Accueil Economie Classe moyenne : Une lueur d’espoir est-elle toujours permise ?

Classe moyenne : Une lueur d’espoir est-elle toujours permise ?


Depuis 2011, l’érosion de la classe moyenne qui a été, pour longtemps, considérée comme étant le fondement de l’ordre social en Tunisie, se produisait avec une cadence accélérée. En cause, la forte tension inflationniste qui ne cesse d’étouffer le pouvoir d’achat des Tunisiens.


Yosri, 36 ans, est un instituteur du primaire et père d’une enfant âgée de 6 ans. Sa femme, Halima, est une enseignante suppléante de 2 ans sa cadette. Ils éprouvent de grandes difficultés à joindre les deux bouts à la fin de chaque mois. Touchant un revenu mensuel d’à peu près1800 dinars, la petite famille subvient à peine à ses besoins quotidiens. Poussé dans ses derniers retranchements, Yosri cumule les emplois : il donne des cours particuliers à domicile.

«Après 2011, l’envolée des prix est devenue tout simplement insupportable. Penser à l’avenir me fait peur. Avec quels moyens vais-je assurer l’éducation de ma fille ? Pourrais-je un jour avoir ma propre maison ? Les prix de l’immobilier sont hors de portée. Evidemment, la classe moyenne s’est appauvrie en Tunisie !», a répondu Yosri, à notre question sur sa perception de la cherté de la vie.

Ce témoignage accablant reflète, en effet, le désespoir et le désenchantement d’une grande partie de la société tunisienne. D’une manière plus exacte, on appelle souvent cette part de la société «classe moyenne» pour désigner le modèle de vie du ménage qui possède une petite maison, une petite voiture et dépense juste ce qu’il faut pour payer ses factures, se divertir et se permettre, occasionnellement, un peu de luxe.

Une somme assez importante
Cette notion sacrée de la classe moyenne a été, depuis l’indépendance, présentée comme étant le socle sur lequel la société tunisienne est bâtie. Ainsi, le sociologue Abdelkader Zghal évoque, à cet égard, qu’«après le changement politique de 1969 et la libération du système économique en Tunisie, la classe moyenne a été proclamée officiellement comme étant le fondement et la base de l’ordre social». C’est dire l’importance du rôle social, économique et politique de la classe moyenne.

Cependant, il est devenu, aujourd’hui, difficile de cerner la classe moyenne. La tension inflationniste l’emporte beaucoup sur le pouvoir d’achat des Tunisiens. Selon les résultats d’une enquête menée par l’Institut tunisien d’études stratégiques (Ites) en 2018, le pourcentage de la classe moyenne a chuté de 20% en 8 ans seulement, passant de 70% en 2010 à 55% en 2015 pour frôler les 50% en 2018. Un recul «effrayant», comme le qualifiaient beaucoup d’experts sociologues et économistes.

Cette baisse s’explique en partie par la forte inflation qui frappe de plus en plus les couches sociales les plus vulnérables de la classe moyenne. Rappelons, à cet égard, que selon les résultats de l’étude 2018 de l’Ites, la classe moyenne dépense une moyenne de 750 dinars pour payer le loyer. Ce qui constitue une somme assez importante, notamment par comparaison avec le revenu mensuel moyen qui avoisine les 950 dinars.

Paradoxalement, l’indice de Gini, un indicateur qui mesure les inégalités de richesse, a connu une baisse continuelle sur la période 2010-2015, passant, ainsi, de 0,36 à 0,33. Notons, dans ce sens que l’indice de Gini varie entre 0 et 1. Il est égal à 0 dans le cas d’une répartition égalitaire parfaite des richesses d’une société donnée et il est égal à 1 dans une situation la plus inégalitaire possible, celle où toutes les richesses seraient possédées par une seule personne. En d’autres termes, plus l’inégalité est forte, plus l’indice de Gini est élevé. Cette baisse de l’indice, qui a été enregistrée sur la période 2010-2015, a été expliquée par une hausse des revenus salariaux, c’est-à-dire par les majorations salariales.

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