
Installée en Tunisie depuis plus de trois décennies, Olga Malakhova multiplie les expositions en puisant son inspiration dans notre culture revisitée avec finesse et émotion. Ses œuvres constituent un hommage constant à ce pays qu’elle célèbre à travers ses formes les plus authentiques. Portrait d’une peintre estonienne investie, fortement attachée au patrimoine tunisien.
La Presse — Née à Tallinn, en Estonie, Olga a grandi dans une famille baignée d’art. Son père, Stanislav Malakhova, était un peintre paysagiste renommé dans son pays. Son grand-père, avant lui, maniait déjà les pinceaux. Très tôt, la petite Olga l’accompagnait dans ses escapades en plein air. A seulement cinq ans, elle découvre ce qui deviendra sa vocation: dessiner le monde. « Le peintre ne voit pas avec ses yeux, mais par son esprit », dit-elle aujourd’hui.
Après des études universitaires à Leningrad, elle choisit de poursuivre son chemin en Tunisie, où elle s’installe en 1987. Elle y réalise un mastère de recherche en arts avant d’obtenir un doctorat en Esthétique, Sciences et Technologies des arts à l’Université Paris 8. Sa thèse, consacrée à la construction du paysage en Tunisie, témoigne déjà de son ancrage et de sa sensibilité au territoire qui l’a accueillie.
Aujourd’hui tunisienne de nationalité, Olga Malakhova est membre de l’Union des artistes plasticiens et de la Fédération tunisienne des arts Plastiques. Elle enseigne également à l’Institut Supérieur des Cadres de l’Enfance de Carthage Dermech, formant de nouvelles générations à la créativité.
La première exposition d’Olga en Tunisie date de 1988, en tant que paysagiste, après avoir sillonné le pays avec son père. Depuis, son art a évolué, intégrant des éléments du patrimoine national. « Je revisite le patrimoine tunisien avec l’œil de l’extérieur », explique-t-elle. Ses peintures sont habitées par la lumière du Sud, les couleurs chaudes de la terre, les motifs des mosaïques antiques, les murs blanchis à la chaux, les carreaux traditionnels, ou encore la terracotta. Tout y est joyeux, enchanteur, humain. Une œuvre réalisée avec patience, passion et profondeur, à l’image de l’artiste elle-même.
Le style d’Olga se distingue par un travail minutieux. Elle privilégie les grands formats, jusqu’à 130 x 130 cm, exigeants en énergie et en concentration. Les petits formats, souvent réalisés sur bois (30 x 30 cm) ou toile (40 x 40 cm), sont pour elle « des pauses ».
Chaque tableau est construit avec patience « brique par brique», avec un pinceau n°0, pour en faire un monde en soi riche en motifs, en couleurs vives et en symboles. Un autre détail, il y a toujours un chat sur chaque tableau, inséré de manière ludique et qu’elle considère comme étant «sa signature ».
L’artiste revient avec « Les Belles de Carthage » dont le vernissage est prévu pour demain 12 octobre. Cette exposition aura lieu à l’espace d’art Imagin’ avec lequel elle collabore depuis plusieurs années. Elle y a été d’abord en duo avec son père en 2019, puis à travers des expositions personnelles en 2020, 2021 et 2022.
« Les Belles de Carthage » comptera une quarantaine d’œuvres, dont une vingtaine de grands et moyens formats, réalisés en acrylique et technique mixte sur toile.
Ces tableaux peints de 2023 à 2025 prolongent l’univers artistique empreint de poésie d’Olga. Il s’agit également d’une ode à la femme tunisienne passée et présente qu’elle considère comme étant sa muse. « L’histoire des femmes tunisiennes, tout comme les femmes contemporaines, m’impressionne énormément », nous confie-t-elle.
A travers son œuvre, Olga Malakhova est une passeuse de mémoire et d’émotion. Elle continue à tisser un lien entre ses racines estoniennes et son pays d’adoption, la Tunisie, dont elle explore sans relâche la beauté. Son regard extérieur, devenu intime,a donné naissance au fil des décennies à une vision artistique distinctive à découvrir à travers ses expositions.