Un dessin de Paolo Lombardi, Italie (Source: Cartoon Movement)


Par Abdel Aziz HALI

Si la démocratie prend racine dans des élections au suffrage universel, le mode du scrutin demeure l’outil qui permet de disposer d’un parlement ou d’un Conseil municipal gérable ou ingérable .

Si le scrutin majoritaire est le mode le plus ancien de désignation des représentants des peuples, en attribuant au parti qui a obtenu le plus de voix : un siège (scrutin uninominal) ou plusieurs sièges (scrutin plurinominal).

Au Royaume-Uni, par exemple, le scrutin uninominal à un tour permet au candidat qui récolte le plus de voix de remporter le siège. Simple et sans ambiguïté, ce mode électoral offre au pays plus de stabilité politique et une majorité (la coalition qui l’emporte gouverne seule) — fondée sur un affrontement direct avec l’opposition — pour gouverner loin de tout blocage. Il a l’avantage de favoriser les partis bien ancrés localement indépendamment du résultat à l’échelle nationale.

En revanche, par rapport à son total de voix, la formation politique arrivée en seconde place sera sous-représentée à l’Assemblée ou dans les Conseils municipaux/régionaux.

En France, le mode de scrutin uninominal à deux tours adopté par la Ve République pousse les partis politiques à tisser des alliances pour le second tour des législatives et porte garant d’une certaine stabilité politique, permettant aux deux candidats les mieux placés au premier tour d’une présidentielle de se qualifier au second tour. (Ex: France, Tunisie, etc.).

Pour la présidentielle américaine, la désignation des grands électeurs permet au vainqueur de rafler tous les sièges avec parfois des injustices comptables (Ex: une majorité des sièges et une minorité des voix pour George W. Bush en 2020 face à Al Gore).

Néanmoins, la proportionnelle plurinominale est la plus répandue parmi les États indépendants et les territoires semi-autonomes qui tiennent des élections parlementaires au scrutin direct (Allemagne, Belgique, Danemark, Tunisie, etc.).

Créée au XIXe siècle, avec l’apparition des partis politiques, par le philosophe et économiste polytechnicien français, Victor Considerant (1808-1893), la représentation proportionnelle donne un rôle important aux petits partis charnières (des partenaires indispensables des majorités gouvernantes comme le cas en Italie ou en Israël), favorise le multipartisme et conduit souvent à une instabilité politique.

Entre la méthode du quotient qui fixe le nombre de voix à obtenir pour avoir un siège (quotient électoral) ou celle du plus fort reste (une méthode favorisant les petits partis) voire de la plus forte moyenne (rapport entre les voix restantes et le nombre de sièges déjà obtenus auxquels on ajoute un siège fictif), la proportionnelle rend quasi impossible l’émergence d’une majorité stable et pousse les partis à forger des alliances contre nature pour ne pas dire des coopérations aux faubourgs de l’inceste politique (Ex: Islamistes et Modernistes en Tunisie, en 2014).

Enfin, si, en Tunisie, après la chute du régime Ben Ali le 14 janvier 2011, la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution (15 mars 2011-13 octobre 2011) présidée par Yadh Ben Achour a pensé que la démocratie consiste essentiellement à ouvrir l’Assemblée nationale constituante (ANC) à tous les partis pour qu’ils décident entre eux de ce qui est bon pour le peuple tunisien, il est clair aujourd’hui que ce choix a montré (ces dernières années) ses limites. Après tout, il y a une grande différence entre rédiger une Constitution et légiférer dans un pays sous l’emprise d’une crise socio-économique, dépourvu d’une Cour constitutionnelle et gangréné par une classe politique immature. Alors sachons raison garder !

A.A.H.


 

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