Contrepoint: Au fil du culturel…

Des choses à dire, aussi, à propos de culture. Beaucoup de choses. Ramadan d’abord, avec ses soirées et ses télés. Il n’y a jamais accord là-dessus. Puis, les festivals d’été. On en parle déjà, en variant les «tons», comme à l’accoutumée.

Mais, à notre avis, c’est «la polémique» autour du livre «Les Califes maudits» de Héla Ouardi qui se détache du «lot».

Une «polémique littéraire» qui supplante l’actualité de la révolution (drames hospitaliers et routiers, y compris). Ça n’est pas peu, avouons. Qui engage un des plus grands noms de l’intelligentsia, l’historien, écrivain et chercheur émérite, Hichem Jait, qui plus est. Pas fréquent, non plus.

Hichem Jait le reconnaît lui-même, du reste. «Je refuse généralement de m’abaisser à ces niveaux, écrit-il dans l’article publié par notre confrère «Assabah». Entendre «les querelles» (plus communément, les «klashs») par médias interposés. La formule est hautaine, mais elle ne dit pas faux. Jait n’est absolument pas un habitué du genre. Il s’y est, seulement, laissé prendre cette fois-ci, et il explique pourquoi. Pour lui, le livre de Héla Ouardi «se pique d’Histoire, mais ce n’est qu’un roman, une œuvre de fiction». «Il y a escroquerie», va-t-il jusqu’à conclure. L’homme de science et de connaissance, le sage érudit, est visiblement excédé.

On l’admet, on le comprend. Les spécialistes n’aiment pas qu’on empiète sur leur terrain. Il n’empêche que quand ils réagissent, ils procèdent, aussi, en usant d’arguments. Mohamed Talbi l’a fait à la sortie du non moins «bruyant» «Les derniers jours de Mahomet» en 2016 ; Hichem Jait refuse (on cite) de «s’y abaisser».

Dans sa réponse sur les mêmes colonnes d’«Assabah», Héla Ouardi ne se prive pas d’en faire la remarque. Elle lance, net : «Si mon ouvrage est une escroquerie de l’Histoire, pourquoi le spécialiste n’en fait-il donc pas la démonstration?…».

Il y a du défi et de la véhémence dans la réponse de Héla Ouardi. Il y a même des indélicatesses et des ricanements. Franchement, on n’apprécie pas… On doit du respect à nos maîtres et à nos aînés, malgré tout. Reste cette impression (gênante) que le commentaire critique de Hichem Jait ne différerait pas tant, lui-même, des commentaires «ambiants».De ce dont «il se désole et souffre le plus en cette fin de vie» : l’emportement, la précipitation… la fatuité.

Cette «polémique» autour des «Califes Maudits» de Héla Ouardi laisse, en fait, un goût d’inachevé. Un débat entre les intéressés la compléterait à coup sûr. Vu les profils en présence, cela reste peu évident.

• Un rappel et un oubli, pour finir.

Le rappel nous vient de la maison de la culture Ibn-Rachiq dont c’était, du 25 au 27 avril derniers, l’édition du «Festival des Atabets». La maison de la culture Ibn-Rachiq est active et féconde de longue et mûre tradition. Son jeune directeur nous a pourtant appris l’autre jour sur «Nessma TV», que son budget annuel ne dépasse pas les 13 mille dinars !!??.Ce chiffre «inouï» concerne une institution culturelle de la capitale. Imaginons ce qu’il en est à l’intérieur du pays. Il nous faudra revenir sur cette culture populaire de proximité qui risque faillite, alors que les grands festivals d’été et la Cité élevée à coup de milliards en plein Tunis ne sont, toujours, que «les arbres qui cachent la forêt».

•L’oubli est celui d’un grand et récent disparu de la grande musique populaire : Abderrazaq Qliou. Dans le milieu c’était un maître, une silhouette et une voix vénérées. Pour le public ancien ce fut le premier interprète de «Raiess labhar» dans«Nouba», en 1990 à «Carthage».C’était le final, le public avait quitté les gradins et avançait vers la scène, en guise de salut. Qliou, paix à son âme, livrait une «partition incandescente de Boussaied El Bèji». Un délice de chant. Un enchantement.

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