Ils ont dit

  Mejdi Hsan: Directeur exécutif de l’Institut arabe des chefs d’entreprises (Iace)

«L’étude intitulée “emploi et entrepreneuriat en temps de Covid-19 : impact et réponses”, que nous avons élaborée avec l’ONG éducation pour l’emploi “EFE Tunisie”, vise à identifier les défis rencontrés par les acteurs de l’emploi et ceux de l’entrepreneuriat suite à la crise économique causée par la Covid-19. Cette même étude a, aussi, permis de mieux cerner les besoins en formation et en accompagnement à apporter aux entreprises et aux jeunes afin de préserver leurs postes de travail ou bien d’intégrer le marché du travail. L’étude en question a démontré que 71% des entreprises sondées annoncent qu’il n’y aura pas d’évolution de l’emploi pour les prochains mois. Par contre, 15% des entreprises estiment qu’il y aura une baisse de l’emploi au sein de leur organisation pour les prochains mois, et ce, afin de diminuer les coûts salariaux. 11% des entreprises anticipent une augmentation de l’emploi. Egalement, 59% des entreprises, qui estiment un accroissement de l’emploi pendant les 12 prochains mois, déclarent que cette augmentation va toucher seulement les postes de cadres supérieurs. Par ailleurs, 41% des entreprises affirment que l’augmentation concerne seulement d’autres postes (techniciens, ouvriers…)».


Hatem Zaâra: Expert financier

«Heureusement, le rapport du FMI avait précédé les récentes manifestations nocturnes, faute de quoi ses résultats auraient été non probants. Le rapport est presque entièrement en harmonie avec le communiqué du Conseil d’administration de la Banque centrale pour le mois de décembre. En effet, certaines parties de celui-ci sont très identiques audit communiqué et elles concernent le développement du secteur extérieur déclinant une baisse brutale de la demande d’importations et le grand choc qu’ont subi les exportations. Le rapport du FMI fait la lumière sur un point positif et qui concerne le flux continu des envois de fonds des Tunisiens résidant à l’étranger. Il est nécessaire de fournir toutes les facilités fiscales et les incitations nécessaires afin de valoriser davantage cet atout qui pourrait soutenir la résilience de l’économie tunisienne. Le taux de repli, selon les prévisions du FMI, est de 8,2%, ce qui est plus optimiste que ne le prévoyait la Banque mondiale, et il est sans précédent depuis l’Indépendance, compte tenu de la hausse de la masse salariale et des entreprises publiques en perte. Le FMI s’attend à atteindre un taux de croissance de 3,8% au cours de cette année. A mon sens, ce chiffre est très optimiste, car ces attentes sont considérées comme relativement irréalisables avec une marge d’erreur d’environ 50%. Le Fonds rejoint les autorités tunisiennes en ce qui concerne la situation difficile qui se caractérise par l’existence de deux défis simultanés, notamment le sauvetage des vies et l’initiation des réformes pour tous les déséquilibres financiers. Le FMI demande à ce que la masse des salaires soit contrôlée et espère que les autorités tunisiennes réforment le système de compensation qui ne s’adresse pas à ceux qui le méritent, tout en continuant à soutenir les entreprises publiques en difficultés».


Hakim Ben Hammouda: Economiste et ancien ministre des Finances

«Notre pays a connu une forte détérioration de la situation macroéconomique et des grands équilibres des finances publiques. Ces déficits importants ont laissé courir le risque d’un défaut de paiement. Mais je crois que l’économie tunisienne a fait preuve d’une grande résilience. Il y a également eu un recours important à l’endettement interne comme externe pour faire face aux difficultés des finances publiques. De ce point de vue, je crois que l’un des défis les plus importants concerne le rétablissement des grands équilibres macroéconomiques à travers un programme de stabilisation à moyen terme… Pour sortir de cette crise multiforme, nous devons reconstruire la confiance. Ce processus, parallèlement aux institutions et aux lois, exige la construction d’un projet collectif et commun qui passe par la mise en place d’un nouveau contrat social, pour la nouvelle République. La sortie de ces crises et l’ouverture de nouvelles perspectives, à notre expérience collective, passent par la reconstruction du contrat social en crise. Cette reconstruction exige la mise en place d’une stratégie à deux niveaux. Le premier niveau de cette stratégie est de court terme et passe par le rétablissement des grands équilibres et la relance de la croissance et de l’investissement. Le second niveau de cette stratégie va se déployer sur le moyen et le long termes et concerne les grandes transitions et réformes à mettre en place pour construire un nouveau modèle de développement. Nous traversons, depuis le déclenchement de la révolution, des défis importants et des crises profondes qui sont au cœur du désenchantement actuel. Parallèlement aux crises politiques, la détérioration de la situation économique et sociale constitue une composante essentielle de cette crise et exige la définition d’un nouveau projet commun. Je suis bien évidemment optimiste, avec les pas importants franchis en matière d’ouverture du système politique et de sa démocratisation. Il faut nous atteler à apporter des réponses aux défis économiques et sociaux. La route sera longue et difficile, mais je reste optimiste quant à notre capacité à ouvrir de nouvelles perspectives politiques à notre expérience historique».

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