Commentaire: Qui arrêtera Yaâcoubi ?

On pourrait penser, si besoin est, à des séances de thérapie collectives pour tenter de comprendre les manœuvres auxquelles s’adonnent les syndicats de l’enseignement, mais peut-on vraiment se promettre de ne plus connaître pareilles désillusions ? Peut-on travailler dans la sérénité et la confiance ? Qui arrêtera Yaâcoubi ?

On s’interroge de plus en plus sur l’optimisation du système éducatif et du niveau d’instruction. On s’interroge encore et toujours sur tout ce qui est de nature à apporter une crédibilité à l’enseignement tunisien pour être reconnu en tant que tel et, pourquoi pas, retrouver les vertus d’un temps que l’on considère aujourd’hui révolu.

Il s’agirait, à ne point douter, d’une hypothèse qui devient bien plus pressante, bien plus urgente, notamment au vu des débordements et des excès qui prouvent, encore une fois, que la politique éducationnelle, dans laquelle sont impliqués aussi bien l’autorité de tutelle que les syndicats, évolue à l’écart du système et qu’elle n’est pas vraiment encline à instaurer les révisions et les réformes plus que jamais impératives.

Les difficultés auxquelles l’enseignement et derrière lui tout le système éducatif font face prouvent que les priorités des syndicats sont visiblement outre que ce qu’imaginent, et surtout espèrent, les parents. La qualité du niveau requis des élèves s’en ressent fortement, leur avenir encore davantage.

Le constat prend encore une plus grande dimension, notamment à l’évocation des modèles d’autres nations, notamment celles qui émergent et qui ont réussi à évoluer et à nous dépasser. Leurs méthodes reposent tout particulièrement sur un niveau d’exigence au quotidien très élevé. Rigueur et discipline sont les maîtres-mots. Pour eux, l’objectif est clair : développer une compétence hors norme, un mental et une culture de performance.

Chez nous, la réalité est autre. Elle est sombre et triste. Le secrétaire général du syndicat de l’enseignement secondaire, Lassaâd Yaâkoubi, menace de bloquer les notes du premier trimestre. Il assure que les délais accordés au ministère de l’Education concernant les revendications financières du secteur sont dépassés, que les réponses de l’autorité de tutelle et du gouvernement ne témoignent point du sérieux des négociations. Par conséquent, le syndicat s’oriente vers la tenue d’une réunion du Comité administratif pour confirmer la décision de la retenue des notes du premier trimestre. Plus encore : il s’attend à ce que les décisions en question aillent plus loin que la retenue des notes pour adopter carrément le boycott des examens.

Il faut dire que cette nouvelle escalade et cette nouvelle aggravation de la situation sont tout sauf une surprise. Cela pendait au nez depuis quelque temps! Il n’est pas difficile en effet de deviner pourquoi le syndicat a pris cette décision, ni comment il l’a sortie, puisqu’il est en grande partie à l’origine de la dégradation de l’enseignement en Tunisie.

Non, Yaâcoubi n’est pas encore guéri. Il demeure clairement ce qu’il est et ce ne sont pas les quelques moments d’accalmie et de répit qui vont changer ses convictions et arrêter ses manœuvres.

Non, ce ne sont pas, non plus, les quelques moments de détente qui vont rassurer les Tunisiens quant à l’avenir de leurs enfants. Les petites éclaircies n’ont pas visiblement donné plus d’impulsion positive à un secteur décidément balbutiant, touché pas les arrêts successifs des cours, mais aussi par la corruption…

Les petites interventions opérées ont, certes, permis au ministère d’inventer certains moyens de réponse à la situation, de trouver quelques solutions et même de trancher quelquefois sur certains sujets. Mais à aucun moment, ce dernier n’a réellement donné l’impression de prendre le contrôle de la situation.

Donc encore un revers attendu, mais qui vient sanctionner un turnover collectif. On avait tous l’espoir et l’envie que cela change, que le ministère mais aussi le gouvernement puissent mettre les réformes nécessaires en place, mais il y a toujours une fracture, souvent amère, entre ce qui est souhaité et la réalité.

On est loin, très loin, du chemin d’un redressement et d’une réhabilitation complète. Ceux qui en sont responsables peuvent encore essayer de se voiler la face, mais ils doivent quelque part avoir une idée sur les défaillances et les dérives qu’ils ont provoquées.

On pourrait même penser, si besoin est, à des séances de thérapie collectives pour tenter de comprendre les manœuvres auxquelles s’adonnent les syndicats de l’enseignement, mais peut-on vraiment se promettre de ne plus connaître pareilles désillusions ? Peut-on travailler dans la sérénité et la confiance ? Qui arrêtera Yaâcoubi ?

Rappeler chaque partie à son devoir, à ses obligations envers l’éducation de nos enfants est un blason bafoués depuis 2011. On ne se trompe pas : la responsabilité de ce qui arrive au système éducatif est partagée. Personne n’est irréprochable.

Au-delà des déceptions et des frustrations, c’est le besoin de réhabilitation qui doit prédominer. Au-delà de ce qui fait mal, il reste quand même la certitude qu’on peut être mieux. Que nos enfants méritent mieux…

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