Les communiqués officiels, auxquels personne ne prête plus la moindre attention, égrènent tous les jours de nouveaux cas de contamination.
L’Organisation mondiale de la santé s’est résignée face à la propagation du virus et face aux signes de relâchement que l’on relève ici ou là, et que la pandémie n’aura pas de «panacée».
689.758 morts dans le monde, dont 154.860 aux USA, une situation peu reluisante au Brésil, Mexique, Royaume-Uni, Inde, Espagne, Italie, France, Australie, Philippines, etc., on pense au «reconfinement».
Revenons en Tunisie. A l’annonce d’une éventuelle pandémie, la Tunisie, sous l’égide de l’ancienne ministre de la Santé, Sonia Bencheikh, a vite pris les devants : une équipe de choc a été mise en place. De véritables spécialistes en la matière ont été mobilisés, un comité scientifique a été constitué pour suivre à la seconde près ce qui se passe dans le monde et dans le pays, la fermeture des frontières terrestres, aériennes et maritimes, en dépit de très lourds sacrifices a été décidée.
Pendant ce temps, de grandes nations regardaient faire, ironisant cette promptitude qui, en fin de compte, s’était avérée payante.Ces nations regrettent aujourd’hui leur mauvais réflexe et leur manque de prévision.
Parallèlement à ces dispositions (bien entendu il y en a bien d’autres), le langage de la vérité a été le principal atout pour, pédagogiquement, inviter la population à se prendre en charge et d’apporter son aide volontaire aux autorités. Alors que d’autres hésitaient encore, la Tunisie prit les devants pour fermer les…mosquées, fermer les écoles, interdire les réunions de masse, interdire les cinémas, cafés et autres lieux de loisirs, comme les hôtels et les boîtes de nuit.
La saison touristique a été sacrifiée avec ce qu’elle représente pour les milliers de familles qui en vivent.
La «victoire»
Et ce fut l’occasion de crier victoire en assénant des chiffres à faire pâlir bien des nations autrement plus développées. Nous avons omis de citer le cadre médical tunisien pour lequel il faudrait rendre un vibrant hommage appuyé pour ce qu’il a fait à l’effet de rendre cette «victoire» possible.
Nous n’oublierons pas les jeunes, les chercheurs des différents instituts, et autres personnes qui ont contribué par leur ingéniosité à rendre ce combat aussi efficace que soutenu pour isoler le virus et lui faire rendre l’âme.
La Tunisie était devenue un pays fréquentable. En témoignent les visiteurs qui ont repris le chemin de Sousse, Monastir ou Sidi Bou Saïd et autres lieux de villégiature.
Mais, et il y a un «mais», ce qui n’était en fin de compte qu’une question de prévention, rendue techniquement possible grâce à des efforts volontaires et surtout imprégnée d’un nationalisme spontané, est devenue une question politiquement exploitable. Et cela a débouché sur des prestations où ceux et celles qui affrontaient le danger étaient complètement escamotés.
Un changement de langage
Le Tunisien n’est pas dupe. Ce changement de langage et ces attitudes suffisantes ont fini par avoir raison des dernières résistances : les bonnes dispositions ont commencé par se perdre.
Plus de tapis personnels et de masques dans les mosquées, encore moins de contrôles à l’entrée. Dans ces lieux, il ne reste que les traçages à la peinture rouge aux portes. L’entrée est devenue libre, et la distanciation s’est réduite d’au moins cinquante pour cent.
Dans les cars, métros, trains, et autre moyens de transport, c’est la ruée, les marchés au coude à coude,la promiscuité malsaine est partout, ainsi que le retour aux bonnes vieilles habitudes : les cars ou les métros sont remplis du double de ce qu’ils devraient charger.
Dans la rue, les porteurs de masques sont devenus des « extraterrestres » que l’on regarde avec un sourire narquois.
Dans les milieux officiels, les communiqués, auxquels personne ne prête plus la moindre attention, égrènent tous les jours de nouveaux cas de contamination.
La grande victoire est en train de se convertir en des jeux comptables, pour le moins qu’on puisse dire, macabres. En effet, on semble jubiler en précisant que «le cas est importé». Et puis après ?
C’est un cas et il est susceptible d’évoluer, de devenir une véritable catastrophe rien qu’à voir comment les gens se comportent : revenus les bisous, les embrassades, les accolades, les soirées familiales, la chicha et le jeu de cartes touchées par des centaines de personnes dans bien des cafés, la fête autour de ceux qui sont revenus au pays…
Evolution de la situation
La directrice générale de l’Observatoire National des Maladies Nouvelles et Emergentes n’a pas mâché ses mots, tout en s’alarmant des dernières évolutions du virus. Le Grand-Tunis, Kairouan, Sousse enregistrent un regain d’activité du virus, qui est selon les enquêtes menées, importé par les visiteurs ou par les Tunisiens revenus de l’étranger. «Ces cas communautaires concernent des personnes-contacts ayant fréquenté des individus revenus de l’étranger. Le virus circule parmi nous. L’évaluation du risque reste élevée. La Tunisie a mis en place une stratégie de prévention et d’ouverture des frontières qui repose sur le dépistage précoce et le renforcement des mesures de prévention au niveau des zones de transit» a-t-elle précisé.
Il circule le virus !
Le retour à des habitudes auxquelles ont a mis fin, grâce à une campagne persuasive et efficace, est actuellement enregistré. La réunification des familles, la mobilité de ceux qui sont de retour, munis, certes, de certificats de tests négatifs, mais en passant par des aéroports infestés et mal contrôlés ont fait que la situation est redevenue sérieuse et alarmante.
Et voilà que l’on reparle de cette deuxième vague qui nous menace et contre laquelle nous relevons quand même quelques hésitations à prendre des décisions rapides, fermes, incontournables. Quels que soient les nouveaux sacrifices à consentir.
Bien entendu, bien des secteurs seront de nouveau en détresse. Le tourisme, encore lui, les lieux de villégiature, les cafés, les mosquées, les théâtres et autres s’en ressentiront. Des milliers de familles risquent de souffrir.
L’Etat est bien devant un choix difficile : le pays risque de ne plus s’en sortir, alors qu’il est au bord de la banqueroute. Avec les grèves, les arrêts de production un peu partout, les feux de forêts, les embarcations de la mort qui tiennent coûte que coûte à franchir la Méditerranée, les menaces aux frontières, le prochain retour des élèves à l’école, il est temps de revenir au bon sens et de relancer cette fibre responsable qui a vibré à tous les niveaux et qui nous a permis de remporter la première victoire.
Il ne ménagera personne
Mais il faudrait commencer par donner l’exemple. Celui qui vous demande de porter un masque doit en porter lui-même.
Celui qui est chargé de contrôler doit être imbu du minimum de responsabilité pour ne pas flancher sentimentalement lorsqu’il faut appliquer la loi.
Les tenants des lieux de loisirs se doivent de comprendre que le danger risque d’emporter un membre de leur propre famille car de retour chez lui, un cafetier, un placeur ou un conducteur de bus peut infester tout un quartier.
Toute une pédagogie à remettre en place, à adopter pour que les mesures de prévention soient réellement efficaces. Faute de quoi, le virus, qui est loin d’être parti en vacances, fera des siennes.
Il ne ménagera personne!
Liberte
6 août 2020 à 16:46
Et vous vous étonnez que le coronavirus ne passe pas de l’un à l’autre facilement avec une foule si compacte .