Billet : Le joueur, un produit financier

Dans le passé,  la faible concurrence financière entre les clubs faisait que les salaires des joueurs dépassaient rarement celui d’un haut fonctionnaire. Cette règle, aujourd’hui rangée dans le placard des vieilleries, permettait à des équipes aux ressources et aux budgets moyens de gagner les titres. Mais le vent de l’Histoire a soufflé et le dopage des salaires, notamment ceux des joueurs étrangers, a frappé de plein fouet le monde du football tunisien et a fini par le transformer radicalement. Il est aujourd’hui  secoué par des transferts de plus en plus exorbitants, et des salaires démentiels.

Tous les obstacles à la « concurrence libre et non faussée » disparaissent dans le football tunisien. Les clubs les mieux lotis financièrement sont aujourd’hui capables de se renforcer et d’aller partout à la recherche de joueurs auxquels ils ne manquent pas d’offrir des contrats juteux. De ce fait, les salaires s’envolent. L’argent coule à flot. Les joueurs étrangers sont devenus des stars dépassant le simple cadre du football. Ils sont pratiquement présents dans la plupart des clubs tunisiens. Certains ont même fait leur entrée dans la culture populaire tunisienne.

La concurrence sportive exacerbe et alimente la concurrence financière entre les clubs et des moyens de plus en plus exorbitants sont mis sur la table afin de devenir de plus en plus fort tout en évitant de se faire piller ses joueurs. Techniquement, le championnat tunisien  n’a pas réellement le potentiel pour attirer les investisseurs. Mais il continue à attirer les joueurs étrangers. Les prix explosent, tout comme les salaires. Ces derniers débarquent chez nous  tout en étant à la recherche du contrat le plus lucratif possible. Certaines équipes sont devenues cosmopolites au grand dam des joueurs issus du club et dont l’avenir est plus que jamais compromis.  Il faut dire que depuis quelque  temps, les erreurs de casting se multiplient. Des joueurs, mais aussi des entraîneurs pas au niveau escompté, ou moins bons qu’on l’espérait. Qui n’aident pas à réaliser l’objectif tracé  par les équipes. Dans le lot, et sans être totalement exhaustif, les mauvais choix par lesquels beaucoup de clubs sont passés sont faciles à détecter. Nous demeurons convaincus qu’il est impossible de briller sans des joueurs qui sont passés par toutes les catégories du club, qui ont le sentiment d’appartenance.  Reste une question : les joueurs étrangers sont-ils véritablement des « top players » pouvant apporter le plus et permettant à leurs équipes de gagner des titres? Pas sûr puisque l’influence de beaucoup d’entre eux sur le jeu et dans le groupe n’est pas aussi sûre. Beaucoup sont devenus une énigme. Souvent inexistants, parfois frustrés.

Cette image sombre plaide aujourd’hui pour la nécessité d’un encadrement plus étroit des indemnités des transferts, du plafonnement de la masse salariale et l’amélioration de la transparence et la traçabilité des comptes des clubs.

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