Tribune: Nous devons travailler ensemble pour que le Covid-19 ne devienne pas le catalyseur de la recrudescence du terrorisme

Par Vladimir Voronkov, Secrétaire Général adjoint Bureau des Nations unies contre le terrorisme


Les effets multiples du Covid-19 ont le potentiel d’aggraver les griefs, éroder la cohésion sociale et alimenter les conflits, créant les conditions propices à la propagation du terrorisme et de l’extrémisme violent. Les terroristes exploitent les bouleversements, l’incertitude et les difficultés économiques causés par le Covid-19 pour répandre la peur, la haine et la division, ainsi que pour radicaliser et recruter de nouveaux adeptes. Alors que les gouvernements du monde entier se concentrent sur la lutte contre le virus, Isil et Al-Qaida se sont adaptés à ce nouveau contexte, se réaffirmant ainsi en ligne et sur le terrain et exhortant leurs partisans et affiliés à intensifier les attaques. La pandémie a également mis en évidence des vulnérabilités vis-à-vis de nouveaux récits mettant en avant la violence extrême et encourageant le terrorisme, ainsi que des formes émergentes de terrorisme, telles que les cyberattaques contre des établissements de santé.

Les menaces globales létales telles que le terrorisme et Covid-19 nous obligent à agir ensemble, avec un sentiment renouvelé d’unité et de solidarité. Alors que l’Organisation des Nations unies célèbre son 75e anniversaire cette année, le multilatéralisme est aussi essentiel maintenant qu’il l’était à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Afin d’assumer notre rôle, l’ONU vient de tenir une « Semaine virtuelle sur la lutte contre le terrorisme » comprenant dix sessions interactives visant à évaluer les défis stratégiques et pratiques de la lutte contre le terrorisme, dans un environnement pandémique mondial. Cet évènement a réuni des gouvernements, des organisations de la société civile et des représentants du secteur privé, des jeunes et des organisations régionales du monde entier pour partager leurs expertises, échanger des idées novatrices et renforcer la coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme.

Quels ont donc été les principaux enseignements de cette semaine ? Nous avons entendu comment les menaces terroristes continueront probablement de se diversifier avec la possibilité d’attaques impliquant la cyber-perturbation d’infrastructures critiques, les agents biologiques et la transformation en arme de maladies mortelles et discours de haine. Il y a eu un large consensus sur le fait que les énormes tensions et le stress causés par le Covid-19 mettront à rude épreuve la résilience et la cohésion de nos sociétés au cours des prochaines années. Ceci a mis en exergue l’importance des mesures préventives et la participation de toutes les franges de la société, en particulier les femmes et les jeunes, à l’élaboration et à la mise en œuvre de politiques et programmes de lutte contre le terrorisme. L’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu mondial pour lutter contre le virus, atténuer les souffrances humaines et briser le cycle de violence dans lequel le terrorisme peut prospérer, a également été renforcé. Un large consensus s’est dégagé parmi les intervenants sur le fait qu’il est plus que jamais important que les mesures de lutte contre le terrorisme protègent et promeuvent pleinement les droits de l’homme et l’Etat de droit, car le risque d’abus potentiels est en effet plus important dans le contexte du Covid-19. La liberté d’expression et le droit à la vie privée en sont des exemples.

La situation désastreuse dans les camps et les lieux de détention détenant des combattants terroristes étrangers présumés et des milliers de femmes et d’enfants en Syrie et en Iraq, un autre sujet discuté pendant la Semaine virtuelle sur la lutte contre le terrorisme, reste un défi. Nous avons tous la responsabilité de rapatrier de toute urgence le plus grand nombre possible de ces personnes afin de les soumettre, le cas échéant, à des poursuites judiciaires équitables et de leur fournir une réhabilitation et une réinsertion dans la société. Les enfants doivent être les premiers concernés et être rapatriés sans délai.

Les terroristes se sont adaptés au nouveau monde intégrant le Covid-19 et nous devons le faire également. L’ONU a fait preuve de souplesse pour changer sa façon de travailler, afin de mieux soutenir les efforts des pays et communautés locales dans la prévention et la lutte contre le terrorisme dans le monde. Nous utilisons, de plus en plus, des outils d’apprentissage en ligne afin de pouvoir offrir nos programmes de formation en ligne et nous utilisons des plateformes de communication modernes pour interagir avec de nouveaux publics, en particulier les jeunes.

Au cours de cette semaine, nous avons lancé une exposition virtuelle comprenant des cartes interactives, des récits remarquables et des vidéos informatives pour présenter le travail de renforcement des capacités du Centre des Nations unies pour la lutte contre le terrorisme au sein du Bureau des Nations Unies contre le terrorisme, confirmant ainsi sa réputation de Centre d’excellence mondial. Ce travail n’est possible que grâce aux généreuses contributions financières d’un large éventail de pays donateurs.

Lors de la célébration, le 26 juin, du 75e anniversaire de l’adoption de la Charte des Nations unies, le Secrétaire général, António Guterres, a souligné comment la pandémie de Covid-19, une crise humaine sans précédent de notre vivant, «a mis en relief les fragilités du monde».

Nous avons besoin d’une réponse sans précédent pour empêcher les terroristes de tirer parti de ces fragilités. Nous devons travailler ensemble pour faire en sorte que le Covid-19 ne devienne pas le catalyseur d’une recrudescence du terrorisme mondial et de l’extrémisme violent qui exploite les inégalités sociales, politiques et économiques de longue date et le mécontentement révélé par le virus. Nous devons constamment revoir, adapter et renforcer nos efforts de lutte contre le terrorisme pour garder une longueur d’avance sur ceux qui cherchent à nous faire du mal. Soutenir les victimes du terrorisme et prévenir que d’autres innocents ne deviennent l’une d’entre elles doit être notre priorité.

Les échanges virtuels de la semaine dernière ont montré qu’aujourd’hui, au milieu d’une pandémie mondiale, il est plus important que jamais de travailler collectivement, avec un objectif commun et une détermination commune afin de bâtir des sociétés résilientes et un monde exempt de terrorisme.

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