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Nouvelle stratégie de l’emploi : La voie vers le travail décent

L’emploi précaire gagne du terrain depuis plus d’une décennie. Il a porté aussi une forte concentration en Tunisie au cours de la période de la crise sanitaire du Covid-19, période considérée néfaste pour tous les travailleurs dans plusieurs secteurs.

La lutte contre l’emploi précaire est considérée aujourd’hui comme une priorité nationale. L’objectif des pouvoirs publics est de le restreindre et de multiplier les efforts de tous les intervenants sur le marché du travail dans le cadre d’une vision stratégique intégrée centrée sur l’accès à des emplois productifs et décents, pierre angulaire du projet de développement revendiqué par le pays.

En d’autres termes, la politique de l’emploi est confrontée aujourd’hui à deux défis interdépendants : assurer une dynamique de création d’emplois de qualité et faire évoluer la situation actuelle vers l’emploi productif et décent. 

Le marché de l’emploi continue à être tendu

Malgré les stratégies mises en place et la multiplicité des programmes, le taux de chômage reste toujours à des niveaux élevés. Les données relatives à l’emploi et au chômage font ressortir une augmentation du taux de chômage qui s’élève à 16 % fin 2024 contre 15,8 % une année auparavant. Par sexe, le taux de chômage diminue à 13,3% pour les hommes (13,4 % au troisième trimestre 2023). Alors que pour les femmes, le taux augmente à 22,1 % contre 21,7 % une année auparavant.

Le taux de chômage des jeunes âgés de 15 à 24 ans a augmenté au cours du troisième trimestre de l’année 2024, pour atteindre 40,5 % contre 39,1 % au troisième trimestre de 2023. Ce taux se décompose en 39 % pour les hommes et 43,3 % pour les femmes. Pour les diplômés de l’enseignement supérieur, le taux augmente pour atteindre 25 % au troisième trimestre de l’année dernière (contre 24,6 % au deuxième en 2023). Ce taux est de 17,0 % chez les hommes et de 31,6 % chez les femmes.

Compte tenu de ces indicateurs et face à l’urgence de contrer la situation de précarité de l’emploi en Tunisie, une réunion dédiée a eu lieu récemment, sous la présidence du chef du gouvernement Kamel Maddouri pour dévoiler les mesures de la nouvelle stratégie de l’emploi susceptibles de renforcer la dynamique du secteur. Ainsi, le marché de l’emploi ne saurait se satisfaire de solutions concrètes, mais a besoin aussi d’un véritable tournant économique et sociétal pour bâtir une économie capable de répondre aux ambitions de sa jeunesse.

Les questions relatives à l’emploi précaire, la couverture sociale, les modalités de recrutement et de contractualisation… font l’objet d’un ajustement, que ce soit du côté des entreprises/employeurs que des salariés. 

Compte tenu du changement des relations et du développement du travail, du changement des concepts d’offre et de demande sur le marché du travail, du déplacement de la main-d’œuvre vers le principe de la création de richesses, et des nouvelles spécialisations et activités (établissements naissants d’entrepreneuriat, sous-traitance, activités libres), les lois qui réglementent ces nouvelles relations professionnelles doivent être révisées. Le code du travail et les réformes y afférentes rentrent dans la démarche des défis sociaux en Tunisie. 

Du travail précaire au travail décent

Il est crucial aujourd’hui de se rendre compte des maux dont pâtit notre marché du travail depuis plus d’une décennie. Cette problématique devrait être traitée radicalement, en révisant les régimes de travail et en éradiquant définitivement le recours à la sous-traitance. 

La lutte contre la propagation du travail précaire est devenue une priorité majeure.  Suite à son expansion et sa présence invasive dans quasiment tous les secteurs économiques, la présidence du gouvernement a décidé, en 2024, d’interdire la conclusion de nouveaux contrats de sous-traitance dans le secteur public et d’annuler toutes les mesures qui sont en contradiction avec cette décision, notamment la circulaire 35 du 30 juillet 1999, relative à la sous-traitance dans l’administration et les établissements publics. Cette décision a été prise conformément aux instructions du président de la République et en application de l’article 46 de la Constitution.

Non à l’exploitation des personnes à travers le travail précaire et la sous-traitance, oui à des emplois d’avenir pour les travailleurs/euses des services publics. Dans ce contexte, le Chef de l’Etat affirme que l’emploi précaire et la sous-traitance sont « deux facteurs qui ne fournissent pas les composantes d’une vie digne aux citoyens ». Il a appelé, en effet, à la nécessité de mettre fin aux contrats à durée limitée dans le temps (CDD). Selon une étude du Forum tunisien des études économiques et sociales (Ftdes), 54,4 % des travailleurs occupent des postes « atypiques », selon les normes internationales en vigueur. D’après la même source, 44 % des travailleurs tunisiens sont employés sans contrat de travail, 11,4 % des travailleurs sont employés en vertu de contrat à durée déterminée…

Dans le même ordre d’idées, l’Itceq considère, qu’outre le chômage, l’économie tunisienne se caractérise par un faible taux d’activité égal à 47 % et elle est incapable d’utiliser pleinement son facteur travail. Ceci se résume par le faible taux d’emploi, à savoir 40 %. La dégradation de la situation de l’emploi s’est accélérée avec le ralentissement de la croissance après 2011.

Gouvernance du marché du travail

La nouvelle stratégie de l’emploi est focalisée sur la création d’emplois de qualité, la restructuration du secteur informel, la promotion de la formation professionnelle et son adaptation aux besoins du marché.

Conformément aux principes du travail décent, définis par l’Organisation internationale du travail (OIT), la nouvelle stratégie de l’emploi prévoit une refonte de la gouvernance du marché du travail, en misant sur l’encouragement à l’entrepreneuriat et aux initiatives privées, et sur l’amélioration de l’environnement des affaires pour attirer les investissements.

La nouvelle stratégie sera axée sur le développement de projets à forte capacité d’emploi, l’intégration des nouvelles technologies dans les plans de formation et de recrutement afin d’adapter la main-d’œuvre aux évolutions du marché.

Par ailleurs, et dans le cadre de la révision de la stratégie de l’emploi, des solutions concrètes pour améliorer la gestion du marché du travail ont été présentées par le ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, Riadh Choued. Ces solutions s’articulent autour de la modernisation des politiques de recrutement et des programmes d’accompagnement, outre la mise en place d’un fonds d’assurance chômage pour les travailleurs licenciés pour des raisons économiques et le déploiement de nouvelles mesures incitatives pour encourager l’auto-entrepreneuriat.

Le gouvernement prévoit la finalisation de la révision de la stratégie dans les prochains mois, avant sa validation et mise en œuvre.

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