Dans une Tunisie encore marquée par les bouleversements politiques postrévolutionnaires, l’heure est venue de choisir le futur président. Entre espoir et inquiétude, les électeurs se sont rendus hier aux urnes pour façonner l’avenir de leur pays.
Hier dimanche, 6 octobre, la Tunisie a vécu une journée cruciale pour son avenir politique avec la tenue de l’élection présidentielle. Ce scrutin, opposant trois candidats, s’est déroulé dans un contexte délicat, avec des citoyens divisés et des inquiétudes persistantes sur l’avenir du pays.
Les électeurs sont venus faire entendre leur voix à un moment décisif. Des témoignages variés, empreints d’espoir, mais aussi de frustration, révèlent les grandes attentes d’une population toujours en quête de stabilité et de changement.
Les premiers à voter, un devoir national
À Tazarka, dans la délégation de Korba, gouvernorat de Nabeul, le calme semblait régner aux premières heures du vote. À 8h30, peu après le début de l’opération électorale, le taux de participation était relativement faible. Les premiers arrivants étaient principalement des personnes âgées, visiblement motivées pour accomplir leur devoir national. Certains avaient quitté les mosquées après la prière du Sobh, (prière à l’aube) d’autres avaient pris un café avant de se rendre aux urnes.
Am Salah, retraité de 71 ans, a exprimé son engagement envers le processus électoral. «Je suis ici pour choisir le candidat que je considère compétent pour diriger le pays pour les cinq prochaines années», a-t-il déclaré à La Presse. Oncle Salah demeure convaincu que la Tunisie a franchi une étape cruciale ces dernières années. «Nous sommes encore dans une phase transitoire, mais il est temps de redessiner les contours d’un nouvel État. Nous avons besoin d’une stratégie claire et d’une feuille de route pour avancer dans la bonne direction», a-t-il ajouté.
Ce septuagénaire insiste également sur l’importance de la participation citoyenne. Selon lui, l’abstention n’est pas une option intelligente. «Le peuple tunisien a acquis une certaine maturité politique. Nous devons apprendre des leçons des années passées. C’est au Tunisien d’avoir aujourd’hui le dernier mot pour l’avenir de la nation. Je vote non seulement pour moi, mais aussi pour l’avenir de nos enfants», souligne-t-il.
Jeunes électeurs, entre engagement et crainte
Si les aînés semblent confiants dans l’exercice démocratique, les jeunes électeurs tunisiens expriment un sentiment plus mitigé. À 10h, devant l’école primaire Habib Bourguiba à Tazarka, nous avons rencontré Maher, un jeune, agent dans une banque, qui nous a exprimé son sentiment de désillusion. «Je suis ici pour que ma voix compte, mais je ne crois pas que la situation se soit améliorée depuis la révolution. Les conflits politiques n’ont pas servi l’intérêt national», confie-t-il. Comme beaucoup de jeunes, il se dit désenchanté par les conflits politiques constants qui, selon lui, n’ont pas contribué à l’amélioration des conditions de vie du citoyen tunisien. Malgré ses craintes, Maher espère avoir fait le bon choix en votant pour un candidat. «Nous avons besoin d’un leader qui puisse redonner espoir et stabilité à la Tunisie», ajoute-t-il. Pour Mouna, une jeune femme de 35 ans travaillant dans une société privée, la responsabilité des difficultés actuelles incombe également au peuple. Elle reconnaît sa propre passivité dans le passé, mais affirme avoir pris conscience de l’importance de son engagement. «Je n’étais pas très intéressée par la politique, mais les événements m’ont poussée à réaliser que nous sommes tous concernés. Même si je n’ai pas une grande culture politique, je m’efforce de comprendre les différents points de vue», explique-t-elle.
La jeune femme a aussi pris conscience que sa voix, même petite, fait partie d’un ensemble qui peut façonner l’avenir de la Tunisie. «J’ai fait mon choix, et j’espère que ce sera pour le bien du pays», nous ajoute-t-elle, avant de rappeler l’importance de ne jamais perdre espoir, même dans les moments de grande incertitude. «Il ne faut pas baisser les bras. Tant qu’il y a de l’espoir, nous pouvons bâtir un avenir meilleur», affirme-t-elle.
La journée se poursuit, et d’autres électeurs se rassemblent autour des bureaux de vote, les visages reflétant une multitude d’émotions, allant de l’espoir à la frustration. Les discussions animées entre amis et voisins révèlent une société tunisienne toujours engagée dans le débat politique, mais aussi inquiète au vu de la situation actuelle.
Unis dans leur quête d’un avenir meilleur
Marwa, étudiante de 24 ans, souligne que «le choix est difficile car les candidats ne semblent pas vraiment comprendre nos préoccupations. Nous avons besoin de leaders qui s’engagent véritablement pour les jeunes et l’avenir du pays».
D’autres témoignages, comme celui de Sami, un agriculteur de 45 ans, révèlent une certaine méfiance. «Je vote parce que c’est mon devoir, mais je ne crois pas vraiment en ces élections. Les promesses n’ont jamais été tenues, et je crains que rien ne change encore cette fois», avoue-t-il.
Alors que la journée avance, les débats continuent dans les cafés, sur les places publiques, et les regards sont tournés vers les écrans de télévision où devront défiler les premières estimations. Cette élection pourrait être un tournant pour le pays, mais la route semble encore longue pour retrouver une stabilité politique et économique durable.
Les témoignages recueillis révèlent une population partagée entre espoir et désillusion, entre détermination et fatigue face aux crises successives qui ont ébranlé la nation.
Et les Tunisiens, malgré leurs divergences, se retrouvent unis dans leur quête d’un avenir meilleur. Les défis sont certes nombreux, mais l’engagement des citoyens dans le processus électoral est un pas crucial vers la construction d’une démocratie solide. L’issue de ce vote déterminera non seulement le futur, mais aussi la direction que prendra la Tunisie dans les années à venir. Les prochaines heures seront déterminantes pour l’avenir de la Tunisie et cruciales pour définir ce nouvel horizon.