ben Arous de l’Oect vient d’organiser une rencontre débat autour du thème : «La Responsabilité Sociétale des Entreprises : Axe de développement économique et social et rôle de l’expert-comptable». Le débat a été ponctué d’interventions thématiques de spécialistes et d’experts comptables mais aussi de témoignages d’entreprises en matière de RSE.

Seules 60 entreprises tunisiennes ont adhéré au Pacte Mondial des Nations unies

Revenant sur les dates clé qui ont marqué l’émergence de la RSE en Tunisie, Sami Marrouki, président du réseau «Pacte Mondial» Tunisie, a expliqué que la RSE est la déclinaison du développement durable au sein de l’entreprise. Il s’agit, selon l’intervenant, d’une véritable démarche structurée qui doit émaner de la prise de conscience des entreprises de leur rôle social et environnemental. Expliquant que l’ancrage de la RSE a été renforcé avec la naissance du Pacte Mondial des Nations unies qui a été lancé en 2000, Marrouki a souligné que ce Pacte incarnait la volonté de pousser l’entreprise à jouer un rôle actif dans la préservation de l’environnement et la lutte contre les inégalités sociales qui ne cessent de se creuser avec l’accélération de la mondialisation.

Selon l’intervenant, la RSE est venue pour développer un concept qui permet à l’entreprise de jouer, au-delà de son rôle économique, un rôle sociétal tout en ayant un impact positif sur l’environnement.

Il a, en somme, fait savoir que, malgré les engagements tenus par la Tunisie, le développement des politiques RSE demeure timide. «La RSE est en train de progresser en Tunisie, toutefois lentement», a-t-il indiqué dans une déclaration aux médias.

Pour cause principale, une loi cadre restée lettre morte et des textes d’application qui n’ont pas toujours vu le jour. En effet, Marrouki a souligné que la loi relative à la RSE qui a été adoptée en 2018 et qui vise à instaurer la réconciliation entre l’entreprise et son environnement n’est pas entrée en vigueur en l’absence de décrets d’application.

Parmi ses principaux apports, il a cité la mise en place de commissions régionales RSE, la création d’un observatoire RSE et l’instauration du prix de la meilleure entreprise tunisienne en matière de RSE. Les commissions régionales travaillent à adapter les activités RSE de l’entreprise aux priorités des régions en matière de développement. Leurs compositions, mission, financement et prérogatives doivent être définis par décret. Quant à l’observatoire, il est chargé de consigner les réalisations en matière de RSE au niveau national, avec la possibilité d’effectuer un équilibrage entre les régions.

Le secteur bancaire connaît une forte dynamique en matière de RSE

Par ailleurs, et toujours en rapport avec les engagements de la Tunisie en matière de RSE qui converge aussi avec développement durable, Marrouki a rappelé qu’en vertu de l’accord de Paris sur le climat, la Tunisie est appelée à présenter une CND révisable tous les cinq ans avec des objectifs croissants. Tout en insistant sur le fait que la RSE est un engagement volontaire, le président du réseau Pacte Mondial Tunisie a mentionné le guide de reporting ESG qui a été développé par la Bourse de Tunis (afin d’évaluer le risque auquel les entreprises sont exposées sur les plans sociétal, environnemental et gouvernance) ainsi que le guide d’émission d’obligations vertes, socialement responsables et durables lancé par le Conseil du Marché Financier (dont le but est de créer un cadre pour les levées de fonds destinées aux projets verts).

Il a évoqué, dans ce même contexte, la circulaire de la BCT 2021-05 qui vise à ancrer, au sein du secteur bancaire, une nouvelle culture de finance responsable basée sur la culture de risque, de conformité et de RSE. Selon lui, cette circulaire, à travers notamment l’article 15 qui stipule que l’organe d’administration œuvre à intégrer les principes de la responsabilité sociétale et environnementale dans la stratégie de l’établissement, a permis de créer une dynamique forte au sein des banques qui ont, depuis, engagé des démarches RSE déclinées en des systèmes de gestion sociale et environnementale pour l’évaluation des opérations de la banque. «Il n’est pas permis aujourd’hui, qu’une banque finance n’importe quel projet sans étudier les risques sociaux et environnementaux. A l’image du risque financier, les banques sont aujourd’hui obligées en vertu de la circulaire mais aussi, vu leurs relations avec les bailleurs internationaux qui n’acceptent plus de mettre en place des financements sans établir l’évaluation des risques environnementaux et sociaux, d’intégrer des démarches RSE», fait-il savoir. Et d’ajouter : «la RSE s’inscrit progressivement dans la stratégie globale des entreprises parce qu’on n’a plus vraiment le choix d’isoler l’entreprise de son monde et de son environnement naturel et physique. C’est une manière de réconcilier l’entreprise avec son environnement. C’est aussi une manière de la positionner sur la sphère de la durabilité et de l’afficher dans un monde qui évolue et qui devient de plus en plus mâture et de plus en plus convaincu du rôle environnemental et social de l’entreprise au-delà de son rôle économique».

Marrouki a, par ailleurs, affirmé, qu’aujourd’hui, 60 entreprises tunisiennes ont adhéré au Pacte Mondial des Nations unies et que l’objectif du réseau est d’atteindre les 100 entreprises.

Dans une déclaration aux médias, Haythem Amor, président du conseil régional de Tunis et Ben Arous de l’Oect, a souligné qu’en matière de RSE l’expert comptable joue deux rôles principaux. Le premier consiste à préparer mais aussi réaliser l’audit des informations extra-financières (relatives aux aspects environnemental, social et gouvernance), qui seront intégrées par la suite dans les rapports annuels des entreprises. De surcroît, l’expert comptable peut jouer le rôle de conseiller et d’accompagnateur auprès des entreprises qui souhaitent mettre en place des politiques RSE, incitant ainsi les plus réticentes à adhérer en faveur de cette démarche.

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