Témoignages – Mouna Ben Hlima-PDG de l’hôtel El Badira Tunisie : «L’État stratège devient un luxe inabordable»

Depuis la révolution, on vu effectivement l’Etat s’affaiblir. Le secteur privé à son tour s’est dit à un certain moment qu’il va avancer et, en quelque sorte, qu’il n’a pas besoin de l’Etat. C’est ce qui a fait que pendant des années, on a vu la résilience du secteur privé qui s’essouffle, parce que l’Etat devient un élément bloquant. On vise essentiellement par élément bloquant l’administration dont la réforme demeure la mère des réformes, parce que aujourd’hui, à défaut d’aider au moins, éviter de bloquer.

Est-ce que, actuellement, la Tunisie peut jouer ce rôle? Je pense que dans l’idéal, l’Etat est stratège. Mais aujourd’hui, avec ce qu’on a pu voir ces dernières années, et le profil des cinq prochaines années, je pense que parler d’un État stratège devient un luxe inabordable pour nous. L’Etat devait se pencher sur les capacités opérationnelles de l’Etat.

Autant se pencher sur les capacités opérationnelles, le secteur privé en premier lieu, car les chefs d’entreprise, de manière générale sont inquiets de la non-implication de l’Etat de droit. En effet, pour investir, chaque chef d’entreprise a besoin d’être tranquille sur deux volets, la lutte contre la corruption et la justice, mais pas dans le sens de légiférer. On n’a’ pas besoin d’une nouvelle Loi mais de gens qui sont supposés appliquer la loi, qu’il y ait le courage, et que l’impunité cesse. Aujourd’hui, un chef d’entreprise n’est pas du tout rassuré par investir et pourrait éventuellement préférer être rentier, ce qui n’est pas bénéfique ni pour l’entreprise, ni pour l’économie, ni pour l’Etat. Le rôle de l’Etat c’est d’enlever les blocages.

Par ailleurs, nous chef, d’entreprise, quand une entreprise est dans la mauvaise gouvernance, elle coule, il n’y a personne pour la rattraper, alors que, depuis des années, des entreprises publiques qui ne sont absolument pas dans la bonne gouvernance, et qu’on continue indéfiniment à les soutenir avec notre argent.
Donc, il est plus que temps que ça cesse. Je pense que le secteur privé et les partenaires sociaux sont tout à fait disposés à fournir des efforts et des sacrifices, mais à condition que ces sacrifices aillent pour les réformes, les infrastructures… et non pas pour le train de vie de l’Etat.

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