«Dans ce tournant palestinien que connaît aujourd’hui la pensée humaniste internationale, la nécessité d’un théâtre anti-génocidaire est plus que jamais d’actualité, car elle s’inscrit dans un nouvel horizon humaniste qui rétablit le principe d’une humanité libre.»
Les Journées théâtrales de Carthage (JTC) s’apprêtent à célébrer leur quart de siècle du 23 au 30 novembre 2024. Rappelons qu’en raison de la conjoncture dans les territoires palestiniens occupés et le génocide qui se poursuit à Ghaza depuis le 7 octobre 2023, le comité directeur de l’édition précédente du festival avait décidé l’annulation des festivités lors des cérémonies d’ouverture et de clôture.
Cette année, les JTC s’inscrivent encore dans un contexte géopolitique dramatique, notamment en Palestine et au Liban, et réaffirment de nouveau leur engagement à confronter les enjeux les plus pressants de notre époque et leur soutien à la cause juste de la Palestine en repositionnant le théâtre comme outil de réflexion, de résistance et de renouveau. C’est dans ce sens que se tiendra, du 25 au 27 novembre, un colloque international abordant le thème : «Théâtre, génocide et résistance : pour une nouvelle vision de l’humanité» et qui sera au cœur de cette 25e édition. L’idée étant de faire du théâtre un vecteur de changement, un espace où les perceptions évoluent, où les cultures se rencontrent, où l’expérience humaine est partagée dans toute sa complexité et où la mémoire des tragédies passées nourrit l’espoir d’un avenir plus juste et plus humain. «Bien que les massacres collectifs aient eu des antécédents en Europe et dans le Nord Global moderne, le sort réservé aux pays du Sud Global colonisés et semi-colonisés au cours des cinq derniers siècles — en Amérique du Sud, en Afrique, en Australie et en Asie —, représente un plan capitaliste, impérialiste, rigoureux et systémique qui cherche à assigner aussi bien ces peuples que leurs cultures des destins horribles
A Gaza, depuis octobre 2023, les attaques incessantes d’anéantissements des cultures humaines contemporaines — déjà observées en Bosnie, en Croatie, au Rwanda, en République Démocratique du Congo, au Darfour, au Soudan et ailleurs —, ont atteint un niveau d’escalade sioniste criminelle sans précédent. En se dressant face à cette horrible agression, les Palestiniens le font au nom de l’Humanité entière, subissant l’une des expériences humaines les plus amères. Ceci nécessite une réflexion approfondie et l’ancrage des actions dans le domaine de l’art de la résistance. Le théâtre offre dans ce sens des possibilités illimitées pour impliquer les artistes de la scène et leurs publics dans la création d’événements, de textes et de scènes qui renouent avec la vie au cœur du génocide et de la destruction. Tout au long des luttes de l’Humanité contre l’oppression et les violations des droits, le théâtre n’a jamais été un témoin passif. Nombreuses sont les pratiques théâtrales qui ont contribué à renforcer et à soutenir les résistances. Nombreux sont les théâtres et les compagnies qui ont vu le jour pour exprimer les douleurs des peuples et porter leurs préoccupations. Nombreux sont les théâtres qui ont réuni peintres, musicien.ne.s, poètes, auteur.e.s, philosophes, anthropologues et sociologues pour pratiquer un art libre face à la destruction, au génocide, à la colonisation et à la tyrannie.«Dans ce tournant palestinien que connaît aujourd’hui la pensée humaniste internationale, la nécessité d’un théâtre anti-génocidaire est plus que jamais d’actualité, car elle s’inscrit dans un nouvel horizon humaniste qui rétablit le principe d’une humanité libre.», lit-on dans un texte introducteur du colloque. Il y sera question d’explorer les multiples facettes du théâtre face aux tragédies humaines. Comment l’art scénique peut-il témoigner de l’indicible ? Quelles sont les spécificités esthétiques du théâtre traitant du génocide et de la résistance à travers le monde? Ces questions, parmi d’autres, seront au cœur des débats. L’interaction entre l’art théâtral et les sciences humaines sera également scrutée, offrant un regard interdisciplinaire sur la manière dont le théâtre peut contribuer à la compréhension et à la construction des identités collectives face aux traumatismes historiques.