Citoyens massés devant les bureaux de poste: Réflexion sur un gros couac

La scène a fait hurler les internautes, enfermés chez eux dans le cadre des mesures de confinement auxquelles le pays s’est astreint. On y voit, en plusieurs endroits, des foules massées devant des bureaux de poste. Les personnes qu’on aperçoit sont pour ainsi dire collées les unes aux autres, au mépris de toute règle de distanciation : haleine contre haleine ! Impensable, à l’heure où, partout ailleurs, les règles de prudence se multiplient, que ce soit chez les boulangers, les épiciers ou partout ailleurs.

Il est clair qu’il y a, de la part de ces concitoyens, une part coupable d’inconscience que leur condition modeste et le besoin dans lequel les a plongés la situation actuelle n’excusent pas totalement : il y va de leur santé et de celle de la lutte de tout un pays contre l’avancée de l’épidémie. Mais pointer l’inconscience face au danger nous amène immédiatement à nous demander ce qui a pu faire qu’elle ait pris ainsi ses quartiers dans la tête de tant de nos concitoyens. Le peu de cas que l’on fait de soi est en grande partie le reflet du peu de cas que l’on fait les uns des autres. Bref, à côté de l’inconscience de certains de nos concitoyens, ce que nous enseignent les images qui nous sont parvenues, c’est que la solidarité va mal chez nous.

Comme chacun sait – ou ne sait pas -, ces gens étaient massés devant les bureaux de poste pour recevoir un mandat. La veille, le gouvernement avait décidé d’octroyer une aide aux familles nécessiteuses afin de les aider à supporter la période de confinement, qui est synonyme d’arrêt des activités diverses et, donc, de tarissement des revenus que ces activités produisaient. Mesure sans doute courageuse, qui ne manquera pas de peser de son poids sur un budget où bien des voyants sont déjà au rouge vif.

Mais que l’on ne se méprenne pas : ce n’est pas cette aide, somme toute bien modique, apportée aux plus pauvres de nos concitoyens qui changera l’état de santé de notre solidarité. D’autant qu’aucune mesure n’a été prise pour que l’opération de distribution de l’aide ne se transforme pas en ce que nous avons vu : du moins pour autant que les scènes qui nous ont été rapportées reflètent la situation générale. Car si la responsabilité des citoyens bénéficiaires de l’aide est engagée, celle de l’administration et de ses représentants l’est encore plus quant à la prévention du risque de promiscuité. Ce n’est pas seulement d’incurie qu’il s’agit ici : c’est de mépris ! Une population n’est pas censée prendre en charge la tâche de sa propre organisation : il y faut une partie qui en a l’autorité et les moyens. Qu’elle fasse défection en ces circonstances, cela montre qu’elle a renoncé à sa mission. Et en tout cas à une mission fondamentale qui est inscrite dans la Constitution : la préservation de l’intégrité et de la dignité du citoyen. Inutile d’en dire plus à ce sujet là où les critiques ont abondé, y compris dans l’enceinte de l’Assemblée et face au Chef du gouvernement lui-même. Souhaitons seulement que notre administration se reprenne et, aussi, qu’elle soit secondée et secouée par une société civile dont c’est l’occasion, aujourd’hui, de marquer la nouvelle étendue de son terrain d’action : action non pas contre l’administration, mais à ses côtés !

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