Une initiative louable et volontaire que celle menée actuellement par les jeunes de certains quartiers pour l’aspect environnemental. Un travail citoyen qui vise à donner un meilleur relief à la ville mais qui ne doit surtout pas porter atteinte au patrimoine national et au cachet de la ville. Une ligne rouge que les autorités locales ont fixée et clairement tracée.
De Tunis à Sfax en passant par Monastir ou Gabès, de nombreuses villes connaissent depuis quelques jours une purge à grande eau grâce à la volonté et la détermination des citoyens. C’est précisément au lendemain de l’élection du nouveau président de la République Kaïs Saïed que des dizaines d’actions citoyennes volontaires ont été lancées un peu partout à travers la République sous le slogan « Etat de conscience ». L’idée est de contribuer à l’embellissement des diverses villes tunisiennes à travers des actions de nettoyage et de toilettage mais pas que. Ces actions « spontanées », qui ont été largement appréciées par les citoyens et même les institutions de l’État telles que les ministères, semblent avoir pris une autre tournure et commencent même à inquiéter et déranger les Tunisiens. En effet, les initiateurs «mal encadrés» de ces actions dans certaines localités du pays ont eu l’idée de peindre certains endroits emblématiques de leurs régions, afin de les « embellir ». Or, le résultat s’avère des plus catastrophiques. Des monuments historiques et certaines façades ont été à leur tour victimes de ces « actions citoyennes » de mauvais goût. A titre d’exemple, les pavés de la Médina de Tunis ont été colorés en vert, jaune, orange et bleu. L’Association de sauvegarde de la Médina de Tunis n’a pas tardé à lancer un cri de détresse appelant les autorités à intervenir afin de sauvegarder la Médina contre les actions de restauration et d’aménagement du patrimoine non étudiées.
Les autorités n’ont pas tardé à réagir également par l’intermédiaire du ministère des Affaires culturelles qui désavoue une telle opération pour son aspect inesthétique et fantaisiste.
Le ministère de la Culture réagit à la « campagne de coloriage »
Dans un communiqué rendu public hier, le ministre des Affaires culturelles a réagi aux appels lancés sur les réseaux sociaux pour peindre certains monuments archéologiques et endroits emblématiques tels que la médina de Tunis. Il a dans ce contexte mis en garde contre les actions qui constituent une violation grave du patrimoine national et y portent atteinte, ajoutant que ces actions sont interdites par le code de protection du patrimoine et des arts. Il a ajouté que seul l’Institut national du patrimoine est habilité à intervenir dans les zones archéologiques.
Si la campagne de propreté citoyenne et volontaire est tolérée car elle permet de soutenir les actions municipales lorsqu’elles manquent de punch et de maîtrise, celle liée au volet artistique est une ligne rouge que l’Etat a tracée. D’ailleurs une grande campagne de propreté sera organisée, à l’échelle nationale, le dimanche 20 octobre 2019, sous le slogan «Nettoie ton pays» qui n’a pas connu pour l’heure la désapprobation de l’Etat.
Campagne nationale de propreté
Lancée par des jeunes sur les réseaux sociaux, cette initiative intervient suite à des opérations bénévoles de nettoyage organisées dans les différents gouvernorats du pays (Tozeur, Gafsa, Sfax, Gabès, Kasserine…). Ces initiatives ont suscité une grande adhésion sur l’ensemble du territoire où de nombreux citoyens, des jeunes et des moins jeunes ont pris part à ces opérations en procédant au nettoyage des rues, à la collecte des ordures, à l’embellissement des villes, à la plantation et à l’entretien des plantes… Un groupe de jeunes de Mahdia a même mené une opération de nettoyage des fonds marins. Réagissant à cet effort citoyen, le ministère des Affaires locales et de l’Environnement a invité, dans un communiqué publié le 16 octobre, toutes les municipalités à mobiliser leurs moyens pour soutenir cette campagne citoyenne. De son côté, l’Utica a exprimé son soutien à cette initiative et la disposition de ses structures et unions régionales et de la Fédération nationale du bâtiment à prendre part aux efforts de nettoyage.
Parallèlement, d’autres campagnes sont lancées sous le slogan «La Tunisie change», véhiculant des propositions adressées par des jeunes aux différents responsables du pays (tri des déchets, collecte sélective…).
Cette prise de conscience collective a été à l’origine de plusieurs autres campagnes citoyennes à l’instar de celles appelant à «Utiliser les semences tunisiennes pour consommer tunisien «, à planter un million d’arbres, à l’occasion de la Journée nationale de l’arbre (le 12 novembre 2019), ou encore à nourrir les personnes sans domicile fixe. Dans ce même esprit, une campagne de propreté sera organisée, samedi 19 octobre 2019, à partir de 10h00, au parc du Belvédère, où des soins seront également fournis aux animaux de zoo par des vétérinaires bénévoles. Vaste programme.
Une mobilisation inédite
Certes de nombreuses campagnes de propreté ont été menées ces dernières années pour embellir la ville mais jamais avec une telle mobilisation et envergure. C’est une initiative des jeunes qui avaient soutenu Kaïs Saïed pendant la campagne électorale, qui le soutiennent encore en anticipant son programme. La grande campagne de propreté est une idée qui a germé sur les réseaux sociaux en début de semaine pour devenir une action citoyenne incontournable. Le principe consiste à se rassembler entre jeunes de même quartier pour la collecte des déchets urbains. Il s’agit aussi de repeindre les chaussées ou même embellir les rues avec quelques coups de pinceau. Soit. Mais cela ne doit pas être le fruit d’un travail artificiel ou artisanal mais artistique. Il faudrait songer à ce que les jeunes soient encadrés bénévolement par des étudiants en beaux-arts par exemple qui apporteraient une touche précieuse au décor. De grandes opérations de toilettage des rues sont en cours dans plusieurs gouvernorats de la Tunisie avec une action dominicale prévue demain. Pour une Tunisie verte et propre sans doute.
