Production du phosphate: Attention au dérapage


Les mouvements sociaux organisés de temps à autre par les jeunes qui réclament de l’emploi ont perturbé la production de la Compagnie de phosphate de Gafsa, allant jusqu’à l’arrêt total de la production. D’où la nécessité d’identifier de nouvelles alternatives permettant de recruter les jeunes et d’alléger la pression sur cette institution publique.


La situation dans la Compagnie de phosphate de Gafsa (CPG) n’est pas très satisfaisante dans la mesure où la production qui a repris après une période d’arrêt est en deçà des ambitions. En effet, les quantités de phosphate commercial produites par ladite compagnie ont été de l’ordre de 132 mille tonnes, et ce, durant la période allant du 1er au 28 juin 2020. Ces quantités représentent une chute de 70% par rapport aux prévisions de la compagnie pour cette période qui tablaient sur 450.000 tonnes.

La production réalisée durant l’année 2020 a atteint 2 millions de tonne soit une quantité en dessous des objectifs fixés par la compagnie qui tablait sur une production de 2,8 millions de tonnes, ce qui représente une baisse de 28,6%. Cet état de fait est dû essentiellement à des facteurs endogènes d’ordre social. En effet, plusieurs jeunes et moins jeunes ont mené des mouvements de protestations pour exprimer leur ras-le-bol du chômage et exercer des pressions sur les pouvoirs publics pour être recrutés dans la compagnie qui dispose déjà d’un effectif suffisant en ouvriers et techniciens.

Problème de transport

La crise par laquelle passe la CPG est tributaire également du transport du phosphate par trains. En effet, le transport du phosphate vers le Groupement chimique tunisien (GCT) a connu une interruption au niveau ferroviaire à Métlaoui, Redeyef et Oum Laarayes. Le transport routier du phosphate à El-Kasr a été également arrêté par les protestataires. Il s’agit là de pressions sur la compagnie pour qu’elle revoie sa stratégie de recrutement.  Certains pensent que l’objectif de cette immobilisation des trains de la Société nationale des chemins de fer tunisiens (Sncft) avait pour but de transporter le phosphate par camions afin de servir les intérêts d’une société spécialisée dans le transport. Du coup, la Sncft a subi un manque à gagner chiffré en milliers de dinars !

L’arrêt du transport du phosphate au niveau de plusieurs unités de production est le résultat donc des protestations sociales déclenchées par les demandeurs d’emploi de la région même si plusieurs jeunes ont été recrutés dans la société de plantation et de l’environnement qui est une filiale de la CPG. Les jeunes non recrutés demandent plus et exigent leur intégration dans la compagnie qui a organisé, quelques mois plus tôt, un concours de recrutement dont les résultats ont été désapprouvés par certains candidats.

Développer le secteur industriel

Selon les chiffres officiels récents, la production du phosphate a atteint 1.630.211 tonnes entre le 1er janvier et 5 mai 2020. Cette quantité représente 83% des prévisions de production établies et annoncées par l’Etat. Aussi, 1.134.443 tonnes ont été transportées aux laveries et réparties entre 472.677 tonnes à Métlaoui, 371.646 tonnes à Kef Eddour et 290.120 tonnes à Mdhilla. Le transport ferroviaire est privilégié pour acheminer la production. Il est utilisé à hauteur de 51% contre 45% pour le transport routier. Ces chiffres ne tiennent pas compte, bien entendu, de l’immobilisation imposée des trains. Certains protestataires sont allés jusqu’à déposer du gravier sur la voie ferroviaire pour empêcher les trains de circuler. Dans ce cas, la seule solution est de recourir aux camions en payant le prix fort du transport.

Par ailleurs, et toujours jusqu’au mois de mai dernier, les sites n’ont pu extraire que 52% des quantités prévues initialement, soit un total de 2.479.955 tonnes au lieu de 4.768.951 tonnes prévues par le gouvernement. Au terme de l’année 2019, la CPG et le GCT se sont fixé comme objectif, pour 2020, la production de 6 millions de tonnes de phosphate.

Le problème de l’emploi à Gafsa s’est toujours posé avec acuité vu le nombre des jeunes sans emploi et qui sont pourtant qualifiés. La majorité des jeunes préfèrent travailler à la CPG pour stabiliser leur situation sociale et garantir leur avenir. Or, la compagnie ne peut pas recruter des jeunes en surplus de ses besoins. Déjà, on reproche à la compagnie d’avoir recrutée des jeunes pour la société de l’environnement et des plantations. Par le passé, le Fonds de reconversion créé dans le cadre de la stimulation de  l’emploi dans la région de Gafsa a permis à d’anciens techniciens de la compagnie de monter leur propre projet dont certains ont fait long feu.

Aujourd’hui, la région a un besoin urgent d’un nouveau modèle de développement pour faire travailler ce nombre impressionnant de jeunes tout en créant de nouvelles richesses. Ainsi, le tissu industriel pourrait être développé pour la création de nouvelles unités de production dans divers secteurs dans le cadre du partenariat public-privé et l’économie sociale et solidaire. Ainsi, la pression sur la CPG serait allégée et l’intensité des contestations sociale réduite.

Un commentaire

  1. Liberte

    23/07/2020 à 09:22

    Merci d’avoir supprimé mon commentaire, c’est vrai que la vérité des fois fait peur, alors on la supprime

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