La question des prix ne se pose pas en baisses ou en hausses. Fixer le prix d’un produit consiste à appliquer des règles élémentaires, voire primitives. La libération des prix n’a aucun sens et ne peut entrer en ligne de compte. Quant à la «loi» fallacieuse de l’offre et de la demande, elle est devenue caduque parce qu’elle est devenue très artificielle. Elle est soumise à de nombreuses manipulations dont, notamment, la spéculation et la mainmise mafieuse sur les circuits de distribution.
Dans un contexte économique comme celui que connaît la Tunisie, il n’y a rien de normal. Tous les rouages sont tenus par des pouvoirs “occultes” qui nous mènent à la baguette et qui sont, bizarrement, au-dessus des lois.
Offre et demande ?
Depuis des années (disons une décennie), notre commerce va trop mal. Il n’y a aucune transparence. Les prix, dont on nous dit qu’ils doivent obéir à la loi de l’offre et de la demande, ne font qu’augmenter à une vitesse vertigineuse, dépassant toute logique.
Pourtant, parmi les règles élémentaires régissant le marché, un prix peut augmenter, mais, aussi, baisser. Rien de cela chez nous. La courbe est toujours ascendante parce que cela arrange les acteurs économiques essentiels. Officiels ou informels.
Les habitudes commerciales ont été largement faussées par des pratiques malsaines tolérées depuis longtemps ou acceptées pleinement par des responsables complices. Le laisser-aller aidant, de nouveaux acteurs ont émergé pour imposer de nouvelles règles du jeu qui consistent à occuper tous les terrains et à investir toutes les filières.
Des partis politiques, des hommes d’affaires et des hommes de main sont parvenus à construire un nouvel espace économique parallèle dans lequel ils peuvent évoluer en toute liberté. Étant assuré, en haut lieu, d’une impunité totale. L’implication directe de certains magistrats dans des affaires louches ou l’implication d’hommes politiques ou de députés dans d’autres affaires de corruption en disent long sur ce qui nous attend et lève le voile sur le degré de corruption atteint par notre système politique et économique (qui sont, nécessairement, liés).
Avant 2011, toutes les couches sociales pouvaient subvenir à leurs besoins sans trop de difficultés. A l’exception d’une petite minorité de la population. Qu’en est-il, aujourd’hui ?
Que l’on appartienne à la classe défavorisée ou à la classe moyenne, on rencontre les mêmes difficultés. Si, avant 2011, on pouvait s’acheter n’importe quelle marchandise sans trop s’en soucier, il n’en est plus de même, actuellement.
Mis à part les produits subventionnés, le Tunisien n’est plus en mesure de satisfaire sa demande en légumes, en viandes, en fruits, etc.
Tout est hors de prix. Son pouvoir d’achat est loin de lui permettre d’assurer ses besoins essentiels. Le prix des légumes a décuplé en 10 ans. Pour d’autres produits, il en est de même, sinon plus. Qu’on compare, par exemple, le prix des fromages, des chocolats, des fruits secs (amandes, pignons, cacahuètes…) avant et maintenant.
Démanteler les circuits anarchiques
Parlons des fruits ! Les prix sont inabordables. 1 kg de dattes est vendu à 7 euros en France. Le prix n’en est pas loin chez nous si on tient compte du pouvoir d’achat des uns et des autres.
Des figues de chez nous sont vendues de 7 à… 12 dinars, alors qu’elles étaient vendues il y a quelques années à 800 millimes ou 1 dinar ! Même les figues de Barbarie ont vu leur cote augmenter pour atteindre des seuils, jusqu’ici, inimaginables. On sait, pourtant, qu’un tel fruit ne nécessite aucun entretien, aucune dépense, à l’exception de sa cueillette. C’était le produit des pauvres. Se l’offrir est devenu un luxe. Idem pour les fraises, les raisins, les pommes, les poires, les pêches… Les pastèques qui sont un produit phare de l’été s’achètent en… tranches ! Du jamais vu chez nous. Pourquoi ? Tout simplement, parce que les spéculateurs en ont voulu ainsi et ont fait monter les prix en flèche.
Quant aux viandes, n’en parlons pas ! Les opérateurs économiques qui détiennent la filière se donnent tous les droits d’en fixer les prix. Les commerçants n’y vont pas avec le dos de la cuillère puisqu’ils n’hésitent pas à pratiquer des tarifs très élevés sans la moindre pitié ni scrupule à l’égard des consommateurs. D’ailleurs, ils n’ont rien à craindre du côté des autorités.
Le client, pour sa part, n’a pas besoin de compassion. Tout au plus cherche-t-il le respect des règles et des lois si tant est que les intervenants sachent que de telles règles et lois existent. Dans la conjoncture actuelle, rien ne prouve que le secteur commercial chez nous est en passe de se restructurer. On ne va pas mendier pour obtenir une baisse des prix. Car ce qui est pratiqué n’est pas conforme à la logique.
Seule une opération de grande envergure serait capable d’introduire le bouleversement salutaire. Il est hors de question d’invoquer toujours ces slogans désuets de la loi de l’offre et de la demande, alors que tous les fondements de cette loi sont faussés à la base.
S’agissant des circuits officiels, il n’est pas nécessaire de leur demander de baisser les prix. Tout simplement, ils doivent suivre une politique de transparence grâce aux lois économiques que tout le monde connaît et que l’on doit contrôler. Un prix c’est le résultat d’un coût de production, d’un prix de revient qu’on peut vérifier. Avec les marges bénéficiaires en vigueur, on doit alors déterminer le prix de vente.
Ce que l’on constate est loin à des années-lumière de ce qui doit être.
Transparence
Quant aux circuits de distribution dont on ne cesse de parler, il n’est pas difficile de les démanteler ou de leur imposer l’application stricte de la loi. Les services concernés les connaissent bien. Si ce sont des circuits clandestins appartenant à des lobbies, il n’y a qu’une solution : les mettre hors d’état de nuire. Autrement dit, on assainit le secteur en imposant des pratiques transparentes.
Pour en revenir à la liberté des prix, il faudrait être en présence d’acteurs, vraiment responsables qui soient à la hauteur de la situation. Ce qui, malheureusement, n’est pas le cas, aujourd’hui. L’écrasante majorité des opérateurs économiques se sont habitués à des pratiques à la limite de l’illégalité. Cette attitude est héritée de l’ancien système basé sur le laxisme dans le respect des réglementations.
Dorénavant, il n’est plus question de laisser faire ces opportunistes et ces profiteurs. Tout le monde doit se soumettre aux règles du jeu que nécessite le secteur. On ne peut plus accepter, par exemple, que dans le secteur des pièces de rechange (automobiles, engins agricoles, machines électriques ou électroniques…) on affiche des prix astronomiques pour un produit, généralement, contrefait.
Les marchands opérant dans ce secteur sont appelés à se conformer à un minimum de raison. Le contraire devrait les exposer aux sanctions qui s’imposent. C’est-à-dire des sanctions exemplaires, sans la moindre complaisance.
Cette exemplarité est valable, aussi, dans tous les autres domaines où il y de nombreux abus. Et là, on peut affirmer, sans le moindre risque de se tromper, que tous ceux qui se livrent à une activité commerciale ont leurs petites astuces pour vendre au prix le plus fort. On pense, non seulement aux grandes surfaces, mais aussi, aux petits ou moyens marchands, en passant par le petit épicier ou “hammass” du coin. Tous pratiquent des prix élevés.
Fournitures scolaires
On ne finira pas sans penser à la prochaine rentrée scolaire et universitaire qui est une véritable aubaine pour les libraires ou les commerçants de fournitures scolaires …
Sur ce plan, les familles dépensent, selon certaines estimations, jusqu’à 500 milliards de millimes/an pour les fournitures de leurs enfants.
Les promotions affichées n’y font rien, puisque personne n’y croit vraiment. D’ailleurs, les prix des différentes fournitures scolaires restent toujours très élevés. On sent que ces prix sont disproportionnés. Les fournitures (gommes, stylos, colle, compas…) coûtent, comme on dit, les yeux de la tête. Ne parlons pas des cahiers. Là aussi, on constate que les prix sont astronomiques !
Au lieu de demander de baisser les prix des cahiers, il vaudrait mieux exiger la vérité des prix. Car, on ne peut accepter qu’il y ait des cahiers qui coûtent des dizaines et des dizaines de dinars. Bien sûr, les professionnels vont s’emporter contre ces propos, mais c’est la réalité. Un produit doit être vendu à son prix réel. C’est-à-dire son coût de revient et le bénéfice légal.
Quant au Centre national pédagogique (CNP), tout le monde sait que sa vocation n’est pas lucrative et que les prix des livres sont gelés depuis plusieurs années.
La baisse, la plus importante, devrait venir d’ailleurs.
Sadok Ziada
16 août 2021 à 09:04
L’état doit intervenir pour mette fin à ses abus et le citoyens doit rester vigilant et signaler chaque abus