Cinéma: Les films d’auteur pénalisés par les plateformes

Les films d’auteur ne font plus recette sur les plateformes qui se substituent peu à peu aux salles de cinéma. Donnons-nous à réfléchir, nous qui ne jurons que par ce genre de films.


Amateurs militants et défenseurs de films d’auteur, nous avons une étude pour vous inquiéter. Nous avons aussi des chiffres. Des chiffres qui viennent de l’étranger, mais sans vous froisser, ce genre d’études sur l’impact des plateformes sur la fréquentation des salles de cinéma et les films d’auteur n’a pas été encore effectué dans nos contrées. Mais à l’aune de ce genre d’étude, nous pouvons déjà nous poser des questions et des interrogations sur l’avenir de nos cinématographies. Bref, dans cette étude encore fraîche et qui date de quelques mois, commandée par l’Association française des cinémas d’art et essai, nous apprenons que «41% des abonnés à des plateformes de SVOD se rendent moins souvent, voire plus du tout, au cinéma» surtout après la pandémie. Qu’en est-il des films d’auteur? «Le cinéma d’auteur semble en revanche durement pénalisé, martelle l’étude, à l’exception de films comme Don’t Look Up (Adam McKay) et The Irishman (Martin Scorsese), qui auraient été visionnés par 10% des abonnés à une plateforme ou à une chaîne de télévision payante, la plupart des films d’auteur prestigieux tels que La Main de Dieu (Paolo Sorrentino) ou The Power of the Dog (Jane Campion), Marriage Story (Noah Baumbach) ou Roma (Alfonso Cuaron) ne dépassent pas les 5% d’audience. De quoi effectivement nourrir les inquiétudes des professionnels du secteur».

En Tunisie, la plupart de notre production cinématographique est classée dans la case films d’auteur, des films où l’auteur est le maître d’œuvre, maître du rythme, maître du point de vue et de l’histoire, mais surtout de la manière de la raconter. Bref, le concept que tout le monde connaît séduit les sélectionneurs et les programmateurs des festivals. Soit ! Mais à la sortie en public, la plupart de ces films ne font pas ou peu recette dans les salles, à part quelques exceptions très rares et encore ! Nous n’avons aucun moyen scientifique pour le vérifier en l’absence d’une billetterie unique sur laquelle plusieurs ministres de la Culture se sont cassé les dents sans parvenir à l’installer. Bref, on ne vous apprend rien sur ce débat notoire. Quelques tentatives de films de genre réalisés avec des moyens propres semblent avoir fait recette et constituent une promesse grandiose pour le cinéma commercial en Tunisie. Si un jour, le cinéma est complètement conquis par les plateformes, quel avenir pour les auteurs ? La même fibre narrative par trop ennuyeuse et intellectuelle, voire qui a fait fuir le spectateur tunisien des salles de cinéma pendant les années 80 et 90, pourrait le faire fuir des plateformes. Actuellement, Paolo Sarentino et Jane Champion ne dépassent pas les 5 % d’audience… C’est vous dire ! Faut-il pour autant formater nos films ? Pas du tout, mais il faut trouver une nouvelle manière de les raconter, personnelle et originale, certes, mais mieux écrits et loin des ego hypertrophiés. Pour cela, il ne suffit pas de regarder des films et de «faire genre» parce qu’on va finir par réaliser des films qui ressemblent à d’autres films… Comment trouver la diagonale du fou ? Celle qui allie les deux versants d’un film de manière à raconter une histoire qui émeut avec l’élégance d’un acrobate sans tomber dans l’auteurisme.

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