Fête de l’arbre: Reboiser pour redonner espoir

A l’occasion de la Fête de l’arbre de cette année, qui coïncide avec le deuxième dimanche du mois de novembre, les préparations vont bon train.

Un petit peu d’histoire ne ferait pas de mal : «La Journée nationale de l’arbre, ou Jour de l’arbre (Arbor day en anglais), est le nom d’une célébration où les personnes sont invitées à planter ou entretenir des arbres . La fête fut initiée par J. Sterling Morton, alors secrétaire à l’Agriculture des Etats-Unis, et Robert Furnas qui prit l’initiative de planter des arbres le 10 avril 1872 à Nebraska City».

Au lendemain de l’Indépendance, le Président Bourguiba avait décidé de faire du deuxième dimanche du mois de novembre de chaque année une fête nationale.

A cette occasion, les citoyens (enfants, jeunes et personnes âgées) essayaient de contribuer à la ré-arborisation du pays en plantant des arbustes qu’ils sont appelés à entretenir pour bénéficier de leurs bienfaits, à enrichir et à protéger la végétation dans le pays, en élargissant au maximum les espaces verts, vraies sources d’oxygène.

Tunisie la verte

Le tiers de la surface de la Tunisie est fait de déserts. C’est ce qui fait que cette fête, célébrée depuis l’aube de l’Indépendance, est une occasion de reboiser cette «Tunisie la verte» pour qu’elle mérite la réputation à laquelle elle doit son nom. Les Tunisiens se sont, en effet, attachés à planter des arbres au niveau de tous les gouvernorats.

La richesse forestière d’après les dernières estimations s’élève à un peu plus d’un million d’hectares.

En 2017, à la suite de l’importance des dégâts causés par les incendies et les inondations, feu Béji Caïd Essebsi avait annoncé, à l’occasion de la Fête de l’arbre, le démarrage d’une «campagne nationale extraordinaire de boisement» sur tout le territoire tunisien pour compenser les pertes enregistrées à cause des incendies qui ont eu lieu durant l’été 2017.

Il a, aussi, mis l’accent sur l’importance du boisement et la contribution des espaces verts et des forêts dans la préservation de l’équilibre environnemental, économique et social, ainsi que la limitation des inondations.

Des actes volontaires et criminels

Pour le Président de la République, Kaïs Saïed, qui s’est rendu à Amdoun, délégation de Béja où l’on a enregistré un gigantesque incendie ayant ravagé 820 ha de superficies forestières, dont cinq sont productrices du fameux pin d’Alep (zgougou), la conclusion est déjà tirée : «Ces incendies sont des actes volontaires et criminels visant à semer le trouble dans le pays».

En ces derniers mois caniculaires d’été et en raison d’une haute inflammabilité des surfaces végétales, les feux de forêts ont fait cette année des ravages.

Mais il n’y a pas que cela. Les observateurs et spécialistes de ces questions sont maintenant sûrs que des mains criminelles allument des feux pour faire du mal, occuper et mettre sous haute pression les différents intervenants pour éteindre ces incendies. Indépendamment des pertes en hectares calcinés, il y a les coûts matériels, financiers et humains de ces longues et fréquentes interventions de la Protection civile, de l’armée et même des volontaires, ainsi que ce que représentent ces arbres pour les familles qui vivent dans les parages. Ne parlons pas, bien sûr, des répercussions que cela représente au niveau de la qualité de la vie et de l’environnement.

Voilà le grand dilemme qui se pose à la suite de ces incendies à répétition qui mettent à mal tout ce qu’on entreprend pour corriger ce manque de zones boisées qui constituent tout d’abord une richesse, un patrimoine à préserver et qui sont, ensuite, des poumons pour assainir l’atmosphère et améliorer la qualité de vie.

L’article 307 du Code pénal tunisien

Malheureusement, en dépit de tous les efforts, ce que des mains vertes plantent, des mains criminelles détruisent. Pour cacher leurs crimes ou pour «occuper» la Protection civile, l’armée ou le citoyen à l’effet de s’adonner à de basses besognes, cela revient au même.

En vertu de l’article 307 du Code pénal tunisien, «quiconque allume intentionnellement le feu dans des forêts peut écoper jusqu’à 12 ans de prison. Le contrevenant est passible d’une peine d’emprisonnement à perpétuité si les lieux incendiés sont habités ou destinés à l’habitation. Il peut même courir la peine capitale si l’incendie entraîne la mort d’une personne».

Cela ne semble pas dissuader ces criminels qui commettent ces actes terroristes prémédités et préjudiciables aux intérêts de la communauté.

A l’occasion de la Fête de l’arbre de cette année, qui coïncide donc avec le deuxième dimanche du mois de novembre, les préparations vont bon train.

Une année exceptionnelle

Il faudrait, à notre sens, que la fête de cette année 2020 soit exceptionnelle.

Certains ministres nous promettent chaque année de planter des millions d’arbres (des oliviers entre autres). Nous nous contenterons de quelques centaines de milliers qui seront bien entretenus, protégés et surtout intégrés dans le milieu dans lequel ils seront plantés.

Il ne sert à rien d’annoncer des chiffres, de mobiliser les TV et de montrer des gamins et gamines en train d’en planter. L’essentiel réside en ce qu’on a prévu pour que ces arbustes grandissent et jouent le rôle qui leur est dévolu dans la protection des sols et de l’environnement.

Nous savons que des milliers et des milliers ne vivent que l’espace de quelques heures. Une fois ces arbustes plantés, le ministre remonté dans sa voiture et la TV qui a plié bagage, personne ne s’en occupera plus jamais.

Il faudrait que cela change. A une certaine époque, dans l’ex-Yougoslavie, on avait pris la décision de planter des pruniers sur toutes les terres qui appartenaient à l’Etat. Le prunier sert à la fabrication d’une boisson alcoolisée propre à ce pays. Pourquoi ne pas essayer de faire la même chose et essayer de planter ces terres actuellement abandonnées en figues de Barbarie dont le litre d’huile provenant des pépins coûte des millions? Ou encore en oliviers, figuiers, grenadiers et autres plantes capables de les transformer en outils de production à même de conforter le budget de l’Etat ? Quitte à les reconvertir en cas de besoin ou de cession ?

Entretenir et protéger

Un exemple très simple de ce qui se passe le plus souvent: sur la bretelle reliant l’Ariana à El Manazah, on a pris la très bonne initiative de planter des arbustes. Ce sont les dernières pluies qui les ont sauvés, car passant régulièrement par cette avenue, nous avions remarqué qu’ils commençaient à jaunir faute d’arrosage.

Certains d’entre eux se sont détachés de leurs tuteurs, et avec le vent, ils finiront par se casser, puisque déjà deux ont été brisés par des vandales qui passaient par-là. Ils sont pourtant d’une espèce rare et coûteuse.

Il ne suffit donc pas de dépenser de l’argent pour planter, mais il faudrait entretenir et protéger.

A-t-on jamais donné le bilan de ce qui est resté du nombre d’arbustes plantés l’année d’avant ?

Un plan d’action

Planter oui, mais pas n’importe où. Il faudrait mettre en place un véritable plan d’action. Ce ne sont pas seulement les espaces nus qui ont besoin d’arbres. Les forêts de chênes du côté de Aïn Draham et Tabarka qui ont payé un fort tribut aux incendies ont besoin d’être rajeunies. C’est aussi le cas de certaines oliveraies qui ont pris de l’âge également, tout en gardant jalousement l’espèce tunisienne et non pas en introduisant des plants étrangers qui risquent de ruiner toutes les prévisions. Le Belvédère a aussi besoin d’un coup de jeune. Il compte des arbres centenaires qu’il faudrait renouveler tout en remplaçant ce qui a été détruit faute d’eau ou par main d’hommes, etc.

C’est pourtant l’essentiel, car, trêve de démagogie : la fierté de chaque gouvernorat serait de faire annuellement le point et de montrer ce qu’il a réalisé en montrant ses «forêts» plantées, ses espaces verts, au terme d’un programme sérieux, étudié en fonction des spécificités de la région ou des arbres entrés en production.

Si les embauchés dans le cadre des «sociétés de l’Environnement de Plantation et de Jardinage» arrivaient à faire aussi bien que les contingents militaires chargés de redonner vie au désert, la Tunisie redeviendra réellement verte. A condition de leur fournir les moyens logistiques et financiers, bien entendu, ce qui prouvera que la création de ce genre de sociétés répond à des objectifs économiques et sociaux et non pas pour résorber artificiellement le chômage qui sévit dans bien des régions.

C’est à cette seule condition que la fête de l’arbre prendra toute sa dimension.

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