Une semaine d’inquiétude, de promesses et d’espoir : Des mesures décisives

production de phosphate
La Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) a repris, en cette fin de semaine, le transport du phosphate commercial à partir de ses mines à Redeyef

De Gabès,   Kasserine,   Sousse,   Kairouan et de bien d’autres villes, les derniers développements de la situation sanitaire ne sont guère dénués  de cette crainte qui pourrait être annonciatrice d’une deuxième vague. Une deuxième vague qui risque de mettre complètement à genoux une économie déjà rabotée par les grèves et les sit-in qui n’en finissent pas.

Bien entendu nous n’en sommes pas au point de voir un de nos enseignants agir tel que l’a fait son homologue américain qui, à la veille de la  reprise de la rentrée scolaire, a tout simplement écrit…. son testament qu’il laisse pour ses proches à  la suite de la pandémie qui secoue son pays.

Mais…en dépit des déclarations apaisantes que les responsables veulent bien faire, le danger guette. Parce que notre population est tout simplement indisciplinée  et que les personnes directement impliquées se suffisent de faire paraître des communiqués pour soulager leur conscience.

Aucune mesure pour contrôler, vérifier sur place, faire suivre l’exécution de ces consignes fleuves que l’on débite à tour de bras et qui ont besoin d’un suivi sévère et implacable.

Le virus progresse dans bien des pays. Il est même revenu en force dans ceux qui pensaient qu’ils en étaient sortis avec une inquiétante virulence. Avec l’ouverture  de nos frontières, la menace est encore plus franche. Cette décision, nous le savions, a immédiatement eu des conséquences pas encore dévastatrices, mais il ne tient qu’au comportement de notre population pour nous en tenir à ces cas que l’on enregistre ici ou là, et qui peu à peu se transforment en village, ou ville interdite.

La Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) a repris, en cette fin de semaine, le transport du phosphate commercial à partir de ses mines à Redeyef.

Suspendue depuis 2017 en raison des mouvements de protestation et des sit-in imposés par les demandeurs d’emploi qui ont bloqué les voies routières et ferrées de transport du phosphate, l’activité a depuis cessé.

Pourtant tous les experts économiques ont posé comme une des premières conditions de reprise de l’économie nationale la reprise des activités des principales richesses du pays : le phosphate et le pétrole.

Des semaines de négociations entre les différentes parties intervenantes ont mis un terme à ce drame qui a profondément porté atteinte à une économie déjà fragilisée par les recrutements massifs et intempestifs dans l’administration, dont les répercussions sur le budget de l’Etat, sur l’équilibre des caisses sociales ont été foudroyantes.

Reste la question qui s’impose : pour combien de temps ? Les mouvements non contrôlés, parce qu’ils sont le plus souvent politisés et servent les intérêts de ceux qui ont besoin de figer le pays dans l’incertitude et  dont   la centrale syndicale se désolidarise parce qu’ils portent atteinte au système de production, ne sont sans doute pas au bout de leurs arguments.

L’exception tunisienne

Le Président de la République  a signé,  dimanche, la loi relative « aux dispositions exceptionnelles de recrutement dans le secteur public, qui cible les chômeurs qui ont passé une période de chômage de 10 ans».

Rappelons que l’Assemblée des Représentants du Peuple a adopté, le 29 juillet 2020, ce projet  de loi  composé de 6 articles, et qui concerne le recrutement direct dans le secteur public des chômeurs titulaires de diplômes supérieurs qui ont passé une période de chômage de dix ans au moins et qui sont enregistrés auprès des bureaux d’emploi.

Les recrutements sont censés se faire progressivement sur une période de quatre ans et concerneront également les personnes ayant atteint l’âge de 35 ans sans avoir cumulé les dix années de chômage.

C’est une loi qui, paraît-il, n’a pas son pareil dans le monde. Espérons que cette exception soit un motif de fierté et non pas cause de bien des regrets en raison du poids  financier qu’elle représente pour le budget de l’Etat.

Bien entendu, nonobstant ces arguments purement financiers, dont tout financier est obligé d’en tenir compte, il y a cette main tendue pour ceux qui étaient complètement au bout du rouleau, alors qu’ils sont responsables de familles. C’est à eux de prouver que ce choix était le bon, en devenant productifs et en contribuant à faire sortir le pays de l’ornière dans lequel sa roue motrice s’est enlisée depuis au moins une décade.

Sans menaces et sans chantage

Les ministres italiens des Affaires étrangères, Luigi Di Maio, et celui de l’Intérieur, Luciana Lamorgese, ont effectué une visite de travail en Tunisie.

La réunion s’est tenue  au palais de Carthage sous la présidence du Président de la République, Kais Saied, en présence de Salma Enneifer, secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, du Commissaire en charge de la Politique européenne de voisinage et du Commissaire européen aux affaires intérieures.

La séance de travail «serait l’occasion d’aborder les moyens de consolider les relations distinguées entre la Tunisie et l’Italie et d’approfondir les négociations sur un certain nombre de problèmes dans la région, notamment la question de l’immigration irrégulière».

C’est ce qu’on a bien voulu dire, mais il n’échappe à personne que le problème de l’immigration et de ces milliers de Tunisiens et d’Ivoiriens, Congolais, et autres ressortissants de pays sub-sahariens qui échouent sur les côtes italiennes, est le principal motif du déplacement de cette délégation qui nous vient d’un pays ami.

L’Italie a bien raison de s’inquiéter de cet afflux qui bouleverse toute sa politique mais elle devrait comprendre que la Tunisie tient à ses enfants. Des jeunes filles et garçons, dont beaucoup ont fini par devenir de la nourriture pour poissons au fond de la Méditerranée et qui ont bravé ce danger mortel pour…vivre.

N’ayant pas trouvé les miettes qui leur auraient servi à survivre, ils ont tenté l’aventure. Il semble que nos voisins italiens ont compris. Sans pour autant imiter la Turquie qui a pompé des milliards de dollars dans les caisses européennes pour soi-disant endiguer les départs vers les pays frontaliers, il y a un minimum de bon sens dont on devrait tenir compte. La Tunisie est en droit d’exiger qu’on aborde la question non pas sous l’angle étriqué de garde-frontière, mais d’engager des discussions pour mettre en place toute une politique visant à la fixation de  ces candidats à l’immigration dans leurs pays, en leur offrant la sécurité et du travail pour vivre. Le fait de se faire accompagner par le Commissaire en charge de la Politique européenne de voisinage et du Commissaire européen aux affaires intérieures  est un bon signe. Espérons qu’il ne se limitera pas à l’aspect protocolaire.

Pression économique et sociale

L’Italie, les pays européens, savent que la Tunisie a besoin d’être aidé pour redresser son économie. Ce qu’elle reçoit de l’Italie ne suffirait pas pour acheter une vedette garde-côte équipée pour surveiller et mettre un  terme à ces exodes massifs. Pourtant, depuis la dernière visite du Chef de l’Etat à ceux qui sont directement engagés dans cette lutte quotidienne contre l’immigration clandestine, les choses vont beaucoup mieux.

La Tunisie, en dépit de tous ses problèmes économiques et sociaux, des incendies accidentels ou provoqués qui dévorent ses forêts et sa flore, malgré l’alerte permanente sur les hauteurs et aux frontières, nonobstant cette criminalité mobilisatrice des forces de l’ordre et qui a pour cause le relâchement de la discipline et la circulation de plus en plus importante de la drogue sous toutes ses formes, a donné des gages de son sérieux d’abord, de son efficacité ensuite. Mais…il lui faut des moyens pour mener de pair cette action sociale incontournable pour écarter toute tentation de sauter sur le premier objet flottant et lutter pour sa survie, et la surveillance des frontières.

Nos nouveaux concitoyens

Il faudrait quand même ne pas perdre de vue que ceux qui ne sont pas parvenus à passer de l’autre côté de la Méditerranée sont, pour une majorité écrasante, actuellement nos nouveaux concitoyens.

Il n’y a qu’à se rendre du côté de Raoued où un véritable ghetto est en train de prendre forme. Ces futurs petits tunisiens doivent être vaccinés, éduqués, on doit les intégrer et leur offrir du travail. Cela semble être le dernier souci de ceux qui négocient sans prendre en compte que la Tunisie est également sous la menace de ces franchissements illégaux des frontières. Si l’Italie est un objectif, la Tunisie en est le tremplin. Ceux qui n’arrivent pas à passer et qui ont été arrachés à une mort certaine restent sur nos terres.

Tout réside dans l’espoir de régler ce problème avec sagesse, dans la sérénité et en respect de cette amitié séculaire qui a toujours motivé les pays des deux rives de cette Méditerranée, creuset de bien des civilisations.

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