Kairouan│Plusieurs villages assoiffés

La soif oblige certains à aller chercher l’eau dans des oueds remplis de têtards, ce qui génère des maladies comme l’hépatite ou la fièvre typhoïde.

Dans le gouvernorat de Kairouan, le taux général de desserte en eau en milieu rural est de 86%, puisque sur un total de 381.000 habitants, 327.000 sont abonnés en eau dont 35% à partir de la Sonede et 51% des groupements hydrauliques. Par ailleurs, 60.000 ruraux n’ont pas accès à cette denrée précieuse et se trouvent obligés d’avoir recours au marché illégal de l’eau avec un mode de stockage inapproprié, notamment lors de son transport.

Notons que le gouvernorat de Kairouan qui souffre d’une faible pluviométrie et d’absence de programmes de développement socioéconomique, peine sous l’effet d’une insuffisante desserte en eau potable dans les villages reculés, ce qui oblige des milliers de familles à s’approvisionner en eau par le biais de distributeurs privés dont les récipients sont parfois rouillés.

D’autres ont recours aux groupements de développement agricole, et ce, malgré l’existence d’énormes problèmes dus au non-payement des factures. D’où les fréquentes coupures d’eau même en période estivale puisqu’il suffit qu’un seul associé ne règle pas sa quote-part dans les frais de consommation pour que les vanne soient toutes coupées.

 

Un mode de vie primitif sans eau courante

Parmi les villages assoiffés depuis plusieurs années,  celui d’Aouled Nssir (délégation de Bouhajla) figure en bonne place. Les habitants n’ont pas d’eau potable depuis une décennie. D’ailleurs, en 2001, la plupart ont organisé des mouvements de protestation et de colère pour revendiquer leur droit à l’eau et certains ont été arrêtés.

Et c’est Feu Chokri Belaïd qui a défendu leur cause afin qu’ils soient relâchés. Depuis, c’est la résignation générale! Am Belgacem H., père de 4 enfants, nous confie que beaucoup de villageois ont recours aux véhicules de transport de marchandises moyennant 10D afin d’aller à Bouhajla-centre et remplir leurs bidons d’eau.

Pour ce qui est des mères de familles, dont Khadija M., elles sont obligées d’aller sur des charrettes à la zone montagneuse de Gssyaât afin de laver leurs linges dans quelques rares sources. Et pour leur hygiène quotidienne et pour les soins de leurs nourrissons, beaucoup achètent des bouteilles d’eau minérale malgré leur pauvreté.

Toujours dans la délégation de Bouhajla, au village de Jhina-sud où vivent 20.000 habitants, on constate que la plupart des foyers ont un «majel» mais il suffit qu’il y ait des périodes de sécheresse pour que les familles soient contraintes d’acheter de l’eau, à raison de 50D la citerne.

Et comme l’infrastructure est défaillante et que le transport rural n’est pas régulier et qu’il n’y a pas de bus, beaucoup d’élèves qui étudiaient au collège de Jhina-nord, ont dû abandonner leurs études.

Enfin, tous les villageois sont obligés de se faire soigner, en cas de maladies, à Bouhajla-centre, ce qui nécessite des frais de transport et de restauration.

Beaucoup plus loin, dans la délégation de Ouesslatia et, plus précisément, au village d’El Hyssiane où vivent 500 familles, c’est le dénuement total. En effet, beaucoup de familles n’ont ni eau, ni électricité et vivent dans des gourbis sans toilettes, ce qui les oblige à faire leurs besoins en pleine nature. Le soir, on utilise soit des lampes à pétrole et le jour on va ramasser le bois pour couvrir leurs taudis vétustes et on fait les poubelles pour trouver de quoi se nourrir.

Enfin, la soif oblige certains à aller chercher l’eau dans des oueds remplis de têtards, ce qui engendre beaucoup de maladie dont l’hépatite.

Beaucoup reste à faire pour améliorer les conditions de vie en milieu rural et ces quelques villages que nous avons évoqués en sont que des exemples de centaines d’autres zones reculées.

 

 

 

Un commentaire

  1. Liberte

    31/05/2020 à 20:58

    Comment ce genre d’incident puisse arriver ? C’est une honte et les responsables de ce drame doivent être jugés et punis sévèrement.

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