Ce court métrage d’Angèle Diabang traite avec finesse et sobriété de nombreux thèmes liés aux amours interdits, à la différence religieuse, au poids des traditions sociétales, à l’inégalité entre les genres et au tabou associé souvent à l’art dans de nombreuses sociétés africaines.
«Un air de Kora», titre poétique pour un scénario coécrit par Hubert Koundé. Nous partons à la rencontre de Salma, jeune Sénégalaise de confession musulmane et pratiquante, désireuse d’apprendre à jouer à la harpe d’Afrique de l’Ouest : un instrument musical traditionnel réservé aux hommes. Son père lui demande un jour d’aller lui chercher sa harpe dans un monastère chrétien, situé dans un village à proximité. Sur place, la jeune femme y fait la rencontre du frère Manuel, qui lui offre des cours d’apprentissage de la harpe. Un sentiment d’admiration, une attirance et une excitation commencent peu à peu à s’installer au fil des cours entre l’artiste et son apprentie. Un chamboulement porté par des airs mélodieux envoûtants. Une situation amoureuse plaisante, qui ne va pas tarder à devenir risquée, troublante, voire totalement dangereuse pour le devenir des deux amoureux et leurs deux communautés respectives. L’humain et l’amour devraient être au-dessus des traditions communautaires ou de la religion : avoir une culture différente ne peut empêcher deux êtres de s’aimer et de construire leur vie ensemble. Le poids des traditions n’a pas à peser autant, surtout de nos jours. Dans «Un air de Kora», le dénouement est loin d’être heureux, la société patriarcale finit par l’emporter, le sentimental et l’artistique sont broyés par le conservatisme. Le film est d’une beauté saisissante: l’image, le cadre spatial, les couleurs et la musique happent le spectateur du début à la fin.
«Un air de Kora» a reçu le poulain de bronze dans le dernier Fespaco. Son acteur principal Roger Felmont Salah s’est fait connaître dans «La Haine» de Matthew Kassovitz. Le court métrage se veut poétique à souhait.
