
Le projet s’articule autour de trois axes principaux. D’abord, un espace culturel polyvalent destiné à accueillir des événements littéraires, des expositions d’art, un théâtre ainsi qu’un atelier de création artistique.
Un restaurant sera également aménagé sur le toit, offrant une vue panoramique sur les environs. Des suites d’hébergement haut de gamme viendront compléter l’ensemble, alliant patrimoine et confort moderne.
La Presse — Rénové avec soin, le Palais Ahmed Bey rouvre enfin ses portes, renouant avec son éclat d’antan. Il a accueilli un public nombreux, le 14 septembre, pour la présentation du dernier livre de l’écrivain et journaliste Hatem Bourial.
Ce premier événement culturel marque une nouvelle phase après plus d’un demi-siècle d’abandon.
Situé à La Marsa, en face du fameux café SafSaf, le palais a été construit en 1847 par le comte Giuseppe Raffo, beau-frère d’Ahmed Bey. Il a été par la suite repris par le domaine beylical et a servi de résidence à la dynastie husseinite.
À l’origine, la somptueuse demeure existait sur un espace beaucoup plus vaste d’environ 14 hectares, incluant des jardins au bord de la mer.
Après l’Indépendance, le bâtiment a peu à peu été livré à l’usure du temps, tout comme de nombreux monuments séculaires. Il a été occupé illégalement pendant de longues années. En l’absence de tout entretien, la façade, tout comme l’intérieur, étaient dans un état de délabrement lamentable.
Certaines parties avaient déjà commencé à tomber en ruines et le palais était voué à la démolition, avec l’idée de profiter de son emplacement stratégique pour construire un centre commercial moderne.
En 2016, la demeure a été classée monument historique, marquant ainsi une première étape vers sa préservation.
Trois ans plus tard, en 2019, elle a été proposée à la vente. Toutefois, la procédure a connu des lenteurs car toute reconversion était strictement encadrée.
L’acheteur potentiel n’est pas autorisé à en changer la vocation, ce qui limite fortement la rentabilité du projet et en freine l’attrait financier.
C’est finalement M. Mahmoud Redissi qui a acquis le palais et entrepris sa renaissance sous la supervision de l’Institut national du patrimoine. À bout d’effort et de persévérance, il a insufflé une nouvelle vie à ce fragment d’histoire en péril.
Le nouveau propriétaire n’a aucun lien généalogique avec la famille beylicale comme il nous l’a raconté. Il a grandi dans les environs du palais qui est fortement lié à des moments mémorables de sa jeunesse.
«C’est par nostalgie et par amour pour ce lieu chargé de souvenirs, symbole de mes origines, que j’ai choisi de m’investir dans cette initiative». Le projet s’articule autour de trois axes principaux.
D’abord, un espace culturel polyvalent destiné à accueillir des événements littéraires, des expositions d’art, un théâtre ainsi qu’un atelier de création artistique. Un restaurant sera également aménagé sur le toit, offrant une vue panoramique sur les environs.
Des suites d’hébergement haut de gamme viendront compléter l’ensemble, alliant patrimoine et confort moderne.
Les travaux ont actuellement avancé à 40%, comme nous a indiqué M.Redissi. «Nous avons fait de notre mieux pour restituer fidèlement l’architecture et la décoration d’origine. Nous nous sommes référés à d’anciennes photographies.
Le plafond a été entièrement reproduit à l’identique, avec les mêmes peintures et ornements. Même le marbre a été posé en diagonale, exactement comme dans la version initiale».
Les pièces richement décorées incarnent le luxe du passé du palais, avec dans les halls des portraits des beys qui rappellent la grandeur de cette dynastie.
Concernant le financement du projet, il s’agit de moyens propres de M. Mahmoud Redissi qui a eu recours à des crédits bancaires. «Je n’ai eu aucune subvention ni aucun soutien financier de la part d’organismes tunisiens ou étrangers», souligne-t-il. «Quelques commerçants nous ont offert des matériaux de construction pour encourager le projet».
Le chemin est encore long pour aboutir au résultat final espéré. Monsieur Redissi s’accroche toujours à son rêve et se montre fier de la dynamique qui commence à se créer progressivement.
«Nous hébergerons bientôt une galerie d’art ainsi qu’une exposition d’architecture italienne. Ce sont ces événements qui nous permettront de finaliser les travaux de restauration».
Un nouveau pôle touristique et culturel est ainsi créé à partir d’une demeure historique délabrée. Cette initiative privée devrait donner l’exemple, vu le nombre important de monuments séculaires menacés de s’écrouler partout en Tunisie.
Une grande partie de ces édifices est squattée par des délinquants ou livrée à la dégradation progressive, sans réelle réaction des autorités ni de la société. Au lieu de les abandonner à leur sort, ces bâtiments d’une valeur historique incontestable peuvent être préservés par de nouveaux propriétaires, toujours en collaboration avec l’Institut national du patrimoine.
Ils seront de nouveau réintégrés dans le circuit culturel et même économique. Si rien n’est fait, l’effondrement est inévitable. Il est donc plus que jamais nécessaire d’agir, avant que ces témoins du passé ne disparaissent à jamais.