Tozeur International Film Festival : Au gré du Toiff

Une programmation de qualité cette année a sauté aux yeux: Avant-première mondiale, découverte de quelques films avant leur sortie commerciale tunisienne et même mondiale et masterclass de qualité ont animé difficilement, mais sûrement le quotidien des festivaliers présents. Vivre de Tozeur et de cinéma, c’est bien beau, même si les bémols de taille n’ont pas manqué.

Des projections à la pelle sont dispatchées sur au moins 4 endroits. Planet Oasis, un espace divertissant, doté d’une tente dans une oasis à quelques mètres du Chak Wak, le Palm Beach, un hôtel qui centralise les activités du festival et où passent les films les plus importants et les rencontres les plus attendues entre professionnels du 7e art, le complexe culturel de la ville et la Batha, où est installé un écran géant pour les cinéphiles passants. La ville carbure en apparence à cet art, mais la manifestation a du mal à attirer les spectateurs de Tozeur, elle rassemble par contre aisément les visiteurs venus de  loin pour vivre le Toiff.

Le Panel VFX avec Abdel Halim Garess, Slim Larnaout modéré par Maroua Jaziri

Des films inédits à (re)découvrir  «Ghost Tropic» : voyage existentiel au bout de la nuit 
Un long métrage prévu pour janvier 2020 dans les salles de cinéma françaises est passé sous silence au Toiff. «Ghost Tropic» de Bas Devos, sélectionné à la Quinzaine de la Critique au festival de Cannes, a été programmé à l’espace Planet Oasis à 19h30, et, faute de transport, de nombreux festivaliers et quelques journalistes présents ont abandonné la projection. Le film d’une durée d’1h25, avec Saadia Bentaieb, Maaike Neuville et Nora Dari, est un drame belge sombre, lent, mais porteur d’un message universel. Khadija, une femme d’un certain âge, s’endort dans le métro et se réveille dans une station lointaine.

Commence alors son errance nocturne dans un Bruxelles méconnaissable la nuit et à ces innombrables rencontres avec ces individus nocturnes. Le film suit la déambulation d’une femme musulmane belge qui s’est retrouvée au fur à mesure de sa déroute dans des situations insolites, simples et humaines. Bas Dévos esquisse les hauts et les bas d’une vie modeste soumise à un système économique étouffant. Bas Devos a déclaré dans un média français : «A travers le portrait de cette femme, je pourrais peut-être parler un peu de cette génération de femmes sous–exposées et sous-représentées». Eh bien, c’est fait.

« Ghost Tropic » de Bas Devos

«It Must Be Haven» d’Elia Suleiman : comédie de l’absurde 
Toujours au même endroit, le jour suivant, le dernier long métrage d’Elia Suleiman «It Must Be Haven», passé aux dernières JCC et retenu en compétition officielle à Cannes, a rassemblé une vingtaine de spectateurs au Toiff dont une dizaine de jeunes étudiants en cinéma. E.S. fuit la Palestine à la recherche d’une nouvelle terre d’accueil, avant de réaliser que son pays d’origine le suit toujours comme une ombre.

La promesse d’une vie nouvelle tarde à venir. De Paris à New York, sans oublier sa patrie d’origine, Elia Suleiman pose des questions liées à l’identité, à l’appartenance, au nationalisme d’une manière absurde dénuée de discours, sans paroles ou presque, cédant la part belle au pouvoir de l’image et de la photographie sur grand écran, grandement maîtrisé par Sofiane El Fani. «Où peut–on se sentir chez soi finalement ? », s’interroge E.S. Le film d’1h40 et qui se veut universel offrira peut-être une réponse… ou pas.

Cette 2e édition tient la cadence sûrement, mais difficilement grâce à des masterclass, qui ont eu lieu en retard. Le premier a tourné autour de l’ «Accueil pour les équipes de production de films pour tourner sur la destination Tunisie». La séance visait surtout les professionnels du domaine. La journée suivante a débuté par un Panel VFX avec Abdel Halim Garess, Slim Larnaout et Hassan El Youbi, modéré par Maroua Jaziri. Une rencontre très attendue avec Abdelatif Kechiche a été décalée d’une journée.

« It Must be Heaven » d’Ella Suleiman

Le Toiff a cédé la part belle à des sorties ciné commerciales comme «Spiderman», «Casse–Noisette», «L’Eléphant Bleu 2», «Dachra», «Maléfique» ou «Ralph». «Noura’s Dream» de Hinde Boujemaa actuellement au cinéma est aussi passé, ainsi que «Les Epouvantails» de Nouri Bouzid. «Fathallah TV» de Wided Zoghlami a conquis la poignée de spectateurs et journalistes présents à la salle Palm Beach. Ode à la liberté et à une génération de jeunes tunisiens désenchantés, le film est une bouffée d’air frais de par sa sincérité, son engagement et sa poésie. Sa sortie nationale est prévue pour avril 2020. Il est à noter que différents acteurs et actrices français et étrangers, intervenants, membres du jury annoncés n’ont pas répondu présents ou sont arrivés en retard. A suivre.

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