Le secteur culturel sous Covid-19 : Absence de visibilité et point de stratégie

Les mesures annoncées par le Chef du gouvernement Hichem Mechichi a encore mis à l’index l’importance du secteur culturel et a négligé le droit au travail et la survie des acteurs culturels.

Alors que les autres secteurs sont considérés vitaux y compris les commerces, les cafés, les lieux de loisir et de fêtes, les artistes techniciens et intermittents du spectacle sont condamnés à une mort lente au vu et au su du ministère de tutelle qui n’a montré aucune opposition ni négociation pour garantir au moins un service minimum dans les espaces de culture. La politique de l’autruche est décidément de rigueur et aucune voix ne s’élève pour défendre un droit élémentaire qui est le droit au travail.

Quand est-ce que le ministère de la culture et les différentes structures syndicales et professionnelles vont-t-elles réclamer ce simple droit à la vie ?

N’est-il pas temps de regarder en face la catastrophe et œuvrer pour limiter ses dégâts sur le secteur ?

N’est-il pas temps de lancer une cellule de crise qui aura pour rôle de se projeter au moins, dans les quelques mois à venir, réfléchir et surtout décider du devenir des professionnels de la culture qui subissent le chômage et la précarité depuis déjà des mois ?

Depuis le début du mois de septembre la situation épidémiologique ne cesse d’empirer, les dégâts se laissent sentir dans le secteur culturel qui viennent s’ajouter aux nombreuses crises ressenties auprès de ses différents protagonistes durant les mois de confinement et les nombreuses annulations des manifestations estivales qui ont suivies. Les espaces culturels ont du mal à joindre les deux bouts et les artistes, techniciens et tout l’écosystème artistique est touché de plein fouet. L’aggravation de la situation sanitaire ressentie depuis le début du mois de septembre est restée, à nos jours sans aucune prise en charge sérieuse. Le changement du gouvernement et du ministre de la culture n’arrange pas les choses.

Depuis sa nomination il y a déjà un mois à la tête du ministère de tutelle Walid Zidi, n’a pas montré un intérêt particulier à la question. La page officielle du ministère des affaires culturelles enchaine les communiqués et les photos relatives à des visites surprises et des rencontres sans suite avec quelques artistes ; des rencontres restées dans les limites de la courtoisie et de la communication archaïque reflétant une activité ministérielle restée sans véritable annonce de mesures nécessaires pour le soutien des acteurs du secteur ni la protection de leur droit au travail même sous Covid. Quelle suite a eu la rencontre avec les comédiens Hichem Rostom, Lamine Nahdi ou encore la cinéaste Salma Baccar, les chanteuses Amina Fakhet, Alia Bel Aid, l’acteur Faicel Bezzine, le compositeur Lazhar Cheiir et tous les autres représentants de festivals ou structures syndicales et professionnelles ? Quelle vision a-t-elle résulté de ses rendez –vous ? À quoi a servi cette visite surprise nocturne au site de Oudhina ?

A première vue, aucune. Les temps sont durs, l’épidémie ne semble pas être contenue dans les mois qui suivent, les prévisions sont de mauvaises augures telles annoncés par les professionnels de la santé et les autorités sanitaires du pays et par le monde.

N’est-il pas temps de regarder en face la catastrophe et œuvrer pour limiter ses dégâts sur le secteur ?

N’est-il pas temps de lancer une cellule de crise qui aura pour rôle de se projeter, au moins, dans les quelques mois à venir, réfléchir et surtout décider du devenir des professionnels de la culture qui subissent le chômage et la précarité.

En ces temps de crise sanitaire, il est courant que des voix s’élèvent pour affirmer que la culture est un luxe qu’on ne peut pas se le permettre, mais faut-il rappeler que la culture n’est pas un concept, ni une idée philosophique abstraite.

La culture c’est tous ces travailleurs entre artistes, créateurs techniciens, administrateurs, agents et tous les métiers avoisinants qui gravitent autour du produit culturel. N’y a –il pas une dynamique économique qui en dépend ; tous ces commerces qui se ravivent autour des festivals entre cafés, restaurants, fast-food, transport et autres ? Pourquoi vouloir ignorer l’apport économique de la culture et sa portée financière, civilisationnelle, éducative et même psychologique ? Pourquoi la communication du Ministère de la culture ne se charge pas de mettre en avant l’importance du secteur et l’urgence de préserver ceux qui le font ? Il est grand temps – pour ne pas dire il est déjà tard, pour établir un plan d’action pour sauver nos grandes manifestations qui sont de réelles opportunités de travail pour les 30 mille acteurs du secteur et qui sont aujourd’hui réellement compromises, du moins celles qui sont prévues en cette fin d’année.

Les JCC ont déjà reporté, les JMC habituellement organisées en fin septembre sont, à ce jour sans direction et sans dates fixées. La foire du livre a vu sa 36e édition prévue en avril 2020 reportée d’abord pour novembre puis, plus de nouvelles.

Aucune nouvelle aussi, du festival national du théâtre tunisien lancé en septembre de l’année dernière. Quant aux autres manifestions pataugent dans le flou total. Il est, à ce jour, urgent d’éclairer les plus de 30 Mille acteurs culturels de l’avancement du plan relance culture entamé par la précédente Ministre Chiraz Latiri, l’avancée des négociations via la mutuelle des artistes et des intermittents du spectacle sur le dossier de la CNAM et de la CNSS et surtout où en ai le dossier du statut de l’artiste qui s’avère une urgence cruciale même vitale pour structurer le secteur et préserver la dignité de l’artiste et même de sa vie.

La Covid-19 c’est une fatalité qui s’abat sur le monde fragilisant les plus démunis, le secteur culturel avec tous ses intermittents et les différentes situations précaires qui le caractérise est un secteur gravement sinistré qui risque de le devenir encore plus.

Le Ministère de la culture se doit d’être plus entreprenant, de devancer la catastrophe et de proposer des solutions de rechange à d’éventuelles mesures musclées, de poursuivre un travail de restructuration et d’organisation entamé par les prédécesseurs, qu’on ne reste pas les bras croisés regardant la catastrophe arriver et attendre passivement les décisions du ministère de la santé. En un mot offrir la possibilité au secteur de vivre même sous la Covid-19. À bon entendeur !

 

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