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Futur gouvernement : L’impossible coalition

La mosaïque issue des urnes avec de nombreux petits scores ne rendra pas aisée la tâche du «chef de gouvernement désigné». Mosaïque à laquelle il faut adjoindre les multiples incompatibilités déjà annoncées et celles qui gardent encore leur secret, de même que les conditions que certains posent déjà quant à une éventuelle participation à l’équipe gouvernementale.

Les perspectives du processus électoral se sont clarifiées suite à la libération du deuxième candidat du second tour de la présidentielle, Nabil Karoui, qui s’avère, selon la Cour de cassation, avoir été mis aux arrêts indûment.
Ce happy end, qui n’écarte nullement l’éventualité d’un recours devant la justice en vue de réparations quant au préjudice moral ne désigne cependant pas les responsabilités dans cette affaire. Nabil Karoui est avare en déclarations depuis sa libération de la prison de Mornaguia, avant-hier vers 19h00. Son porte-parole a, toutefois, indiqué qu’une demande de report du scrutin du second tour a été adressée à l’Isie. Preuve qu’il estime garder des chances de l’emporter et devenir le cinquième président de la République depuis la Révolution.
Du côté de la réflexion à propos du prochain gouvernement, les langues commencent à se délier. Au moment où les résultats préliminaires officiels des élections législatives ont été proclamés, avec des corrections des chiffres annoncés par les agences de sondage, le parti Ennahdha, vainqueur du scrutin, se prépare au grand jour qui verra le nouveau président de la République lui demander de désigner son candidat pour le poste de chef de gouvernement.
Cependant, la mosaïque issue des urnes avec de nombreux petits scores ne rendra pas aisée la tâche du «chef de gouvernement désigné». Mosaïque à laquelle il faut adjoindre les multiples incompatibilités déjà annoncées et celles qui gardent encore leur secret, de même que les conditions que certains posent déjà quant à une éventuelle participation à l’équipe gouvernementale.
Ainsi en est-il de Mohamed Abbou, secrétaire général du Courant démocratique, qui exige un minimum de trois portefeuilles et pas des moindres : Intérieur, Justice et Réforme administrative.
Samir Dilou, dirigeant du mouvement Ennahdha, a déclaré par téléphone à Shems FM, hier, que son parti ne pourra, par exemple, pas s’allier avec le Parti destourien libre (PDL) en raison de «ses positions et des déclarations de ses dirigeants».
Et Dilou d’expliquer : « Pour qu’un gouvernement puisse diriger le pays, il est nécessaire qu’il obtienne entre 140 et 150 voix à l’Assemblée ». Et il faut que les partis d’une telle coalition se mettent d’accord sur le programme du prochain gouvernement et sur la personne qui sera chargée de l’exécuter.
Et Dilou d’indiquer, faisant allusion au parti de Nabil Karoui, Au Cœur de la Tunisie, qu’Ennahdha ne pourra pas s’allier ou même entreprendre des négociations avec « un parti politique dont les dirigeants sont suspectés de corruption ». Ce alors que Mourou estime qu’«il est possible d’échanger les avis avec ce parti».
A ce stade des contacts entre partis, seules deux formations annoncent leurs atomes crochus : Ennahdha et la Coalition Al Karama de Seïfeddine Makhlouf, soit un total de 73 députés. S’ils s’entendent, il leur en faudra 70 autres à rassembler parmi la mosaïque. Mais, au-delà des effusions, leurs deux «programmes» ne sont pas proches, à part l’islamisme, que par les têtes d’affiche et certains slogans. Car les déclarations de Makhlouf sont d’un radicalisme déroutant : inscrire la charia comme source du droit dans le texte de la Constitution, réfuter l’égalité dans l’héritage, s’attacher à la peine de mort, maintenir la criminalisation de l’homosexualité, s’opposer à la France dont il exige des excuses pour les années d’occupation et le remboursement de la valeur des biens que celle-ci a exploités durant le Protectorat, supprimer le français comme langue usuelle enseignée et pratiquée…
Ce type d’«extrémisme» peut également intéresser Ennahdha auprès du petit parti Errahma dont le chef, un imam clandestin rentré du Canada, est le propriétaire d’une radio illégale que la Haïca n’a pu déloger : Saïd Jaziri.
Peuvent également être associés à cette quête, des élus de listes indépendantes et de coalitions disparates bien vues par Ennahdha mais dont le nombre de députés ne pèse pas vraiment. Les législatives ont, en effet, permis d’obtenir des sièges avec 2000 voix à Tozeur et Kebilli, par exemple, où Ennahdha a marqué des points, alors qu’il en a fallu plus de 20.000 à Tunis, à l’Ariana ou encore à Sousse, où Au Cœur de la Tunisie était très présent.
Côté partis modérés, Tahya Tounès que préside Youssef Chahed, l’actuel chef du gouvernement, affirme par la bouche de son secrétaire général, Slim Azzabi, ne pas être intéressé par la formation de la nouvelle équipe ministérielle. De même que Abir Moussi qui a affirmé, hier, qu’elle ne s’associerait à aucun gouvernement dont Ennahdha ferait partie. Enfin, le Mouvement du peuple, dirigé par Zouhaïr Maghzaoui, a déclaré se voir plutôt dans l’opposition.
S’agissant du « chef de gouvernement pressenti », Samir Dilou n’a donné aucun nom mais il estime qu’« il devra avoir des notions profondes en économie, mais être un politique et non un technocrate. Et il ne faut pas qu’il appartienne à un parti politique ». Soit encore un « oiseau rare » !…

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