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Pistache de Gafsa : Un produit d’exception qui cherche son cap

La Presse—À Gafsa, l’arrivée des montagnes de pistaches sur le marché annonce, comme chaque année à cette période, le début de la récolte. Ce décor familier, presque rituel, prend cette année une dimension particulière : la saison s’annonce exceptionnelle. Selon les premières estimations des services agricoles, la production pourrait atteindre 4 289 000 kg, un chiffre record rendu possible grâce à des conditions naturelles favorables, à l’entrée en production de jeunes plantations, à l’amélioration des systèmes d’irrigation et aux incitations étatiques destinées à soutenir cette culture.

Cette performance confirme une réalité ancienne : Gafsa occupe la première place nationale en matière de production de pistaches. Une primauté historique déjà attestée depuis le Moyen Âge.

L’histoire révèle que Gafsa est la région la plus riche en pistaches, au point qu’il n’y en a pas ailleurs en Afrique. C’est de là qu’elles sont acheminées vers l’Afrique, le Maghreb, l’Andalousie et l’Égypte. Celles du Levant sont petites, sans commune mesure avec celles de Gafsa.

Pourtant, derrière cette abondance et ce prestige historique, une question persiste: quel est l’impact réel de cette culture sur le développement local ?

Combien de producteurs et de commerçants voient concrètement leur situation s’améliorer grâce à la pistache ? Existe-t-il des coopératives ou groupements agricoles capables de structurer l’offre et de négocier de meilleurs prix ? Les producteurs disposent-ils d’un circuit de distribution qui les affranchit des intermédiaires ?

À ce jour, la réponse semble négative. L’absence de stratégie claire et de gouvernance agricole efficace freine le potentiel de ce produit d’exception. Faute d’organisation, la commercialisation se fait souvent dans l’urgence, au détriment des revenus des producteurs.

Un détour au souk aménagé pour les circonstances a permis de prendre connaissance des doléances des vendeurs et acheteurs.

Nabil, derrière son étalage s’exprime, «pour que la pistache de Gafsa devienne une véritable locomotive économique, il faut prévoir une fête de la pistache capable d’attirer touristes et investisseurs. Je suggère de mettre en place des infrastructures de collecte, de tri et de conditionnement aux normes internationales».

Un citoyen en train de marchander pour un rabattement du prix affiché propose: «Il faut penser à développer une identité visuelle forte (emballage professionnel, label de qualité, marque territoriale), et stimuler la création de petites industries de transformation (confiserie, pâtisserie, produits dérivés)».

La pistache, comme le figuier dans les zones montagneuses, pourrait redevenir un pilier d’un système agricole intégré et durable. Mais sans vision stratégique, ce patrimoine naturel et culturel risque de rester sous-exploité, condamnant la région à revivre chaque année le même scénario : l’abondance dans les champs, mais peu de retombées dans les foyers.

Au royaume de la pistache, c’est un trésor agricole en quête de stratégie. De l’abondance dans les champs, ce produit d’exception  mérite mieux. Entre patrimoine et potentiel économique, c’est la croisée des chemins.

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