Accueil Société Demain, les ouvriers de chantiers (de moins de 45 ans) en sit-in à la Kasbah: Pourquoi l’accord 2020 n’a-t-il pas été appliqué ?

Demain, les ouvriers de chantiers (de moins de 45 ans) en sit-in à la Kasbah: Pourquoi l’accord 2020 n’a-t-il pas été appliqué ?

Ce dossier si complexe et compliqué, corollaire d’une politique détournée et à peine voilée, a toujours été perçu comme une épine dans le pied. Pourtant, les négociations-marathons Ugtt-gouvernement ont, déjà, abouti à un accord conclu, à l’arraché, le 20 octobre 2020, en vertu de quoi les 31 mille ouvriers de chantiers dans toutes les régions ont droit à un emploi digne et décent.

Ouvriers de chantiers ou cet éternel débat sur la précarité de l’emploi dont aucun gouvernement post-révolution n’a pu venir à bout. Et nul, au fil des mois et des ans, n’a eu le courage de regarder la réalité en face, afin de régulariser, une fois pour toutes, la situation professionnelle d’une catégorie sociale autant vulnérable que marginalisée.

Comme une épine dans le pied !

Ce dossier si complexe et compliqué, corollaire d’une politique détournée et à peine voilée, a toujours été perçu comme une épine dans le pied. Pourtant, les négociations-marathons Ugtt-gouvernement ont, déjà, abouti à un accord conclu, à l’arraché, le 20 octobre 2020, en vertu duquel les 31 mille ouvriers de chantiers dans toutes les régions ont droit à un emploi digne et décent. Une mesure que l’on croyait venir désamorcer la crise et soulager notamment les moins de 45 ans, bien que les travailleurs âgés de 45-55 ans n’y voient qu’une demi-solution. C’est que leur titularisation, tant attendue, tarde à venir.

Toutefois, même la catégorie quadragénaire (moins de 45 ans), qui avait prétendu avoir gain de cause, semble naviguer dans les illusions, n’ayant rien obtenu de ce qu’on lui a promis. Elle n’a pas trouvé son compte, si bien que ses revendications, si légitimes soient-elles, n’ont pas fait du chemin. Déçus, ces ouvriers de chantiers ont décidé de revenir à la charge. En réponse à l’appel de leur Coordination nationale, en concertation avec ses représentations dans les régions, ils ont menacé d’observer, demain lundi, un mouvement de protestation à La Kasbah. Leur message est clair et net : l’urgence de mettre en application le fameux accord précité, portant sur la régularisation de la situation professionnelle des ouvriers de chantiers de moins de 45 ans sur cinq tranches, tout en respectant les délais impartis à cet effet. Ceci étant, alors qu’on n’arrive même pas, jusque-là, à parachever la première tranche qui compte quelque 6.000 ouvriers. Il reste environ 1.500 demandes non satisfaites et qui attendent encore leur réaffectation dans la fonction publique, au titre de 2022.

Mutisme et tergiversation

Cela fait 12 ans et même plus que l’on rabâche ce problème d’emploi précaire et qu’on promet de lui trouver une solution définitive. Ce fut, alors, des paroles en l’air ! Et la décision de recrutement prise à cet effet n’est, en fait, qu’un bluff politique visant uniquement à jeter de la poudre aux yeux, comme le disaient, d’ailleurs, certains membres des coordinations régionales. Car, selon eux, ce n’est pas la première fois qu’on a entendu parler de pareilles solutions et que le gouvernement a daigné donner suite à leurs revendications. D’autant plus que ce mutisme et cette tergiversation ont fini par exacerber les tensions et remuer le couteau dans la plaie. Faillir à ses engagements et biaiser de la sorte toute formalité conventionnelle ont semé le doute chez ces ouvriers et ébranlé leur confiance en l’Etat de droit et ses institutions.

Pourquoi faire du surplace, alors que tout semble mis en place ? Surtout que l’accord du 20 octobre 2020 est toujours en vigueur, suite auquel il a été convenu de tout régler, tranche par tranche. « Ça suffit, la coupe est pleine ! On en a marre de cette politique d’atermoiements et de fuite en avant adoptée par tous les gouvernements qui se sont succédé depuis la révolution», s’écria, émue, Samar Chaâbani, une des membres de la coordination régionale des ouvriers de chantiers à Ben Arous. Elle et ses collègues ont révélé, dans leurs déclarations aux médias, qu’ils continuent, malgré tout, à travailler sans couverture sociale ni sanitaire. Ils ont du mal à subvenir aux besoins de leurs familles et enfants. Aucun d’entre eux n’est rassuré sur son sort.

Un appel au Président ! 

Tel un feuilleton mexicain, ce dossier explosif traîne en longueur, sans rien voir venir. A chaque fois, il refait surface et tient à lever le voile sur de fausses promesses. Mieux vaut crever l’abcès que l’éterniser par des palliatifs, dit-on. «Deux tranches couvrant 12 mille ouvriers, à raison de 6 mille pour chacune, auraient dû être complètement finalisées au cours de cette année. Ce qui n’a pas été réalisé, alors que la régularisation définitive de notre situation, via des recrutements, ne serait effective qu’en 2025», se lamente, sur ses nerfs, Hiba Saâdi, membre du groupement des coordinations régionales des ouvriers de chantiers de moins de 45 ans. Jusqu’à ce jour, tous les délais  fixés n’ont pas été respectés. «Volet négociations Ugtt-gouvernement, le climat entre les deux parties n’est pas au beau fixe. Le gouvernement en place se refuse à s’asseoir autour de la même table», a-t-elle évoqué.

Face à ce blocage continu, le groupement des coordinations régionales s’en remet au Président de la République, sollicitant Kais Saied «à intervenir en urgence pour l’application de l’accord 20-2020 et à établir des canaux de communication avec les représentants des ouvriers de chantiers âgés de moins de 45 ans», lit-on dans son dernier communiqué, rendu public le 8 de ce mois. «Nous demandons que les procédures de la régularisation de notre situation, entamées début juin 2022, soient parachevés dans les délais», insiste Mme Saâdi. Sinon, menace-t-elle, l’élan de protestation gagnera du terrain et risque, si besoin est, d’avoir de nouvelles tournures.

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