Dahak perpétue, à travers son projet emblématique «La geste hilalienne», la tradition des conteurs qui ont longtemps relaté les faits héroïques des Hilaliens à travers ses xylogravures (gravure sur bois) hautes en couleur qui révèlent des portraits et des scènes lyriques inspirés par ces récits légendaires.
La galerie Saladin met en lumière des aspects de l’art de la gravure, un art riche par son histoire, par ses procédés et par les maîtres qui l’ont pratiqué mais qui demeure méconnu par le public en Tunisie. Une belle initiative à travers laquelle le directeur des lieux, Ridha Souabni, tente de dévoiler la magie et la beauté de la gravure à travers les oeuvres de deux grands maîtres tunisiens : Brahim Dahak et Jellal Ben Abdallah.
On découvre dans cette exposition, qui se poursuit jusqu’au 17 novembre 2024, «La Geste Hilalienne» de Brahim Dahak, une belle collection de gravures sur bois (xylogravure) qui capturent l’essence de cette épopée légendaire et quelques lithographies (gravure sur pierre) de Jellal Ben Abdallah. Ce sont les œuvres de Dahak qui dominent l’espace d’exposition par leur nombre, mais aussi par leurs formats qui sont plus conséquents que ceux des petites estampes de Ben Abdallah.
Dahak, qui a fait partie de l’école de Tunis, est né le 16 novembre 1931 à El Ksar à Gafsa dans une famille de femmes tapissières. A l’adolescence, il devient garçon de café à Tunis puis maître d’hôtel réputé. Grâce à une bourse, il part étudier en Italie où il intègre l’académie artistique de Rome de 1957 à 1961. Il devient ensuite l’élève du peintre Amerigo Bartoli et du maître graveur Macari et reçoit, en 1961, le prix Carlo Giviera. A 30 ans, il retourne à Tunis où il travaille comme professeur de dessin à Sfax mais finit par démissionner. Il séjourne à la Cité des Arts de Paris en 1972 et tient sa première exposition personnelle à Tunis en 1964. Dès lors il commence à exposer régulièrement à Tunis et à l’étranger dans le cadre d’expositions personnelles et collectives. En 1991, il reçoit le grand prix de la ville de Tunis. Il réalise des œuvres de gravure importantes dans son atelier de Sidi Bousaid et reçoit, en 1994, le prix national des arts plastiques. Il se consacre à la représentation de sujets féminins, orientales au harem, odalisques, etc. Il décède en 2004. Ses mosaiques monumentales ornent les murs de la maison de la culture de Gafsa et du port de la Goulette.
De la figure héroique de Bouzid ou Abou Zaid El Hilali, l’intrépide cavalier de Beni Hilal, à la légendaire Zazia, la princesse aux cheveux longs, soeur et conseillère du sultan Hassan, en passant par la sage Chiha, sœur de Bouzid et son neveu Yahia et sa mort tragique, Dahak perpétue, à travers son projet emblématique, «La geste hilalienne», la tradition des conteurs qui ont longtemps relaté les faits héroïques des Hilaliens. Ses xylogravures (gravure sur bois) hautes en couleur révèlent des portraits et des scènes lyriques inspirés par ces récits légendaires.
Les délicates lithographies de Jellal Ben Abdallah font écho à ses thèmes de prédilection, à savoir les scènes quotidiennes, les petits métiers, les natures mortes et les figures féminines en tenues traditionnelles. Des sujets qu’il a explorés tout au long de son long et riche parcours, à travers différentes techniques : la peinture figurative ou abstraite, la mosaïque, la sculpture, la céramique, la photographie et la lithographie qui est une technique d’impression à plat d’un dessin réalisé sur une pierre —un calcaire à grain fin, très fragile et très dense.
Plus rapide et économique que la gravure, la lithographie a été très souvent utilisée pour la reproduction de documents à caractère commercial. Mais dès les années 1960, la lithographie est progressivement remplacée par de nouvelles techniques d’impression. De nombreux artistes se sont emparé de cette technique et elle est aujourd’hui entièrement dédiée à l’art contemporain.