
Le devoir de mémoire a poussé le réalisateur malien Intagrist el Ansari à réaliser un superbe long métrage documentaire de 125 minutes, sorti en 2024 : Ressacs, une histoire touarègue. Ce film a reçu le Prix des Droits de l’homme du jury parallèle lors de la 39e édition des JCC 2024 à Tunis. Ayant apprécié ce récit-témoignage lors de sa projection à la 39e édition des JCC 2024 à Tunis, j’encourage à le voir à l’Institut Français de Sfax, et ce, le mercredi 30 avril 2025 à 18h00.
Issu des Kel Ansar, tribu suzeraine de la région de Tombouctou, fidèle à ses racines, à sa culture et à la sagesse spirituelle touarègue, Intagrist el Ansari envoie une lettre à son fils de trois ans. Ainsi, essaie-t-il de lui transmettre le legs culturel de leur communauté. Basée sur une idée existentielle, la réalisation d’un tel film prend acte par la voie de la parole dite et écrite, de l’image d’archive et autres, de la musique, du chant et de la danse. Dans un double apprentissage, le réalisateur qui se met habilement en scène, accompagné de son fils et de ses oncles, nous montre dans le film comment il éduque sa progéniture à la pratique de la culture des ancêtres.
Compris entre désert, mer, livres et vent, le documentaire offre de manière poétique une visibilité à son patrimoine en voie de disparition. Par le truchement d’un traitement intimiste comme dans une fiction, il nous entraîne à suivre la légende d’un voyage initiatique. Qui dit Touareg, dit vivre en osmose avec le Sahara, ses oasis, ses points d’eau, etc. L’équilibre harmonieux et la sagesse ancestrale de ces nomades habitants du désert, en perpétuelle quête d’eau et de pâturage, tirent leur sagesse d’une culture millénaire faite de patience, d’adaptation, de rythme naturel et de sérénité.
Les Touaregs pratiquent leur religion qui est l’islam sans démagogie. Gens cultivés, souples, paisibles et dotés de beaucoup de sagesse dictés par leur milieu naturel et la spécificité de leur expérience de la vie. Spirituels jusqu’au bout des ongles, les touarègs vivent en totale harmonie avec leur milieu. C’est de ces valeurs ancestrales que le film Ressacs essaie de traduire à travers des images et des scènes saisissantes et une musique appelée blues touareg.
Vers la fin du documentaire, comme un cri d’alarme, le film nous fait-il prendre conscience de la situation déplorable des Touaregs ? La sécheresse, la sédentarité, les conflits provoqués sont les maux auxquels ils sont confrontés. D’êtres humains pacifistes, ouverts et nomades, le destin les transforme paradoxalement en réfugiés qui logent dans des camps et sujets à la dépendance, aux affrontements, à l’exil et à la pauvreté !
Se sentant chargé par la double mission de transmettre et de faire valoir son patrimoine immatériel à ses descendants et au monde, Intagrist el Ansari par son documentaire fait œuvre humaniste. Il essaie de sauvegarder ce qu’il a en son pouvoir de faire. Et dans ce cas précis, c’est le cinéma qui s’en charge. Ainsi, nous réconcilie-t-il avec nous-mêmes, avec les valeurs universelles d’ouverture, d’amour et de paix ?