Can 2019 – demain finale algérie-sénégal : Une CAN de toutes les couleurs

Rythme, déceptions, révélations, talents, calculs, entraîneurs heureux, d’autres malheureux et une belle cagnotte pour la CAF, récit d’une CAN qui se termine demain.

Qui de l’Algérie ou du Sénégal va s’installer sur le toit du continent? On le saura demain soir au stade du Caire. Plus de trois semaines (très long pour une fin de saison) où l’Egypte a accueilli, en mettant les gros moyens dans un pays en tourmente politico-économique, ses hôtes. Venus de tous les coins du continent, mais selon des quotas préfixés, les invités de l’Egypte n’ont pu remplir de petits stades (20.000 comme capacité moyenne), et c’est peut-être là l’incontestable défaillance. Beaux stades, oui mais vides et heureusement que nos voisins algériens ont imposé une affluence respectable pour le match de demain. Et cette CAN, comment peut-on raconter ses insoutenables et mémorables histoires? Une version «new-look» sous les diktats d’Infantino qui veut des tournois chargés et ouverts pour plus d’audimat, de contrats, de sponsoring et, donc, de revenus. Là, le pari économique est gagné !

L’Algérie : un régal !
De toutes les sélections qui ont participé au tournoi, seule l’Algérie nous a épatés. Quel que soit son résultat demain (pour l’équité du football, c’est l’équipe qui «doit» gagner), l’Algérie aura retrouvé la grandeur et la solidité des sélections de 1982 (trio Madjer-Assad-Belloumi) de 1990 (CAN remportée par l’équipe de Madjer-Adjani et Magharia) de 2009 (l’équipe de Saâdane) et de 2014 qui a sorti (le grand Mondial au Brésil). Equipe technique qui joue un 4-3-3 modulable en 4-4-2 où le bloc et où les joueurs affolent leurs adversaires par des enchaînements et un jeu direct limpide et bien ficelé. Même sa défense qui peut fléchir est meilleure que les autres. Derrière tout cela, un alchimiste appelé Belmadi qui a trouvé la formule du jeu la plus divertissante et la plus efficace. L’équation n’était pas facile du tout.

Déceptions…
L’Algérie obtient le prix du cœur. D’autres sélections ont bien défendu leurs chances jouant bien et surtout en débauchant une énergie digne des grands. Le Maroc, malgré son élimination sévère contre le Bénin, a été fidèle à son identité. La Côte d’Ivoire, le Sénégal et l’Afrique du Sud ont enchanté, eux aussi, chacun à sa manière. Des déceptions? Oui, bien sûr dans ce tournoi pénible et impitoyable par ses coups du sort. L’Egypte reste la déception la plus grande : pour un pays organisateur, quitter, sans au moins faire son devoir de jouer, est un coup dur. Les Egyptiens vivent encore les séquelles de ce cataclysme. D’autres ténors nous ont déçus comme le Cameroun de Seedorf (qui n’a pas la même réussite que lorsqu’il était joueur). Il y a aussi le Ghana des frères Ayew (la fin d’un règne?) qui était loin de ce que son public attendait. En somme, cette CAN n’a pas souri aux équipes partant favorites, telles que l’Egypte. C’était encore une fois un autre scénario…

Fatigue, stars saturées
Une chose est sûre, programmer une CAN en juin après une saison chargée pour tous les joueurs du tournoi, avec la chaleur et l’humidité qu’il y a eu en Egypte, n’était pas une chose facile. D’ailleurs, les stars de cette CAN, qui évoluent en même temps dans des clubs européens de qualité, n’étaient pas aussi performants. Pour Salah et Mané par exemple, ils n’étaient pas aussi inspirés et véloces qu’ils le sont à Liverpool. Contrairement à Mahrez, Blaïli, les joueurs attendus de la CAN, à l’image de Zayech, Mikel, n’ont pas donné énorme satisfaction. Etre en sélection diffère beaucoup des clubs. Plus que la fatigue, la charge des matches successifs, ces «stars» étaient aussi sous la pression d’apporter les solutions à tous les problèmes de leurs sélections. Ils ne pouvaient pas tout faire!

Pyramide inversée
Cette CAN a confirmé la visible tendance que le foot africain a prise ces dernières années. La pyramide est presque inversée. Il n’y a plus de préjugés, et il n’y a plus de favoris qui gagnent à tous les coups. L’écart entre les favoris et les pays émergents diminue terriblement. Rien qu’à voir ce que le Bénin, l’Afrique du Sud, Madagascar ont fait. Pour des sélections classées parmi les meilleures, jouer un adversaire qui n’a pas de traditions n’est plus une mince affaire. Les joueurs de ces sélections sont si motivés, ils n’ont aucune pression, contrairement aux stars et aux sélections notoires. Certainement qu’on n’est pas encore au stade où une équipe émergente gagne la CAN, mais on a bien vu, qu’à part l’Algérie, toutes les autres sélections se valent plus ou moins. On a vu combien les grosses cylindrées ont souffert pour passer devant des «outsiders». C’est une réalité à laquelle il faudra faire face à l’avenir.

La CAF et la cagnotte
Les chiffres officiels ne sont pas encore sortis, mais cette CAN, et malgré la faible billetterie, a généré beaucoup de revenus. Le nouveau concept avec 24 sélections, qui jouent en juin et avec surtout plus de matches joués (et bien sûr diffusés), est un concept osé et qui, techniquement, n’a pas élevé tant le niveau, mais qui a apporté ses effets économiques. Tout le monde a parlé CAN. La CAF, sous l’impulsion d’Infantino (patron de la Fifa), a misé sur la marque CAN pour cibler un audimat fort et des annonceurs et des sponsors des plus solides au monde. Cette CAN a marqué la transition vers les tournois populaires à fort audimat et image où le nombre de matches a tellement augmenté. Cela fait l’affaire de tout le monde : la CAF qui met «la caravane» du spectacle, l’Egypte, le pays où l’on fixe «la caravane», les pays participants qui ont l’avantage de l’hébergement et des premiers classés selon les résultats. Le football africain se commercialise bien même en dehors du continent. Tel est le pari le plus déterminant.

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