Fakhfakh contre vents et marées

Vraisemblablement, les vents ne sont pas propices au Chef du gouvernement, ce capitaine au long cours. En effet, dès le premier jour de sa prise de fonctions à La Kasbah, il se retrouve nez à nez avec la pandémie de coronavirus. Alors qu’il se démenait pour sauver la vie de millions de Tunisiens, les trous d’air sont partout. La guerre en Libye, qui fait rage, n’arrange pas les choses non plus. Pour boucler la boucle, le chômage a pris de nouvelles proportions inquiétantes, les caisses de l’Etat sont presque vides, l’activité économique est à l’arrêt, la grogne sociale a empiré et l’Assemblée des représentants du peuple bouillonne. Mais ses déclarations, lors de sa dernière interview, sur une probable coupe dans les salaires a jeté de l’huile sur le feu. C’est pourquoi lors de leur dernière réunion, les membres du bureau exécutif de l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt) ont haussé le ton, opposant une fin de non-recevoir aux allusions du Chef du gouvernement sur une probable réduction des émoluments des salariés et un refus catégorique de toucher aux acquis des travailleurs et des fonctionnaires.   

Par ailleurs, les syndicalistes en colère se préparent à attaquer sans faire de quartier un Fakhfakh de plus en plus incohérent dans ses propos à cause des séquelles socioéconomiques du Covid-19, au point que la porte-parole de La Kasbah, qui essaye de mettre un sparadrap sur les plaies ouvertes qui ont hélas fait leur chemin, multiplie les sorties pour rectifier le tir en mettant les déclarations de Fakhfakh sur le compte du « choc psychologique », pas plus.

N’empêche, l’angle de la contre-attaque des détracteurs du Chef du gouvernement s’est élargi et porte aussi sur la débâcle de plusieurs de ses ministres dont ils n’ont eu aucune peine à apporter les preuves.

En face, on a un Fakhfakh qui a fait montre de sa face cachée d’une bête politique qui sait galvaniser ses troupes dans un pays profondément polarisé, où l’heure n’est pas au consensus mais à l’affrontement n’ayant comme instrument qu’un rapport de force sous sa forme la plus crue.

Certes, Fakhfakh adore porter un coup de barre à ses adversaires sans pour autant parvenir à les assommer. Mais comme il y a entre lui et ses adversaires deux visions qui s’affrontent et que rien ne permet de les départager, il trouve refuge dans l’esprit et le mode de penser du président de la République qui constitue pour lui une des clés d’une victoire face à un adversaire dont les erreurs politiques grossières rebutent plus d’un. A cet égard, les tensions sociales ont donné à Fakhfakh l’occasion d’exprimer le pire de lui-même, la brutalité de son approche économique libérale. Mais malgré le déchaînement de la presse généraliste locale contre Fakhfakh, ce dernier continue à faire de bons scores dans les sondages qui ne font que voiler un triomphalisme qu’il est facile d’opposer à la sombre réalité d’un pays déchiré.

Cependant, sans le claironner sur tous les toits, les Tunisiens se retrouvent de nouveau spectateurs impuissants d’un combat politico-politicien dont le résultat influera directement sur leur destin.

Laisser un commentaire