
Le spécialiste en économie, Mohsen Hassan, a averti que la baisse des exportations tunisiennes ne se limite pas à une simple conjoncture liée à la gestion des systèmes économiques ou à la récession dans l’Union européenne, premier partenaire commercial de la Tunisie, mais reflète un problème structurel plus profond. Ce dernier se traduit par une perte de compétitivité des entreprises tunisiennes, réduisant leur capacité à conquérir de nouveaux marchés internationaux.
Dans une interview accordée à l’agence TAP, Mohsen Hassan a appelé le président de la République, Kaïs Saïed, à prendre des mesures pour améliorer la compétitivité des entreprises tunisiennes et leur capacité à exporter. Il estime que cela est essentiel pour réduire le déficit commercial, le déficit courant et la balance des paiements, tout en assurant la souveraineté économique du pays. Selon lui, un dialogue national doit être ouvert pour renforcer la compétitivité des entreprises tunisiennes et leur permettre de faire face aux défis, d’autant plus que 90 % des importations échappent à un contrôle significatif.
Le spécialiste a souligné que le tissu entrepreneurial tunisien perd progressivement sa compétitivité depuis plusieurs années. La pandémie de COVID-19 et la guerre russo-ukrainienne ont exacerbé cette situation. “Aucune mesure significative n’a été prise pour soutenir les entreprises. En revanche, toutes les décisions adoptées jusqu’à présent ont échoué à redresser la situation”, a estimé Hassan.
Les obstacles à la compétitivité des entreprises tunisiennes
Les raisons de la baisse de la compétitivité des entreprises tunisiennes sont multiples, selon l’expert. Parmi les plus importantes figurent les coûts financiers élevés, notamment les taux d’intérêt directeurs qui atteignent 8,2 %, alors qu’ils ne sont que de 2 % au Maroc. Les banques, explique-t-il, supportent une grande part de la responsabilité dans la baisse des exportations tunisiennes.
De plus, les charges sociales élevées, avec des augmentations salariales fréquentes et un taux de pression fiscale qui atteint 25,5 %, parmi les plus élevés au monde, freinent également la compétitivité des entreprises. “Dans d’autres pays, ces charges sont bien plus faibles”, a souligné l’expert, ajoutant que l’instabilité du système fiscal complique encore la situation.
Enfin, le manque de numérisation dans les entreprises tunisiennes représente un autre frein majeur. Selon Hassan, la numérisation est essentielle pour permettre aux entreprises de se développer et d’optimiser leur compétitivité tout au long de leur cycle de vie, de la création à l’exploitation.
Pour pallier ces difficultés, Mohsen Hassan plaide pour une diversification des marchés d’exportation. Selon lui, la dépendance de la Tunisie à l’espace européen présente des inconvénients majeurs, d’autant plus que la conjoncture économique actuelle de l’UE reste préoccupante. Il propose ainsi d’explorer de nouveaux marchés, notamment en Russie, en Asie du Sud-Est et en Afrique. Cette démarche, selon lui, nécessiterait une révision en profondeur du système de financement.
L’expert insiste également sur la nécessité de réformer le système bancaire tunisien, soulignant que les banques doivent jouer un rôle plus actif dans le financement des opérations d’exportation et être présentes sur les marchés internationaux. “Il est impossible de construire une économie compétitive et des entreprises capables d’exporter si le système bancaire ne soutient pas la gestion des risques et n’investit pas dans les secteurs à forte valeur ajoutée”, a-t-il conclu.