Accueil Economie Sousse – Rencontre avec M. Ridha Chiba, conseiller international en exportations : Les chances et les conditions de réussite

Sousse – Rencontre avec M. Ridha Chiba, conseiller international en exportations : Les chances et les conditions de réussite


M. Elyès Fakhfakh a été désigné récemment, par le président Kais Saied, chef du gouvernement chargé de constituer le prochain gouvernement. Nous avons contacté nombre d’experts en sciences politiques et économiques dont notamment M. Ridha Chiba, conseiller international en exportations afin de nous enquérir sur les chances du gouvernement Fakhfakh pour relever nombre de défis tels que le déficit budgétaire de l’Etat, les dettes publiques, le chômage, l’inflation. Interview.


Est-ce que la nomination de M. Elyès Fakhfakh pour constituer le prochain gouvernement tunisien a été pour vous une surprise?
Evidemment et c’est avec une très grande stupéfaction que je l’ai apprise, et ce, pour plusieurs raisons dont, entre autres :
Primo, M. Fakhfakh, non seulement, appartient à un parti qui n’est pas représenté à l’ARP alors que notre système politique est parlementaire, mais il n’a recueilli que 0,34 % des suffrages aux élections présidentielles. Ce qui veut dire que son programme ne répond nullement aux attentes des Tunisiens.

Secundo, il ne faut pas oublier qu’il appartient au gouvernement de la Troïka où l’on a connu un marasme économique, une privatisation des entreprises publiques en deçà de leurs valeurs, une dépréciation spectaculaire du dinar tunisien, des assassinats politiques, une montée du terrorisme, un commerce parallèle, un recrutement abusif au sein de la fonction publique. Tout ceci a influencé négativement et considérablement le budget de l’Etat.

Tertio, il faut ajouter l’emprunt des crédits auprès des instances monétaires internationales et du Fonds monétaire international sans qu’ils soient investis de manière adéquate dans les projets créateurs de richesse et d’emploi. De même, l’époque de la Troïka a été connue par les diverses promesses des hommes politiques au pouvoir sans aucune réalisation effective. A titre d’exemple, le taux du chômage en 2012 était de 17,6 %, le déficit commercial était de 11,6% milliards de dinars, le déficit budgétaire avoisinait les 6 milliards de dinars. A vrai dire, les Tunisiens aiment oublier cette époque.

Est-ce que le gouvernement de M. Fakhfakh pourrait réussir et réaliser les attentes des Tunisiens ?
D’emblée, je réponds négativement car je considère qu’un chef de gouvernement dans un système parlementaire demeurant le chef de l’exécutif, doit être un stratège et un économiste de formation surtout lorsque son pays traverse des difficultés énormes et de taille dans les domaines économique et financier. Ce qui n’est pas le profil de M. Fakhfakh car il faut qu’il ait des options socio-économiques et culturelles qui vont de pair avec les attentes des Tunisiens et concilient véritablement entre les attentes économiques et sociales et non pas un programme au service d’une minorité qui tend à s’enrichir davantage.

Ce programme doit encourager l’investissement, donner au travail sa véritable valeur, créer de nouveaux projets, contrôler les créneaux stratégiques comme le bâtiment, le commerce en auditionnant les entreprises publiques tout en leur permettant de travailler sur des objectifs conformément à leurs capacités réelles.

Ce programme doit accorder une grande importance à la qualité de l’enseignement, à la vie culturelle et sportive et à la promotion de la vie sociale dans le pays en baissant les prix, en luttant continuellement contre l’inflation, les pénuries fictives et irréelles, en barrant la route aux spéculateurs, au commerce parallèle, en assurant une bonne gouvernance et en luttant sans relâche contre les crimes, le banditisme, la corruption en vue d’asseoir une vie décente pour tous les Tunisiens.

Quelles sont les actions que le prochain gouvernement tunisien doit assurer ?
De prime abord, le chef de l’exécutif, s’il ne possède pas un appui parlementaire, ne pourra en aucun cas réaliser sa politique. Et je crois que M. Fakhfakh doit en priorité pousser l’ARP à élire les instances constitutionnelles et assurer une relation fructueuse et sérieuse basée sur les intérêts réciproques avec toutes les organisations nationales comme l’Ugtt et l’Utica.

Il doit aussi prévoir une stratégie économique et sociale en investissant dans les nouveaux projets, en construisant de nouveaux hôpitaux dans les régions intérieures, en renforçant l’infrastructure routière et portuaire ainsi que les lignes de chemins de fer. Il doit dynamiser l’exportation, promouvoir la diplomatie économique, l’économie solidaire, investir dans l’agriculture, encourager les petits agriculteurs, l’économie verte et numérique.

Il doit aussi interdire toutes les importations qui ne constituent pas un besoin réel pour la Tunisie, changer la monnaie tunisienne afin de mettre fin à la grande somme d’argent qui circule en dehors de la Banque centrale. Il doit instaurer une relation étroite entre l’université et les besoins réels du marché de l’emploi. A cet effet, il faut augmenter le taux d’encadrement dans les entreprises pour réaliser la production requise et la productivité escomptée.

Est-ce que le prochain gouvernement de M. Fakhfakh aura l’aval des représentants du peuple ?
Certainement, non pas parce que les députés seront avec le gouvernement mais parce qu’ils n’aiment pas voir l’ARP dissoute et, de ce fait, ils perdront leurs places et leurs intérêts.

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