A Kairouan, la forte chaleur qui a sévi ces derniers jours a fortement incommodé les personnes âgées et causé de nombreux cas d’intoxication alimentaire.
Les deux dernières semaines du mois de juin ont été très pénibles pour les Kairouanais qui ont dû supporter des pics de chaleur atteignant 47 degrés avec en plus beaucoup d’humidité et des coups de sirocco. Et c’est surtout les personnes âgées, ainsi que les collégiens et les écoliers qui passaient les concours de la 9e et de la 6e qui ont souffert de cet été qui a démarré en trombe.
Rappelons dans ce contexte qu’en France les épreuves nationales du Brevet des collèges, prévues les 27 et 28 juin, ont été reportées au 1er juillet, et ce, à cause de la canicule. Quant aux jeunes vacanciers kairouanais, ils sont restés cloîtrés chez eux, dans un état semi-comateux, faute d’espaces de loisirs et de détente.
Anis Jaouahdou, 17 ans, nous confie : «A Kairouan, les parcs de loisirs sont inexistants, les maisons des jeunes et de la culture sont désaffectées tant elles n’offrent pas d’activités culturelles intéressantes pour les jeunes, outre le fait qu’elles sont dépourvues d’équipements modernes de 2e génération et de programmes éducatifs, sportifs et de loisirs. De ce fait, nous sommes contraints de supporters la chaleur suffocante et la routine des va-et-vient entre les cafés et les salons de thé pollués, brumeux et enfumés».
Son ami Ahmed Jrad, 18 ans, renchérit : «La seule piscine qui nous permettait de nous rafraîchir est fermée depuis plus de 6 mois pour cause de travaux qui traînent en long et en large. Et dire qu’on souhaitait la création d’une 2e piscine bien équipée et de jardins publics avec des jets d’eau qui nous offriraient des moments de détente. Malheureusement, il n’en est rien, car Kairouan fait partie des villes oubliées et marginalisées. Mon rêve est de réussir dans mes études et d’aller travailler et vivre dans une ville côtière où les jeunes sont plus épanouis et où leur esprit est toujours en éveil. En fait, je préfère une autre existence à la mienne…».
Canicule, soif et intoxication alimentaire
Il va sans dire que cette chaleur suffocante a eu des conséquences néfastes sur la santé des personnes fragiles et a provoqué beaucoup de cas d’intoxication alimentaire.
On cite l’exemple de 24 convives du village de Bir El Dawla (délégation de Bouhajla) venus assister le soir du 25 juin à un dîner (couscous à l’agneau) à l’occasion d’une fête familiale qui ont été victimes d’une grave intoxication alimentaire car le repas a été préparé dès 10h00, en cette période caniculaire. Transférés aux hôpitaux de Bouhajla et de Kairouan, ils ont été retenus deux jours.
Par ailleurs, le bloc opératoire de l’unité chirurgicale «Les Aghlabides» a connu en cette période caniculaire des coupures d’eau dont le débit était souvent très faible, ce qui a obligé les médecins à reporter plusieurs interventions chirurgicales.
D’un autre côté, on a enregistré dans la matinée du 25 juin une coupure d’électricité au service des urgences de l’hôpital Ibn-El Jazzar sans que le générateur ne se mette automatiquement en marche. D’où la colère des familles dont les patients étaient sous-machine dans la salle d’observation de ce service. Heureusement que la panne d’électricité n’a duré que 3 minutes, mais qui auraient pu être fatales, une équipe de maintenance a été dépêchée sur les lieux pour détecter les origines de cette coupure.
Toujours, le 25 juin, où il faisait 45 degrés, au dispensaire de Aïn Jloula dont le seul médecin affecté était en congé de maladie, on a été obligé d’avoir recours au médecin de l’hôpital de Oueslatia (à 30 km) qui était la veille de garde au cours de laquelle il a ausculté 80 patients.
Ainsi, sans avoir eu le temps de récupérer, il a été obligé d’examiner 70 autres malades, de 8h00 à midi. D’où son état de fatigue et de stress, vu le manque de sommeil. Jusqu’à quand va durer ce chaos dans les établissements hospitaliers ?
A part cela, cela fait trois semaines que les villageois de Rouissat, Boussaber, Jwaouda et Rdayra (délégation de Chebika) souffrent du manque d’eau car le seul sondage les alimentant a un débit trop faible, ce qui a nécessité le rationnement de l’eau (à raison de 2 jours par semaine pour chaque village).
Or, même durant ces 2 jours, l’eau n’est disponible qu’à partir de minuit. Cette situation a augmenté le cas de maladies dermiques et la mort des animaux. D’où les mouvements de protestations et de colère organisés non seulement à Chebika, mais aussi à El Ala, à Haffouz, à Sbikha, à Bouhajla et à El Hajeb vu le manque d’eau potable.
Vivement les vieilles habitations!
Si beaucoup d’habitants affrontent cette canicule en recourant aux climatiseurs, aux ventilateurs, aux éventails et à l’eau fraîche, d’autres plus chanceux savourent la fraîcheur des maisons traditionnelles dont les vastes chambres, les maksouras, les squifas, les caves et la cour intérieure sont «climatisées» naturellement grâce à une architecture spécifique et à des matériaux de construction adaptés au climat semi-aride de la région.
Lotfi Atallah, jeune cadre dans une banque, nous parle de son emploi de temps en période de canicule : «Pour échapper à la chaleur torride de la cité aghlabide, je me réfugie des fois chez mes grands-parents dont la maison est située dans la médina et qui me procure beaucoup de fraîcheur sans aucun climatiseur. Il m’arrive également d’aller passer quelques moments à Bir Barrouta et de flâner dans les vieux souks couverts et qui sont relativement frais même pendant la sieste.
Ensuite, je me dirige vers un publinet climatisé et j’en profite pour me connecter au net et pour chater avec mes amis. Passer l’été à Kairouan pour ceux qui n’ont pas les moyens financiers d’aller ailleurs n’est pas si mauvais que ça !».