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Tribune | Le Covid-19, les énergies renouvelables et nous

Par Mohamed Gargouri*

A l’issue du Covid-19, l’humanité se pose de plus en plus de questions sur les solutions durables qui ont le moins d’effets négatifs sur l’environnement, d’où l’importance du développement des énergies renouvelables (ERs).

Le Covid-19 a  mis en évidence la nécessité de la transition vers des ERs.

Ce qui s’est passé avec la pandémie du Covid-19 nous a rendu manifeste la crise immense que vit l’humanité depuis longtemps. Cette crise a trait à la façon dont l’humanité traite la Nature : monocultures, production décentralisée des biens de consommation, énergies polluantes, etc, accentuant ainsi la détérioration de la biodiversité, la fonte des glaces, la désertification, l’accumulation des déchets non recyclables.  Nous ne connaissons pas encore  la véritable ampleur de cette pandémie ni jusqu’à quand elle va durer. Mais nous devons nous préparer dès maintenant à explorer de nouvelles pistes de développement après son passage. Un pays comme la Tunisie peut sortir plus fort de cette crise s’il arrive à valoriser ses atouts en matière de développement des ERs et s’il s’engage à installer des plateformes de production de ces énergies.

La pandémie a obligé un grand nombre de pays à appliquer des mesures de confinement et à soumettre diverses activités à des restrictions. L’un des effets importants de ces mesures a été la baisse de 6 % de la demande énergétique mondiale et une diminution de 8 % des émissions de gaz à effet de serre. Cependant, le confinement et le développement du travail à domicile ont montré l’importance de l’électricité et la nécessité de la produire à partir des énergies alternatives.  Par ailleurs, durant le confinement, on s’est rendu compte que le fonctionnement courant des stations d’ER, comme les éoliennes et le photovoltaïque, ne nécessite pas d’équipes de pilotage sur place, ce qui limite considérablement l’effet des crises sanitaires.

La Tunisie comme destination pour la délocalisation des ERs pour l’Europe

La crise a mis en exergue les inconvénients d’une mondialisation incontrôlée et d’une délocalisation non réfléchie des sites de production de produits parfois stratégiques. Nous devrions saisir l’opportunité de notre proximité avec l’Europe pour nous présenter comme  la bonne destination à la mise en place de nouveaux projets de coopération. La perturbation qui a touché la distribution de produits stratégiques en période de crise du Covid-19 pourrait inciter les Européens à développer les alliances industrielles avec des pays qui lui sont géographiquement proches pour réduire leur dépendance à l’égard de« pays lointains ». Parmi les secteurs qui peuvent bénéficier de cette opportunité, il y a le secteur des ERs. La Tunisie, de par sa proximité géographique avec l’UE, son climat, son dispositif juridique en matière d’ERs et les compétences techniques dont elle dispose, a toutes les chances d’être le partenaire idéal pour cette coopération en matière d’ER. Cette opportunité est d’autant plus réelle que le directeur de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a souligné, dernièrement, qu’il est nécessaire, après le Covid, que la relance économique soit compatible avec une politique environnementale durable.

Les perspectives mondiales visent à réduire les émissions de CO2 d’au moins 70% et un scénario énergétique sans danger pour le climat afin de maintenir le réchauffement climatique à un niveau de moins de 2°C durant le siècle. Contrairement à certaines idées reçues, le rapport de l’Irena (International Renewable Energy Agency) prévoit une rentabilité à long terme des transformations envisagées du système énergétique de 3 à 8 dollars pour chaque dollar investi. Par ailleurs, il est envisageable de voir,  dans les années à venir,  l’apparition de mécanismes fiscaux de taxation conséquente du CO2 pour accompagner la TE. Nous devons être prêts techniquement et sur le double plan de l’organisation et de l’infrastructure à monter des projets en collaboration avec les pays de la région dans le domaine des ERs. Sur le plan de l’employabilité, la Tunisie a tout à gagner de la TE. En effet, selon l’Irena, la transition aux ERs multipliera par quatre le nombre d’emplois dans le secteur énergétique d’ici 2050.

La nécessaire modification du mix énergétique en faveur de l’électricité après le Covid

Dans son dernier rapport, l’Irena a affirmé que toutes les régions du monde devraient connaître une augmentation de la part des ERs jusqu’à 80 % du mix énergétique d’ici 2050. Le confinement pendant lequel se sont développés le télétravail et les services à distance, contre une limitation des transports et des déplacements, a montré un potentiel de modification du mix énergétique en faveur de l’électricité. Avec un développement futur de l’électricité et des filières renouvelables, les objectifs de la TE seront plus faciles à atteindre en termes de mix énergétique. Le secteur des services sera certainement un modèle pour ce changement. Un tel changement ne peut être envisagé sans la contribution de la recherche scientifique à la préparation, le design et la mise en place de la TE dans notre pays.

Pour les investisseurs, les ERs constituent un secteur relativement « sécurisé » qui devrait continuer, après le Covid-19, à attirer les financements. La Tunisie vise à intégrer les ERs dans la production d’électricité à hauteur de 30 % d’ici 2030. Le développement des ERs participera à la création de milliers d’emplois et à améliorer le bien-être de la population. La direction générale de l’Irena a déclaré que dans le contexte du Covid-19, « la dure tâche des gouvernements consiste à maîtriser l’urgence sanitaire tout en introduisant des mesures de relance et stimuli de grande urgence… En accélérant l’essor des ERs et en intégrant la TE dans le processus global de récupération, les gouvernements peuvent atteindre de nombreux objectifs économiques et sociaux en ligne ».

*Professeur à l’Université de Carthage

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